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production intellectuelle

31 juillet 2012

les enjeux de la gouvernance ( ouvrage inachevé)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LA GOUVERNANCE

ENTRE

REGLEMENTATION (d’une part)

ET

GESTION FRAUDULEUSE (d’autre part)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ASSOU OUCHEN

 

 

 

 

 

 

 

INTRODUCTION

 

 

 

Il est admis que l’évolution de la conscience humaine est à l’origine d’un certain nombre de comportement palliatif de l’anarchie qui avait marqué ses débuts sur terre.

 

Tout d’abord, l’horreur des guerres primitives a donné naissance au concept de la paix, pourquoi s’entretuer pour un bien vital dont la disponibilité excède le besoin d’une part et qu’on peut trouver presque n’importe où à défaut d’aider la nature à le produire d’autre part alors qu’il suffit juste de la partager ?

 

La paix a eu ses conséquences, parmi elle la baisse des taux de mortalité violente générée par la guerre, du coup, le partage devient complexe car il y de plus en plus de bénéficiaire. L’objet du partage devient alors un bien public qui théoriquement appartient à tous d’où le concept du bien collectif qui donnera naissance par la suite à celui de la collectivité et puis celle du bien privé.

 

Parallèlement à cette évolution , la manière de penser, de vivre, de comprendre l’environnement visible et l’imagination d’un autre invisible trop chargé de promesses d’une future vie pleine de quiétude et de sanctions pour avoir abuser de l’environnement visible, ont également évolué .

 

 

 

C’est ainsi que peu à peu, la conscience humaine a élaboré un système de valeurs, touchant aux manières de vivre et la même voie d’évolution humaine.

 

Ces valeurs, les plus marquantes dans le monde des affaires sont l’éthique et la morale. Si l’éthique touche beaucoup le plus les droits fondamentaux tel l’égalité de tous devant la chose publique et la règle du droit, la seconde concerne plutôt l’action et le pouvoir de l’exercer. Quand on parle d’argent sale, on vise implicitement le viol caractérisé de la morale et le mépris de l’éthique et des droits de la collectivité et de l’individu.

 

Le monde des affaires tant au niveau international que national sont marqués par ces valeurs, il existe des états qui luttent pour l’éthique et la morale dans les relations inter états quelque soit leur nature, puis il y des états qui imposent leur propre approche de ces deux valeurs en faisant passer leurs propres intérêts et ceux de leurs citoyens avant ceux des autres. Il n’y a que les crises économiques et les catastrophes qui rapprochent les concepts et les orientent vers une solidarité planétaire du moins en apparence.

 

La problématique de la mondialisation

 

 

Depuis les accords de « Bretton Woods » qui ont légalisé le « General Agreement on Tariffs and Trade » (GATT) en 1947, le principe économique du libre-échange s’est étendu progressivement au monde entier.

 

Le mouvement a provoqué la multiplication des entreprises transnationales en recherche de paradis fiscaux, de main d’œuvre bon marché , d’atouts commerciaux et d’espaces à polluer loin de leurs nations . Bref, des pays qu’on qualifie hypocritement de pays émergeant, en voie de développement ou de futurs dragons économiques et qui sont prédisposés à céder jusqu’aux trottoirs de leurs cités pour une poignée de devises.

 

L’éthique des affaires s’inscrit donc dans cette problématique de la mondialisation libérale sauvage qui sera vite qualifiée d’immorale et loin de toute sorte d’éthique soulevant des questions pertinentes sur l’impact de la politique sur les activités des entreprises.

 

 

L’ensemble des thèmes liés à la mondialisation, à la rente financière et le capitalisme mutualiste, aux techniques de l’information et de la communication, induisent de plus en plus une nouvelle représentation de l’entreprise et de sa responsabilité au cœur de la société, notamment l’obligation de « l’éthique des affaires » et du développement durable qui fut érigé en notion universelle depuis « la conférence de Stockholm 1972 ».

 

Le développement durable consiste selon le rapport Brundtland en « La capacité des générations présentes à satisfaire leurs besoins sans compromettre la capacité des générations futures à satisfaire leurs propres besoins. » . Ce qui ambitionne de limiter les dégâts de la mondialisation et du néolibéralisme.

 

Cette notion avait, par ailleurs, incité les 150 pays ayant participé à la conférence de Rio de Janeiro (1992) à œuvrer en vue de concilier le développement économique avec la protection de l’environnement et l’équité sociale, ce qui fait inéluctablement appel à de nouveaux concepts de la gouvernance tant au niveau des choix stratégiques des entreprises que ceux des nations.

 

Il faut noter par également que l’opinion publique internationale, sous l’influence des recommandations de la conférence de Rio de Janeiro et la crise financière qui foudroyé les économies occidentales, est devenue de plus en plus exigeante en ce qui concerne la responsabilisation des entreprises à travers leur management et la nature de leurs choix stratégiques sur les plans social, économique et environnemental. (Implication totale dans la vie sociale, la qualité sociale, humaine et écologique de leurs produits ainsi que leurs procédés de production)

 

C’est de là que sont apparus la notion de « l’entreprise citoyenne » (Centre des Jeunes Dirigeants 1992) et l’idée de « performance globale ». Animés par l’ensemble de ces notions et concepts, des scientifiques et des chercheurs, venus de diverses disciplines (philosophie, gestion administrative et financière, sciences sociales…), tentent d’élaborer un « nouveau contrat social » définissant les relations entre les sociétés civiles, les entreprises et les pouvoirs publics.

 

L’autre dimension de la problématique engagée sur l’éthique des affaires pose les questions relatives à la moralisation de la gestion des affaires et des mécanismes de contrôle. Il s’agit de faits générateurs de scandales tels la corruption, la fraude, l’abus de biens sociaux, les trafics d’influence, etc. …,

 

Elle interroge plus spécialement sur l’entreprise citoyenne et sur la gouvernance de l’entreprise en général. 

 

C’est ce dernier questionnement, gouvernance de l’entreprise, que le présent ouvrage se propose d’analyser, d’autant plus qu’il s’agit là d’un thème d’actualité sur tous les plans. Il est même en voie de devenir l’indicateur numéro 1 de la performance de tout gouvernement.

 

 

 

 

 

 

ETHIQUE ET GOUVERNANCE

 

Il convient cependant de souligner que l’éthique des affaires, en tant que composante fondamentale d’une bonne gouvernance, alors que l’on attend d’elle qu’elle développe une politique de responsabilité dynamique, en quête d’efficacité sociale et environnementale. L’éthique constitue toujours le cadre grâce auquel s’affirment la personnalité et l’originalité. Il appartient à chaque entreprise d’être inventive pour construire une stratégie non-conformiste, dans le but de répondre à la problématique de sa responsabilité sociale. La prise en compte du « développement durable » doit se manifester, tant par des actions extérieures à son activité économique (mécénat de solidarité, partenariat avec les associations, missions d’entreprise), qu’à travers cette activité même (ressources humaines, développement local). L’enjeu stratégique consiste à concevoir l’adéquation des capacités de l’entreprise avec son environnement. Il montre que l’Etat ne dispose plus des moyens pour répondre à l’intérêt général et que les « parties prenantes » se tournent vers les entreprises créatrices de richesses, en quête d’une légitime participation à l’intérêt commun.

 

Aussi, les dirigeants sont ils invités à faire prévaloir l’imagination des équipes au travail en encourageant  la communication tout en  bannissant l’esprit de  diktats, en gérant dans  la transparence et non par le style de secrets professionnels qui couvrent les bassesses.

 

L’épanouissement et le bien-être des cadres dirigeants, et plus largement de l’ensemble des salariés, doit constituer pour l’entreprise un objectif aussi important que le profit.

 

La reddition des comptes ne doit pas entamer la dignité des dirigeant ou de constituer pour eux une menace les poussant à l’inertie totale et à la crainte d’être innovateur et créatif. De même l’audit, sous prétexte d’éthique et de légalisme, ne doit pas être conçu comme machine chercheuse de poux, mais comme remède préventif avant d’être curatif.

 

 La gouvernance équitable et basée sur les bonnes pratiques, est un questionnement permanent de la conscience (individuelle et collective) dictée dans le but de fixer un comportement, écrite dans une charte ou un code déontologique, elle s’apparente à une réglementation axée non pas sur les procédures, mais plutôt sur un système de valeurs.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PREMIERE PARTIE :

DE LA GOUVERNANCE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La gouvernance est mot à forte connotation musicale ! Malgré ses contours vagues et flous en tant que concept, il n’en demeure pas moins qu’il constitue, sur le plan médiatique du moins, depuis le début des années 90 et de  façon concomitante du nouvel élan de l’Etat néolibéral l’outil sémantique le plus attitré des décideurs, des politiciens et des militants des associations composant ce que l’on désigne comme «  société civile ».

 

Quelles sont les motivations exactes de cet engouement pour un concept qui date depuis l’aube de l’humanité ?

 

Pour certains, il s’agit d’une démarche immatérielle basée sur des croyances plus que des actes concrets tendant à « légitimer de nouveaux rapports entre la politique et l’économie ».

 

C’est en quelque sorte le souci de se prémunir contre toute critique remettant en cause la fiabilité des processus décisionnels socio-économiques officiels que le concept est souvent avancé comme objectif stratégique dont la définition exacte échappe au commun des mortel. C’est ainsi qu’on peut assimiler qu’en matière de fiscalité, une taxation abusive et disproportionnée par rapport aux normes des contributions équitables des assujettis à la fiscalité, est une mesure de bonne gouvernance entreprise par les pouvoirs publics dans le cadre d’un redéploiement des richesses et des charges entre les citoyens, alors qu’on sait pertinemment que le contribuable le plus discipliné, malgré lui d’ailleurs, est celui dont l’impôt est prélevé à la source. Pire encore qu’on constate que pour un même impôt, deux modes de recouvrement sont opératoires en dehors de toute préoccupation de justice fiscale : l’impôt sur le revenu !

 

Pour certains, « la gouvernance est une notion parfois controversée, car définie et entendue de manière diverse et parfois contradictoire. Cependant, malgré la multiplicité des usages du mot, il semble recouvrir des thèmes proches du « bien gouverner ». Chez la plupart de ceux qui, dans le secteur public ou privé, emploient ce mot, il désigne avant tout un mouvement de « décentrement » de la réflexion, de la prise de décision, et de l'évaluation, avec une multiplication des lieux et acteurs impliqués dans la décision ou la construction, en commun, d’un projet.

 

Il renvoie à la mise en place de nouveaux modes de pilotage et de régulation plus souples et étiques, fondés sur un partenariat ouvert et éclairé entre différents acteurs et parties prenantes, tant aux échelles locales que globales et nord-sud »

 

En tout état de cause, la gouvernance est un concept qui doit être démystifié et vulgarisé pour mieux comprendre à quoi il correspond en quoi il est vraiment utile au lieu d’en user à outrance dans son état « très variable, mal éclairé bien qu’affublé de qualificatifs bienveillants »

 

En effet, comme le souligne Robert JOUMARD, « la gouvernance et son champs sémantique peuvent constituer une logorrhée pseudo moderniste au service d’un discours incantatoire.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1.  DIMENSION ETYMOLOGIQUE DE LA GOUVERNANCE

 

 

Le mot « gouvernance » est le dérivé du terme « gouverner » issu du latin « guebernare », emprunté au grec « kubernâo ».

 

Au milieu de XVe siècle, selon Wikipédia, le terme gouvernance désignait la charge domestique de la « gouvernante », depuis la révolution française, ce terme était tombé  en désuétude compte tenu du fait qu’il était évocateur des aspects péjoratifs de l’Ancien Régime alors qu’il a été toujours maintenu et entretenu par la langue anglaise. Sa reconquête de la langue française remonte aux débuts des années 90 par le biais du terme anglais « gouvernance ».

 

Il faut souligner par ailleurs que le concept de « gouvernance » est passé par des étapes ayant marqué sont évolution et sa configuration actuelle. Selon Wikipédia, les étapes les plus influentes sont au nombre de trois :

 

La première étape correspond au courant de pensée issu de la révolution libérale années 1980 ( marquée économiquement par « le réganisme »aux états unis) ayant pour conséquence « une nouvelle façon de penser le politique » où l’intervention de l’Etat a été réduite au minimum balayant la notion de l’Etat-providence en donnant naissance à l’Etat libéral se déchargeant des fonctions non stratégiques au profit d’autres acteurs «  comme le faisaient les grands groupes industriels confrontés à la mondialisation ».

 

 

La seconde étape est celle des années 90 où la fonction de régulateur assumée par l’Etat fut l’objet d’une réflexion plus profonde. Il s’agissait pour l’Etat de raffermir la légitimité de sa dimension providentielle entamée par les procédés du New Public Management développés durant les années 80 d’une part et d’autre de recouvrer sa compétence à « formuler des politiques publiques en phase avec les besoins socio-économiques »

 

La situation actuelle est marquée par les interactions entre l’Etat, le corps politique et la société, où il est nécessaire de rendre l’action publique plus efficace et proche du bien public et de l’intérêt général.

 

L’objectif essentiel de la gouvernance, abstraction faite des qualificatifs qu’on lui attribue et qui s’apparente beaucoup plus aux résultats d’audits ou d’évaluation, qu’au concept lui-même dans sa portée absolue et objective, est désormais de rendre les sociétés gouvernable d’une manière souple et harmonieuse en assignation avec la  nouvelle notion  du «   développement durable » qui a fait son apparition à la suite  su Sommet de la Terre en 1992 et a mis l’accent sur l’urgence du besoin d’un développement plus soutenable.

 

Pour l’Institut de Recherche des Nations Unies pour le Développement Social, la gouvernance est « l’effort de dégager un consensus ou obtenir le consentement ou l’assentiment nécessaires à l’exécution d’un programme dans une enceinte où de nombreux intérêts divergents entrent en jeu »

. Par ailleurs, BASLE estime que d’une manière générale, la gouvernance est le produit du poids de l’opinion publique et des médias générant un contexte ou la gouvernance est perçu comme un terme qui du sens pour « décrire une interaction complexe des actions privées et des actions des gouvernements et une structure socio-politique qui émerge comme le résultat commun des efforts d’intervention interactifs de l’ensemble des acteurs impliqués. 

 

La gouvernance est un mode de gestion des affaires publique où l’Etat n’est plus le maître absolu puisqu’il ballote entre la nécessité d’imposer ses propres décisions et l’obligation de subir les décisions de ses partenaires dans l’enjeu du processus décisionnel.

 

Cette situation aggrave l’opacité qui caractérise la gestion de la chose publique. En effet, l’Etat, n’étant plus seul à décider pour la collectivité, est souvent réticent face à la transparence que requièrent ses actions stratégiques. Il n’est nullement enclin à dévoiler au grand jour ses propres règles de jeu pour ne pas être en position faible à chaque action d’évaluation de ses bilans.

 

Il est actuellement admis que la gouvernance, en tant que mode ou précédé normatif est sans objet si elle n’est pas suivie d’un ensemble d’actions d’évaluation et d’audit abstraction faite de la définition qu’on lui confère : objectif stratégique ou mode de gestion.

 

2.  C’EST QUOI AU JUSTE LA GOUVERNANCE ?

 

 

La perception du néologisme « gouvernance » est rattachée intimement au contexte où il est construit ainsi qu’aux motivations divergentes De ceux qui s’y intéressent quels soient des États, des groupements d’états ou d’instances supranationales.

 

2.1 LA GOUVERNANCE VUE PAR LE FONDS MONETAIRE INTERNATIONAL

 

 

Selon le FMI,  la gouvernance est une notion vaste qui couvre tous les aspects de la gestion des affaires publiques,  politique économique et cadre réglementaire compris.

 

Cette notion n’exclut pas la corruption qui a, contrairement à la gouvernance, une définition plus restreinte, celle de l’abus de l’autorité ou de la confiance publique dans un souci de gain personnel.

 

Les deux concepts, gouvernance et corruption,  sont étroitement liés, la corruption nourrit bien la mauvaise gouvernance en dénaturant les bonnes pratique de la bonne gouvernance, et par conséquence, la mauvaise gouvernance incite à plus de corruption et d’abus de pouvoirs par les dirigeants qui n’arrivent plus à tracer des limites claires entre l’intérêt public et l’intérêt personnel.

 

 

C’est sur la base de la motivation essentielle de limiter les dégâts de la corruption que le FMI s’emploie avec ses pays membres à promouvoir la bonne gouvernance et à combattre les mauvaises pratiques économiques et managériales.

 

Dans le cadre de ses activités de surveillance, de prêt et d’assistance technique, le FMI traite des questions de gouvernance économique qui relèvent de son mandat et de sa sphère de compétence, et met l’accent sur celles qui peuvent avoir un fort retentissement sur les résultats macroéconomiques.

 

Les activités de surveillance du FMI consistent à procéder chaque année à un réexamen des politiques économiques menées par les pays membres, en vue de formuler des « avis » de politique générale, allant parfois jusqu’à se substituer aux pouvoirs publics desdits pays en matière de choix stratégiques en matière de développement socio-économique sous forme de programmes de restructurations agressives comme conditions incontournables pour l’octroi de dettes.  

 

En effet, le FMI intègre la condition de « bonne gouvernance » telle qu’il la définit, dans le cadre de ses concours financiers.

 

Lorsqu’un pays sollicite l’aide financière du FMI, les autorités décrivent la politique économique nationale dans une lettre d’intention. Si cela se justifie, il est possible d’ajouter des mesures spécifiques d’amélioration de la gouvernance qui feront ainsi partie de la conditionnalité des programmes appuyés par le FMI.

 

Dans la pratique, près de la moitié des conditions structurelles incluses dans les programmes soutenus par le FMI portent sur des mesures « d’amélioration de la gouvernance. Il s’agit notamment du :

 

  • Renforcement du contrôle des dépenses budgétaires,
  • De la publication des comptes vérifiés des organismes publics et des entreprises publiques,
  • De la rationalisation et l’intégrité de l’administration des recettes,
  • De l’amélioration de la transparence des flux de revenus issus des ressources naturelles,
  • Et enfin de la publication des comptes vérifiés de la banque centrale, et l’application plus stricte du contrôle bancaire.

 

Dans tous ces domaines, le FMI apporte aussi une « assistance technique » qui contribue à « la bonne gouvernance ».

 

Par ailleurs, le FMI aide les pays à renforcer leurs capacités de lutte contre la corruption en offrant des conseils sur le dispositif juridique approprié pour la combattre.

 

Le FMI incite les pays membres à améliorer la responsabilisation en donnant une plus grande transparence à la politique gouvernementale, conformément aux normes et codes reconnus au plan international qui couvrent l’administration publique, le secteur financier et les entreprises. S’agissant des politiques budgétaire, monétaire et financière, le FMI a élaboré des codes qui définissent des principes de transparence.

 

Arnaud Zacharie[1] estime que la « bonne gouvernance » s’ajoute comme condition limitant la marge de manœuvre des États en voie de développement face aux instances monétaires internationales. En effet, ces instances disposent de larges pouvoirs de décision de « pilotage unilatéral » . Ce pouvoir exorbitant du FMI était tant critiqué par Amartya Sen, (le prix Nobel d’économie 2001 et ancien vice président de la banque mondiale) qui précise que « le FMI prétend qu’il ne dicte jamais un accord de prêt, qu’il en négocie toujours les termes avec le pays emprunteur, mais c’est des négociations unilatérales : il a toutes les cartes en main, pour la raison essentielle que beaucoup de pays qui sollicitent son aide ont désespérément besoin d’argent »[2]

 

L’ajout de la « bonne gouvernance » , concept souffrant du manque d’une définition claire et universelle, même si les ingrédients nécessaires à cet effet sont présents dans le droit internationale positif,   comme condition de financement, risque d’altérer l’efficacité des financements du FMI tout en remettant en cause les objectifs de mise sur pied des États de droit démocratiques et l’anéantissement du dynamisme attendu des sociétés civiles.

 

 

2.2  LA GOUVERNANCE VUE PAR LE PNUD

 

 

Selon le Programme des Nations Unies pour le Développement la « Bonne » gouvernance « est, entre autres, participative, transparente et responsable. Elle est également efficace et équitable, et favorise l’Etat de droit. La bonne gouvernance s’assure que les priorités politiques, sociales et économiques sont basées sur un large consensus au sein de la société et que les voix des plus pauvres et des plus vulnérables ont entendues dans la prise de décisions sur l’affectation des ressources pour le développement. »[3]

 

Il faut signaler par ailleurs qu’au-delà de cette conception de la bonne gouvernance, le PNUD souligne explicitement sa position vis-à-vis de la qualité de la gouvernance et mettant l’accent sur le fait que « la bonne gouvernance peut tout simplement signifier l’application de gestions efficaces ( le PNUD croit ) avec Amartya SEN que la gouvernance dont il est question ….est une gouvernance démocratique et participative »[4]

 

C’est ainsi que la conception du PNUD renvoie automatiquement à trois systèmes indissociables pour garantir et justifier le qualificatif « bonne » collé partout au concept de gouvernance :

 

  • Le système politico-administratif,
  • Le système économique,
  • La société civile.

 

Les trois systèmes étant les éléments d’un système global de gouvernance, doivent impérativement être cohérents et synergiques tant au niveau des réformes qu’au degré de leur implication dans le chantier de modernisation et démocratisation des Etats.

 

La conception du PNUD va à l’encontre de celle développée  par les instituts de Bretton Woods qualifiée de technico-gestionnaire basée exclusivement  sur la performance de la gestion économique et financière ayant pour unique indicateur la capacité des Etats à rembourser leur dette.

 

 

2.3. LA GOUVERNANCE VUE PAR LA BANQUE MONDIALE

 

La Banque Mondiale dans son approche conceptuelle de la gouvernance est partie d’un constat négatif marquant la gestion économique et financière des États en voie de développement. En effet, la BM en 1989 avait remarqué que  l’absence d’obligation de rendre des comptes, de transparence et d’administration efficiente combinée à la corruption en lien avec les dépenses publique constitue une entrave sérieuse au développement et met sur le piédestal de la notion de « souveraineté de l’Etat » une mauvaise gouvernance caractérisée.

 

Ce n’est qu’en 1992 que la Banque Mondiale a donné sa définition de la « bonne gouvernance » qu’elle considère comme étant « la manière dont le pouvoir est exercé dans la gestion des ressources économiques et sociales d’un pays pour le développement »[5].

 

Il est notable que pour la Banque Mondiale, le volet économique et financier est prédominant dans sa conception de la « bonne gouvernance » qui anime d’ailleurs son processus décisionnel d’octroi de prêts.

 

Il faut noter de même que la position de la Banque mondiale, à travers ses institutions spécialisées et ses programmes, témoigne d’une tendance à conférer à la gouvernance un aspect multidisciplinaire qui tient compte de quatre dimensions essentielles, à savoir :[6]

 

    La dimension économique qui demeure prépondérante avec un taux de 36,8% des préoccupations de la BM,

    La dimension administrative avec 26 %

    La dimension sociale également avec 26 %, centrée essentiellement sur des indicateurs tels l’environnement, l’égalité des sexes ou encore la protection sociale,

    La dimension politique des Etats est reléguée au dernier rang avec seulement un taux symbolique de 10%

 

La Banque Mondiale énonce, à l’appui de ces dimensions, quatre conditions à l’établissement de la bonne gouvernance :

 

  L’instauration d’un Etat de droit qui garantisse la sécurité des citoyens et le respect des lois (indépendance des magistrats),

  La bonne administration qui exige une gestion correcte et équitable des dépenses publiques,

  La responsabilité et l’imputabilité (accountability) qui imposent que les dirigeants rendent compte de leurs actions devant la population,

  La transparence qui permet à chaque citoyen de disposer et d’accéder à l’information,

 

 

 Pour la Banque Mondiale, l’Etat de droit se traduit dans les faits par “ un système de règles qui soient réellement appliquées et d’institutions qui fonctionnent vraiment et assurent une application appropriée de ces règles ”.

 

Cette approche de « l’Etat de droit » fait appel à la moralisation de la vie publique en général. Elle concerne aussi bien les dirigeants politiques qui doivent être responsables de leurs actes devant les citoyens en bannissant toute forme de dérapage, de fraude ou de détournement de procédures légales pour des fins personnelles illicites, que  les citoyens qui doivent être respectueux des lois et dénoncer tout acte illégal qu’on leur fait subir pour pouvoir jouir de leurs droits légaux.

 

C’est d’ailleurs le moyen efficace pour faire émerger une opinion publique positive à même de construire une société civile active et productrice de valeurs ajoutées morale et socio-économiques.

 

La bonne administration publique suppose également plus d’efficacité que de morale devant servir de support solide à la bonne gouvernance.

 

Au de-là de la noblesse affichée du concept de la bonne gouvernance développé par la B.M, il n’en reste pas moins qu’il est conçu comme un ensemble de conditions qui déterminent l’octroi des prêts, impliquant plusieurs types de réformes dont l’objectif essentiel est de rendre aisée l’application et la réussite des programmes macro-économiques.[7]

 

Les programmes de réformes qui ont été financés ces dernières années par la Banque Mondiale sous la rubrique “ bonne  gouvernance ” ont trait à l’amélioration de la gestion du secteur public (réforme de la fonction publique), au perfectionnement des méthodes de comptabilité et de vérification des comptes, à la décentralisation de certains services publics, à la privatisation d’entreprises publiques, à la mise en place d’infrastructures juridiques et judiciaires compatibles avec l’entreprise privée.[8]

 

Le but affiché par la Banque Mondiale est de limiter les prérogatives de l’Etat et de renforcer les acteurs de la société civile.

 

Les prérogatives de l’Etat consistent en réalité en l’obligation pour lui d’assurer le fonctionnement efficace du marché, de protéger la propriété privée et de sécuriser les investissements, tout en subissant des mesures correctives lorsqu’il est défaillant. L’Etat est également le seul à fournir des services publics tels que l’éducation, la santé et les infrastructures essentielles.

 

En fait, la B.M, à l’instar des autres  organismes  internationaux bailleurs de fonds ou distributeurs d’aides financières, a eu tendance, dans ses discours, à mettre en situation d’émulation l’Etat et la société civile en partant du postulat dictant que la limitation des prérogatives  de l’Etat est de nature à faire émerger une société civile, capable de prendre part à la réforme d’institutions politiques souvent immuables .

 

La privatisation et la décentralisation au lieu d’être qualifiées de dessaisissement volontaire ou forcé de l’Etat d’une partie de ses prérogatives et de son patrimoine, ont été incidemment présentées comme promoteurs de l’esprit d’initiative des populations, gage de leur autonomie et moyen efficace de leur participation au développement de leur pays.

 

C’est ainsi que toutes les réformes institutionnelles recommandées au nom de la bonne gouvernance ont donc été associées de manière abusive et déplacée à la défense de la démocratie.

Par ailleurs , les prêts accordés par la B.M font l’objet d’accords et de contrats avec les gouvernements demandeurs de fonds, sont soumis  à conditions non financières et encore moins économiques, pour ne pas dire de portée essentiellement sociopolitiques, (réformes institutionnelles)  dictées par la Banque qui se soucie peu , outre mesure , de la légitimité  de ces gouvernements et de leur action publique, en d’autres termes, du le contrat qui unit le gouvernement à son peuple.

 

Annick Osmont [9] précise d’ailleurs dans le même sillage d’idées qu: “ il y a bien un contrat Banque/Gouvernement, mais celui-ci est établi de manière extra-territoriale, entre un gouvernement agissant dans le meilleur des cas de manière technocratique, et un organisme multilatéral agissant au nom d’une logique de développement exogène”.

 

2.4. LA GOUVERNANCE DU POINT DE VUE DE L’OCDE

 

 

Les principes de bonnes gouvernance élaborés par l’OCDE et publiés pour la première fois en 1999, revêtent le caractère de référence internationale en matière de gouvernance dédiée exclusivement à l’entreprise et aisément transposables aux institutions étatiques :

 

 

CAS DES ENTREPRISES

CAS DES ORGANISMES PUBLICS

MISSIONS ET PREROGATIVES

ASSEMBLEES GENERALES

LES ELUS REPRESENTANTS DES CITOYENS

DECISIONS STRATEGIQUES ET PREROGATIVES DU CONTROLE ET DE CONCEPTION DES PROCEDURES

CONSEILS D’ADMINISTRATIONS

 

LES GOUVERNANTS

CHOISIS PAR LES ELUS

APPLICATION DES PROGRAMMES STRATEGIQUES EMANANT DU VOTE DES PROPRIETAIRES DES CAPITAUX

LE STAFF DIRIGEANT

LES ADMINISTRATIONS

EXECUTION DES PLANS D’ACTIONS DES GOUVERNEMENTS /CONSEILS D’ADMINISTRATION

LES ORGANES D’AUDIT

IGF/IGM/CONTROLEURS FINANCIERS

AUDITEURS INTERNES

COUR DES COMPTES

DROIT DE REGARD LARGE SUR TOUS LES ASPECTS DE GESTION

INDEPENDANCE ET OBLIGATION DE RESERVE ET D’OBJECTIVITE

 

 

 

Ces principes étaient, et le sont encore, inspirateurs de nombreuses réformes de la part des gouvernements comme du secteur privé.

 

A noter par ailleurs que ces principes sont également évolutifs et non figés et ce dans le but de s’adapter aux nouvelles situations apparues sur le plan international depuis 1999, c’est ainsi qu’ils ont été révisés en 2003 sur la base de plusieurs et larges consultations ayant abouti à l’adoption en 2004 d’une nouvelle version améliorée des principes de gouvernance d’entreprise.

 

Cette nouvelle version tente d’apporter des réponses concluantes aux exigences suivantes :

 

  Teneur des principes et leurs objectifs,

  Renforcement du rôle des actionnaires,

  Procédures et mode de traitement des conflits d’intérêt,

  Procédures efficace de la surveillance de la société par le conseil d’administration,

  Utilisation par les pouvoirs publics des Principes,

 

Le champ d’application des principes de l’OCDE s’articule autour des six grands axes de la gouvernance de l’entreprise :

 

1.  le régime de gouvernance,

2.  les droits de l’actionnariat,

3.  le traitement équitable des actionnaires,

4.  la définition des attributions et rôles des acteurs du processus de gouvernance,

5.  la transparence et l’accès à l’information,

6.  les responsabilités des membres des conseils d’administration.

 

 Il convient de souligner que la réussite de l’approche de l’OCDE en matière de gouvernance est d’être bâtie sur des principes et non des directives. Ces principes fixent les contours des champs d’intervention, les normes des obligations et droits des acteurs impliqués dans la gestion et l’orientation stratégique de l’entreprise tout en offrant une large possibilité de leur adaptation spécifique à chaque cas dans un contexte déterminé.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DEUXIEME PARTIE :

NOTION DE BONNE GOUVRNANCE

CAS DES MARCHES PUBLICS

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE 1

DIMENSION FRAUDULEUSE DES MARCHES

PUBLIC

 

 

La fonction achat, d’essence noble par le désintéressement, l’altruisme et l’objectivité qu’elle requiert, a perdu son éclat. Elle est pratiquement placée moralement au même niveau d’une prostitution immorale par le recours systématique et prédéterminé aux pratiques illégales en usant du copinage et de la corruption, du trafic d’influence et du délit d’initié, voire même du faux et de l’usage du faux comme procédés de satisfaction de l’intérêt personnel ou sectaire au détriment de l’intérêt général.

 

la déchéance de la fonction a fait de sa moralisation le slogan le plus attrayant   des campagnes électorales, de nomination de Conseils extra gouvernementaux de surveillance sauvegarde des fons publics, lutte contre la corruption, respect de la concurrence et j’en passe) et de réformes ambitieuses, d’inspiration extrinsèques et souvent inapplicables mêmes agrémentés de discours et de préambules emphatiques.

 

Des dizaines de principes, de concepts, de notions et de constats ont été élaborés dans l’espoir éphémère d’éradiquer le fléau des pratiques frauduleuses en matière d’achat public :

 

    La transparence,

    L’égalité d’accès aux commandes publiques,

    L’efficacité de la dépense publique,

    La bonne gouvernance,

    La moralisation de la vie publique,

    Le renforcement et la multiplicité des contrôles à priori et posteriori,

    Les déclarions des biens par les responsables.

    Et tant d’autres…

Il s’agit là de certains principes et actions dont les thèmes gravitent autour de la fonction achat sans jamais l’atteindre au fond pour la guérir des ses maladies qui la rongent et servent à certains dirigeants gestionnaires des emplettes publiques d’amasser des fortunes illégitimes.

 

L’achat public est donc le champ fertile où poussent les malversations, les détournements de fonds, l’abus du pouvoir, le trafic d’influence, les délits d’initiés, le favoritisme, la corruption actives et passives.

 

Il faut noter que tout haro sur la fonction achat n’est pas l’apanage d’un Etat en particulier, il s’agit d’un phénomène universel dont les racines remontent plus loin dans l’histoire de l’humanité.

 

Les détournements des biens collectifs sont à l’origine de la naissance des classes aristocrates et bourgeoises à travers l’histoire. Plus récemment, il sont  à l’origine , en grande partie, de l’émergence d’une classe moyenne constituée essentiellement  de cadres bien instruits et pliés à une échelle de valeurs schizophrènes vacillant entre les discours moralistes et les pratiques délictueuses, adoptant un  train de vie huppé  sans corrélation avec les possibilités offertes par leurs modestes salaires..

 

La présente partie se propose donc de donner un aperçu sur les pratiques malsaines de la fonction achat ainsi que les techniques frauduleuses usitées par les décideurs publics pour aller ensuite vers les réelles possibilités d’élaborer des bonnes pratiques devant s’inscrire dans le registre général de la bonne gouvernance.

 

Le nombre des « affaires» de détournements de fonds d'origine publique au profit des intérêts privés d'individus, de groupes ou d'organisations, qui sont révélées par les médias ne cesse d'augmenter.

 

Les rapports des cours des comptes en démontrent l’ampleur ainsi que auteurs de fraudes insoupçonnés par le public eu égard leur moralité affichée et les salaires exorbitants qu’ils perçoivent sans prendre en considération d’autres avantages en nature au frais de la princesse comme dit l’adage.

 

Même certains organismes internationaux n’arrivent plus à demeurer indifférents face à ces dérapages dont ils analysent les causes et les effets et formulent d’éloquentes recommandations dont certains états ne retiennent que les croûtes en jetant l’essentiel aux poubelles politiques.

 

Parmi les procédés utilisés pour procéder au transfert illicite de l'argent des contribuables vers certains comptes privés, les « prélèvements » opérés sur les marchés « publics » semblent être particulièrement nombreux.

 

Si ce constat est exact, ce dont nous n'avons a priori aucune raison de douter, mais n'est prouvé par aucun document statistique, à moins de puiser dans les archives des cours des juridictions financières en ce qui concerne les flagrants délits, c'est que, vraisemblablement, les procédés utilisables sont connus et ont une efficacité certaine dépassant de loin celles de gestion et de contrôle des marchés publics.

 

Depuis quelques années, en effet, des facteurs, apparemment indépendants, sont venus faciliter les manœuvres frauduleuses d'individus peu scrupuleux prêts, pour conserver leur pouvoir ou pour s'enrichir rapidement, à renier des principes qui prévalaient encore il y a une trentaine d'années dans l'ensemble de la classe politique. Parmi tous ces facteurs, on retiendra, notamment :

 

 

1.1 DES RÉGLEMENTATIONS de plus en plus complexe, ...

 

Les marchés sont soumis à la réglementation nationale (qui se présente souvent sous la forme d’un « Code » ou d’une loi et de ses textes d’application) qui est, en modification perpétuelle pour tenir compte de l'évolution du droit de la concurrence, des contraintes économiques et des mœurs rhabillés au gré des circonstances.

 

A cette réglementation nationale s'ajoute celles extra-nationales notamment sous forme de recommandation ou de directives relatives aux marchés de travaux, de fournitures et de services ainsi que celles relative aux modes de passation des marchés.

 

A ces règles se superposent celles qui découlent de la signature d'accords internationaux : accords de Marrakech sur les marchés publics (AMP), Organisation Mondiale du Commerce (OMC), notamment, ainsi que de multiples accords internationaux ou bilatéraux concernant la lutte contre la corruption qui biaise tous les principes supposés être le cadre référentiel des achats publics.

 

Si l’on prend les cas du Maroc et de la France, on a droit à constater que le cadre réglementaire n’arrête pas d’être remis en question. le motif souvent invoqué pour justifier cette instabilité réglementaire est la moralisation et la rationalisation des dépenses publique par l’instauration des dispositions sélectives d’audit interne ainsi que le bannissement du vote pour les commissions d’appel d’offres au profit de l’unanimité comme garantie du bon dépouillement des offres et d’attribution des marchés.

 

En effet, au Maroc seuls les marchés dépassant le seuil de 5 millions de dirhams sont obligatoirement audités (à noter que l’audit dans ce cas se limite au respect formel et apparent des procédures sans jamais atteindre le fond ou l’opportunité des achats), la première réaction des acheteurs publics véreux se matérialise par des fractionnements et des allotissements des projets pour détourner la procédure. Les textes régissant les marchés de l’Etat, des collectivités locales et des entreprises publiques ne fixent aucune règle lisible fixant les conditions et les modalités d’allotissement et s’abstiennent délibérément à ne donner aucune définition du fractionnement.

 

Poussant plus loin la confusion destinée à contrecarrer toute tentative d’appréciation des modes de passation des marchés, les textes en France comme au Maroc font du choix des procédures par les maîtres d’ouvrages une option tributaire de la définition du besoin à satisfaire dont l’exactitude imposée comme condition préalable à tout acte d’achat n’est qu’une métaphore illusoire.      

 

En définitive, cette cascade de reformes ou de refontes des textes régissant l’achat public ouvre la voie à des techniques de fraudes plus performantes que les textes censées les abolir.

 

Il est même légitime de supposer qu’en associant les acheteurs véreux à ces réformes, d’autres réformes parallèles ayant pour but le perfectionnement des techniques de fraudes sont finalisées dans l’ombre !

 

 

1.2/ Des entreprises VICTIMES DES CRISES économiques...

 

La crise économique est un facteur déterminant dans la fragilisation des entreprises et, au lieu d’être à l’origine de véritables réformes curatives, génère le plus souvent des effets encore plus négatifs sur la gouvernance par l’excitation endémique des appétits malsains des dirigeants véreux.

 

L’OCDE estime que les entreprises les plus exposées aux affres de la crise, et par voie de conséquence aux agressions des dirigeants des organismes publics clients, sont celles qui ont été fragilisées par des marchés assez consistants en volume de travaux et aux délais d’exécution très longs d’autre part, et per des délais de paiement peu orthodoxes d’autre part.

 

Ces entreprises, en quête de fonds de roulements, misent essentiellement sur les petits marchés et bons de commandes dont les délais d’exécution et de paiement sont relativement courts.  Pour les décrocher, elles n’hésitent pas à graisser les pattes des acheteurs publics véreux, d’autant plus que certains pots de vin leur coûtent moins que les agios des banques.

 

Le phénomène est plus large qu’on puisse le penser. En effet, la décentralisation, toutes formes confondues et la déconcentration multiplient les centres de décision et rapprochent davantage les décideurs des entrepreneurs.

 

C’est ainsi que  les élus , et même les grands décideurs des pouvoirs centraux , ont vu leur prérogatives s’accroitre , et plus encore pour ceux qui cumulent les mandats à tel point qu’ils ne trouvent aucune gêne à s’approprier des pouvoirs exorbitants puisqu'ils peuvent, tout à la fois, arrêter les programmes  d'investissement, d’intervenir directement dans le processus d’attribution des marchés publics et de peser sur les procédures d’exécution, de liquidation et de paiement .

 

Enfin, le contrôle d’accompagnement accordé comme privilège à certaines entreprises publiques et érigés en règles modernes de gestion font que le véritable contrôle ne s’opère qu’à posteriori et porte moins sur l’opportunité de la dépense que sur le respect formel des procédures.

 

Par ailleurs, l’étendue des pouvoirs légalement conférés à certains dirigeants leur permettent de créer, à leur profit, un clientélisme auquel nombre d'entreprises en situation difficile sont tout à fait favorables tant qu'elles peuvent en bénéficier. Les soucis de renouvellement des mandats de certains élus soit dans es collectivités locales ou au sein des organes délibérants des entreprises et leur maintien au pouvoir exigent des moyens de plus en plus important. C’est ainsi que les tentations augmentent générant des dérapages.

 

En ce qui concerne les agents de l'État, ils ont été longtemps relativement épargnés par ces tentations, car « servir l'Etat » était avant tout considéré comme une vocation qui avait pour corollaire une parfaite intégrité des fonctionnaires. Cette vocation entamée par plusieurs facteurs subjectifs et sous l’aggravation des disparités sociales commence à s’effriter.

 

Ce sont, sans doute, des exemples venus de haut qui ont fini par convaincre un certain nombre d'autres agents publics d'utiliser leurs prérogatives pour, eux aussi, « améliorer leur ordinaire ».

 

Pour pessimiste est cependant loin d’être l’apanage des pays en voie de développement ou croulant sous des régimes totalitaires et anti-démocratiques.

 

Les discussions qui se déroulent dans les instances internationales montrent que le phénomène universel est à l’origine de la mondialisation du concept de la bonne gouvernance

 

Les infractions caractérisant la gestion des marchés publics peuvent être classées en deux catégories, la première s’apparent à des erreurs involontaires causant des préjudices financiers aux organismes publics souvent irréparables, alors que les infractions de la deuxième catégorie émanent d’une volonté délibérée de transgresser les règles afin d’en tirer profit tout en prenant le soin d’en dissimuler les procédés.

 

Les anomalies et les erreurs, considérés comme infractions involontaires, sont, généralement, dues au manque de formation des intervenants : acheteurs, comptables, vérificateurs... et l’on peut y remédier par la formation des personnels concernés. Quant aux infractions volontaires, elles automatiquement l’objet de poursuites judiciaires entrainant des sanctions pécuniaires et privatives de liberté.

 

Les rapports de la comptes au Maroc ont démystifié la gestion des marchés publics en mettant à nu chaque année un nombre considérable de cas d’infraction allant de la simple erreur fortuite aux infractions dépassant dans leur gravité le champ soigneusement délimité pour la discipline budgétaires par le code des juridictions financières.

 

Les infractions, grâce à des méthodes modernes et efficaces d’investigations et de recoupement des informations, sont présentes à chaque niveau du processus de l’achat public depuis la conception initial du projet jusqu’à sa réception définitive et la liquidation des marchés y afférents.

 

En se référant aux constats des experts de l’OCDE, nous allons donner un aperçu succinct sur les mécanismes utilisées par les acteurs de l’achat publics pour frauder :

 

 Les méthodes utilisées pour permettre, aux divers stades de la procédure, de maquiller l'image d'une opération de manière à ce qu'elle présente, aux yeux des observateurs ou des contrôleurs, une régularité apparente ;

 

 Les techniques qui permettent de détourner des fonds initialement affectés à l'opération, la façon dont ces fonds sont utilisés (qu'il y ait ou non enrichissement personnel), les réseaux qui permettent d'organiser de telles opérations ;

 

 Les moyens que l’on peut utiliser pour découvrir les phénomènes de fraude ou de corruption ;

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE 2

 Techniques de détournements dans les entreprises

 

 

2.1. Le faux

 

 

L’usage du faux, notamment en matière de devis et de factures varie suivant qu’il émane de l’entreprise ou de l’organisme public acheteur

 

A titre d’exemple, la réglementation marocaine exige trois devis contradictoires pour la passation d’un bon de commande d’une valeur maximum de 200.000 DHS. Or l’absence de tout formalisme susceptible de mettre en œuvre le contrôle interne, fait que  certains décideurs abusent de cette prétendue souplesse en maquillant le jeu de la concurrence par  des devis ou d’offres financières fictives  permettant ainsi d’attribuer illégalement  des commandes à des prix onéreux  à des prestataire sous condition de reverser une part de la plus value à l’acheteur non pas en guise de corruption, mais en détournement de fonds publics pur et simple.

 

Pour l’entreprise qui se trouve dans l’obligation fiscale de justifier ses encaissements ainsi que leur emploi fait  recours au même procédé d’usage de faux pour gonfler leurs charges et diminuer du coup leurs bénéfices et ce par  « l’achat » de factures fictives auprès de vendeurs représentant d’ entreprises liquidées judiciairement ou simplement inexistantes.

 

a. La facturation comme support comptable du faux [10]

 

La facture est une pièce comptable par laquelle le vendeur ou le prestataire de services fait connaître à l'acheteur le détail des prix des marchandises qu'il lui vend, des travaux qu'il réalise ou des prestations qu'il effectue.

 

Matériellement, il s'agit d'un document qui vient à l'appui de l'inscription d'une charge dans la comptabilité d'une entité industrielle ou commerciale et justifie ce qui en est le corollaire, une sortie de fonds. Ce document peut être réel et justifié (« vraies » factures), complètement fictif (lorsqu'il n'existe aucune contrepartie au versement de fonds) ou partiellement faux (on dit alors qu'il y a surfacturation ou, dans certains cas, sous facturation).

 

Falsifier une facture revient donc à présenter comme réel et parfaitement justifié, un document qui ne l'est, au mieux, que partiellement. Cela permet de l'intégrer dans les systèmes comptables du client et du fournisseur comme la conséquence d'une prestation réelle et avec toutes les caractéristiques d'une cohérence formelle entre ces deux comptabilités.

 

 

La fait de ne voir en la facture qu’un simple document comptable facilitant le décaissement des fonds publics incite certains acheteurs à en faire usage croyant être malins et à l’abri de toute sanction ultérieure, notamment si la facturation porte sur des fournitures fongibles ou des prestations dont la matérialité est quasi éphémère d'encaisser illégalement les sommes convenues en respectant un formalisme de façade. Le contrôle conjoint du compte client (chez celui qui reçoit la pièce) et du compte fournisseur (chez celui qui émet la pièce falsifiée) sur la même facture ne permet pas de déceler aucune irrégularité dans les écritures comptables car, sauf maladresse, il s'agit du même document.

 

La surfacturation ou la fausse facturation peuvent prendre des formes diverses qui font appel aux techniques utilisées dans les secteurs d'activité économique concernés. Pour les déceler, il faut donc, à la fois, un bon technicien de la comptabilité et un bon professionnel en matière d’inspection de la matérialité des dépenses et de la logique qui préside. On trouvera ci-après quelques exemples d'application de cette technique.

 

b. techniques du faux en matière de facturation :

 

Dans le secteur des ventes on peut, par exemple, utiliser les procédés suivants :

 

1)  Majoration du nombre de pièces vendues ou prestations fictives :

 

La facture peut porter sur un nombre de pièces supérieur au nombre livré. Les prix unitaires sont exacts. Il y a bien surfacturation mais, il est nécessaire de modifier les bons de livraison ou les inventaires pour conserver la cohérence de l'ensemble.

 

Comme il peut porter dans certains cas sur le rachat de pièces de rechange vendues par l’organisme public sous prétexte de leur obsolescence ou péremption. (Une cartouche d’encre pour imprimante peut être vendue par l’organisme en tant que récipient à 5dhs la pièce et rachetée par le même organisme auprès du fournisseur - acheteur de la pièce en tant que cartouche neuve à 600 dhs la pièce, soit un détournement de 595 Dhs par pièce).

 

2) Majoration du prix unitaire

 

Pour éviter d'avoir à modifier les stocks, il suffit de majorer le prix unitaire des articles facturés. Le volume de la surfacturation peut être plus important. La fraude sera découverte au travers d'un examen de la comptabilité analytique du « vendeur » qui est seul susceptible de faire ressortir le caractère exceptionnel des prix constatés par comparaison avec les ratios habituels.

 

3) Modification de la qualité des produits

 

Dans la mesure où il est possible, en utilisant des complicités, de remplacer, lors de la réalisation du contrat, certains produits par d'autres qui ont le même usage mais des performances moindres, donc un coût plus faible, on peut dégager une marge supplémentaire qui pourra être ristournée ultérieurement.

 

c. Application aux marchés d’études et de prestations intellectuelles

 

Dans le cas des études, du fait du caractère immatériel des prestations, il est encore plus simple de réaliser des fausses factures. En effet, le coût d'une étude est estimé en prenant en compte les critères suivants :

 

ü travaux effectués par les salariés de la société, exprimés en heures/homme,

ü travaux sous-traités à un tiers,

ü temps machine,

ü autres frais (déplacements, reprographie, reliure, ...).

 

La fraude est possible dans ce domaine en ayant recours à divers procédés :

 

ü Facturation d’un consultant senior alors que le travail est exécuté soit par des stagiaires ou tout simplement les agents même de l’organisme bénéficiaire des prestations,

ü Majoration du temps investi dans le travail au coût le plus élevé ( heures ou jour /senior ou expert)

ü Fausses études consistant en la simple adaptation des études auparavant réalisées pour le compte d’autres organismes similaires,

ü Orientation des critères d’évaluation des études en vue de justifier l’opportunité de la dépense y afférente,

 

Ces pratiques facilitent le détournement des fonds publics sans grand risque, elles ne peuvent être décelées que par leur caractère répétitif pour des missions analogues exécutées au cours d’exercices budgétaires différents. 

 

 

 

 

2.2. Les commissions « habillées[11] »

 

Le terme générique de commission recouvre plusieurs formules.

 

Les commissions dites « habillées » sont versées en contrepartie d'un travail réel effectué par un individu ou une entreprise.

 

Une commission« habillée » se présente, en comptabilité, sous la forme d'une prestation parfaitement réelle et justifiées dans le respect des normes comptables en vigueur.

 

Il existera donc un ensemble de pièces cohérentes et bien montées dont les éléments seront présentés lors d'un éventuel contrôle.

 

La société qui fournit la prestation possède des salariés et les moyens d'exercer cette activité. En outre, son savoir-faire dans ce domaine est réel. Comme elle surfacture ses prestations, elle doit, dans sa comptabilité, « compenser » le montant exagéré de ses produits par une augmentation de ses charges sous la forme de versement d'honoraires à un faux facturier (ce qui donne lieu à des retraits en espèces) ou par la comptabilisation de salaires versés à des personnes qui ne travaillent pas pour elle.

 

On se trouve en présence d'un montage parfaitement organisé qui peut s'appliquer à certains appels d'offres restreints où la Collectivité souhaite recevoir une rétribution préalable de la part des entreprises qui veulent participer à la consultation. Chacune des sociétés postulantes est alors tenue d'utiliser les services d'un bureau d'étude ami qui se charge de la « présentation » de son dossier de candidature. Seules les entreprises dont les dossiers auront été ainsi présentés sont agréées par le décideur et inscrites sur la liste des entreprises admises à concourir sans qu'elles soient, pour autant, assurées d'obtenir le marché.

 

Le principal problème est que la même prestation (qui est à l'origine de la commission habillée) est rendue à un certain nombre des sociétés candidates dont chacune devient susceptible de remporter le marché. Ce système met toutes les entreprises postulantes sur le même plan et leur permet de se connaître, ce qui favorise les ententes. Ainsi, celles qui n'ont pas obtenu le marché pourront être associées à la sous-traitance ou bénéficier de contreparties.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 CHAPITRE 3

Les dérives préalables à la prise de décision

 

 

 3.1 CAS DES ETUDES

 

Certains responsables véreux ne sont pas à court de procédés illicites pour détourner les fonds publics en toute impunité bien avant même de conclure un marché, il s’agit en fait de détournement qu’on peut , d’une manière caricaturale , qualifier d’amuses gueules ou d’apéros avant le plat de résistance qu’est le marché proprement dit.

3.1.1I. CAS Des petites études

 

Dans cette catégorie, nous placerons toutes les études dont le montant ne dépasse pas le seuil fixé pour le bon de commande ou qui peuvent faire l’objet de contrat de droit commun non soumis aux dispositions réglementaires régissant les marchés publics.

 

Le décideur est généralement libre de traiter avec qui il veut, pratiquement sans justification. En effet, il suffit, le plus souvent, d’un simple bon ou d’un échange de correspondances dans le respect total des usages du commerce et des règles du DOC ou du Code du commerce pour conclure l’affaire sans problème.

 

Ces détournements sont confiés le plus souvent à l’un ou l’autre des bureaux d’études qui peuvent être typés comme suit :

 

ü Le bureau d'études attitré

 

Il peut contacter un bureau d'études ou un organisme « ami » pour lui demander d'effectuer ce travail.

 

 

ü Le bureau d’étude qui appartient au décideur

 

Le décideur peut également confier l'étude à un bureau qui lui appartient à travers son conjoint ou qui appartient à sa parentèle. Le transfert en est facilité d’autant.

 

 

3.1.2. Les études non remises

 

La fraude dans ce contexte consiste en l’octroi d’une étude préalable au lancement d’un marché à un bureau d’étude quasi fictif et ce moyennant l’octroi d’un acompte de 50% au moins du montant de l’étude. Après l’encaissement de l’acompte, le bureau d’étude disparait de manière à ce que toute action pour le recouvrement de l’avance soit légalement et judiciairement impossible.

 

 

3.2. Les études FAISANT L’objet d’appel PUBLIC A LA CONCURRENCE

 

Il s’agit dans ce cas de figure de détourner les procédures d’appel public à la concurrence, soit de modifier le résultat de la consultation.

 

3.2.1. Les détournements de procédure

 

En cas d’appel d’offres ouvert, pour être certain de travailler avec le bureau d’études   qui assumera le rôle de complice actif du détournement de fonds publics, le décideur  choisit, le plus souvent, l'offre « économiquement la plus avantageuse » comme critère pour l’attribution du marché en ayant pris soin de faire figurer, parmi les critères additionnels de son choix, des éléments subjectifs tels que la compétence personnelle des responsables de l'étude, la notoriété du concurrent, les réalisations précédentes et leurs montants, etc.

 

Ces éléments permettent facilement au décideur d’attribuer l'étude au concurrent qu'il juge le plus « compétent » et le plus apte à répondre à ses sollicitations.

 

Quand le prix fixé pour l'étude ne permet pas, par suite d'une forte concurrence, de dégager le bénéfice prévu, le décideur opte pour les avenants portant sur des études supplémentaires qu’il qualifie d’imprévues au moment du lancement de l’appel d’offres.

 

Les prix unitaires sont ceux du contrat initial mais, le nombre d’heures de travail est fixé arbitrairement. Ces avenants permettent de créer la marge supplémentaire qui sera ristournée au décideur ou à ses amis.

 

 

 

3.2.2. Les modifications du résultat de la consultation

 

Mais le décideur peut aussi lancer un appel d'offres régulier et choisir le bureau d'études le mieux disant pour le projet qu'il doit réaliser. Pour se faire payer par le titulaire du marché, il peut user de plusieurs procédés :

 

ü L’utilisation de la notification de l’approbation du marché et de l’ordre de service comme moyen de pression pour l’attribution effective du marché,

ü L’utilisation des ordres d’arrêt et de reprise des travaux comme moyens évitant au titulaire du marché d’être exposé à des mesures coercitives même si le retard est imputable à l’acheteur,

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE 4

 Les dérives préalables à la consultation

 

Outre les études destinées à bien comprendre les enjeux et les études préalables à sa prise de décision, le maître d’ouvrage doit, avant de lancer un marché, faire appel à ses propres services ou à des organismes spécialisés pour réaliser un certain nombre d'autres prestations.

 

Parmi celles-ci, on portera une attention toute particulière, d'une part, à l’estimation du coût du projet dont le principe de la réalisation a été retenu parce qu’elle permet ensuite de bien analyser les offres qui seront reçues et, d'autre part, à l'élaboration des documents administratifs et techniques qui serviront à lancer une consultation strictement conforme aux besoins et aux réglementations en vigueur. Mais, aussi louables que soient ces objectifs, ils peuvent être détournés de leur but par un décideur ou une entreprise malhonnête.

 

4.1. L'estimation précise du coût du projet

 

l’estimation du coût du besoin à satisfaire est une obligation que le décideur est tenu de respecter.  Elle sert à déterminer la forme du marché, la procédure à utiliser et le budget prévisionnel à engager. Elle sert également de support pour l’évaluation des offres des concurrents.

 

C’est en tenant compte de ces considération que le projet de décret relatif aux marchés publics au Maroc dispose que :[12]

 

« Le maître d'ouvrage est également tenu d'établir, avant tout appel à la concurrence ou toute négociation, une estimation des coûts des prestations à réaliser sur la base de la définition et de la consistance des prestations objet du marché et des prix pratiqués sur  le marché en tenant compte de toutes les considérations et sujétions concernant notamment les conditions et le délai d'exécution. Cette estimation est établie en fonction, le cas échéant, des modalités d'allotissement des prestations retenues par le maître d'ouvrage conformément aux dispositions de l'article 9 ci-dessous.

 

Ladite estimation, établie sur la base de l'estimation des différents prix contenus dans le bordereau des prix, est consignée sur un support écrit et signé par le maître d'ouvrage et doit rester confidentielle jusqu’à la séance d’ouverture des plis. »

 

Cependant, force est de constater que l’estimation peut servir comme moyen de fraude et de détournement de fonds publics :

 

4.1.1. L'estimation est surévaluée

 

En optant pour une estimation surévaluée, l’acheteur public peut réaliser un double objectif qui ne peut qu’être préjudiciable à l’organisme public, tout en donnant l’impression d’un gestionnaire dont la compétence est indiscutable :

 

ü Une estimation surévaluée va permettre l’élimination des offres, bien que correctes, présentent l’aspect d’être anormalement basse ce qui justifie les craintes de voir le marché subir de mauvaises conditions d’exécution et le risque de se voir imposer des matériaux de mauvaise qualité. Parallèlement à cette fausse apparence, le concurrent initié par l’acheteur va présenter une offre très proche de l’estimation et s’assurer de l’attribution du marché ; la plus value ainsi garantie, sera reversée à l’acheteur public non pas en tant que corruption, mais en détournement de fonds.

ü De l’autre coté, l’acheteur public verra sa renommée de bon gestionnaire consolidée du fait que le marché va être exécuté dans de bonnes conditions et sans recours aux avenants portant sur l’augmentation de la masse des prestations pour équilibrer les charges du titulaire du marché.

 

D'ailleurs, dans ce cas, il ne sera même pas suspecté d'avoir bénéficié ultérieurement de « faveurs » (ce qui est parfaitement réalisable par suite de la surévaluation) de la part des entreprises qui auront obtenu le contrat, puisque le marché sera passé pour un prix très voisin de l'estimation.

 

4.1.2. L'estimation est sous-évaluée

 

L’habillage courant de la sous évaluation de l’estimation d’un projet dont la réalisation doit passer par la conclusion d’un marché consiste le plus souvent en la maximisation des avantages attendus tout en minimisant le coût de l'investissement.

 

Outre les techniques de détournement de procédure, le maître d’ouvrage en adoptant cette démarche est quasiment certain d’obtenir le visa et l’approbation d’avenants portant sur des majorations de son enveloppe financière tout en justifiant sa défaillance de prévision et  gestion par des considérants aux connotations de force majeure.

 

Ainsi, il peut jouer en toute complicité avec l’entreprise choisie pour remporter le marché sur l’expression du besoin, la définition des spécifications techniques, le cautionnement provisoire, la nature des attestations de références et des moyens techniques, et enfin sur les conditions d’exécution du marché lui-même.

 

4.2. Élaboration des DOCUMENTS : détournements en « direct »

 

4.2.1        La préparation des spécificités du projet.

 

Après avoir donné une estimation précise du coût du projet, la principale intervention des éventuels prestataires de services concerne la mise en forme des « spécificités » du projet envisagé et l'élaboration des documents qui serviront à la consultation des entreprises : clauses administratives, clauses techniques, définition des prix, cadre du bordereau des prix et du détail estimatif, décompositions des prix globaux et forfaitaires, etc ...

 

C’est à travers les stipulations de ces documents dont la majorité aura le statut juridique de pièce contractuelle obligeante que l’acheteur peut maquiller des détournements de fond publics tout en respectant la façade réglementaire de la régularité.

 

 

Afin d’éviter d’impliquer des collègues des services techniques dans son projet de détournement , l’acheteur va demander l’assistance d’un bureau d’étude ou d’architecture qui va l’assister dans le montage technique et financier de la fraude sans avoir à se justifier ou à partager son butin. 

 

Ces acteurs externes vont lui préparer le document constitutifs du dossier de l’appel d’offres de telle manière à biaiser la concurrence en usant de techniques diverses et ne soulevant à priori aucun doute :

 

ü Intégration d’un équipement introuvable sur le marché suite à l’arrêt de sa fabrication en le présentant comme élément essentiel dans la configuration d’un système à fournir , installer et mettre en service en lot unique. Cette technique sera consolidée par le refus automatique de toute variante ou option tout en restreignant la définition technique de l’équipement en la limitant aux caractéristiques technique spécifique à une marque précise.

 

Le titulaire du marché aura par la suite toute latitude de signaler que l’équipement n’est plus fabriqué et sera autorisé à le remplacer par soit par équipement équivalent ou de procéder à la reconfiguration du système par avenant sans baisse de prix initial qui à été déjà surévalué, soit de le remplacer par un équipement de seconde main ou, au pire des cas, d’un équipement réformé intentionnellement pour être repris pour une nouvelle commande.

 

ü Choix d’un site d’installation inaccessible ou mal aménagé pendant la phase du lancement de l’appel d’offres pour le remplacer par un autre site offrant plus d’avantages en cours d’exécution,

 

ü Insertion de clauses de réception draconiennes ou formation excessivement onéreuses pour n’en exécuter par la suite que le strict minimum,

ü Insertion de clause d’installation pour les confier par la suite au personnel du maître d’ouvrage moyennant de modique rémunération au noir.

 

 

4.2.2. Explicitation des projets et des offres des candidats

 

 

Les descriptifs techniques des cahiers des charges, même si elles sont bien réalisées, peuvent parfois être difficiles à comprendre. Cette situation de confusion donne au maître d’ouvrage la possibilité de jouer sur la concurrence d’une part, et d’obtenir les crédits budgétaires qu’il souhaite d’autre part.

 

L’article 22 du projet de décret marocain de 2010 relatif aux marchés publics traite de la problématique de l’information des concurrents dans le cadre de la moralisation de la gestion des affaires publiques et la perspective de mettre sur pieds des bonnes pratiques de gouvernance.

 

En effet, ce texte prévoit que « tout concurrent peut demander au maître d'ouvrage de lui fournir des éclaircissements ou renseignements concernant l'appel d'offres ou les documents y afférents.

 

S’il s’agit là en toute évidence d’un droit reconnu légalement aux concurrents, son exercice demeure cependant très restreint puisque le texte impose comme condition de sa validité et son opposabilité au maître d’ouvrage l’obligation de formuler la demande par écrit et contre accusé ou preuve irréfutable de sa réception au moins sept (7) jours avant la date prévue pour la séance d'ouverture des plis.

 

 

Si le texte est pointilleux sur les délais de la demande de renseignement , il totalement laxiste ( seule obligation est de répondre à tout moment sans pour autant dépasser le délai de trois jours avant l’ouverture des plis, ce qui n’ a aucun sens pour le concurrent qui va trouver dans l’impossibilité matérielle de finaliser une offre techniquement complexe en une journée) en ce qui concerne les délais impartis au maître d’ouvrage pour répondre au concurrent. Cette situation ne fait, en définitive, de ce droit qu’un droit fictif ou simplement une disposition décorative dénuée de tout impact sur la transparence exigée au niveau de la procédure

 

4. 3. Détournements organisés " à terme"

 

Plusieurs études menées au niveau international soit dans le cadre thématique de la bonne gouvernance , soit en matière de lutte contre la corruption de l’abus de biens sociaux, ont démontré que le fruit attendu des actes frauduleux n’est forcément immédiat, il peut être également à terme ou revêtir même l’aspect d’une rente sure pendant le moyen terme . Des techniques assez subtiles et difficilement mises en cause sont le plus souvent élaborées depuis la rédaction des cahiers des charges :

 

 

4.3.1. Les ententes : organismes liés

 

Par organismes « liés » il faut entendre l’interdépendance qui puisse exister entre une entreprise de prestations intellectuelles et une entreprise de fournitures, travaux ou services.

 

Il arrive, parfois, que le maître d’ouvrage fait appel à une entreprise de prestations intellectuelles (architectes, bureau d’études ou d’ingénierie) pour lui confier la mission de préparer toutes les pièces du dossier de l’appel d’offres (spécifications, conditions d’admission, critères d’évaluation des offres, etc …).

 

Ce procédé peut émaner d’une obligation justifié par le manque d’effectifs assez compétents pour se charger de la mission en interne, ou bien d’une décision préméditée visant de pousser le plus loin de l’acheteur toute suspicion d’avoir orienté l’appel d’offres à l’avantage d’un concurrent au détriment des autres, et masquer ainsi une réalité de fraude intentionnelle .( c’est pratiquement le cas de l’assassin qui prépare son alibi avant de commettre le crime).

 

Devant une telle situation, le profit que peut tirer l’acheteur public de l’attribution du marché est variable :

 

ü Il se peut que l’acheteur ignore tout de la relation qui puisse exister entre les deux entreprises et dans ce cas il va se contenter du montant de corruption non négociée que le titulaire du marché va, de son propre gré, lui concéder afin de s’assurer du bon déroulement des phases administratives de son marché : engagement, nantissement, liquidation et ordonnancement. Le véritable profiteur de la situation est l’entreprise ayant préparé le dossier de l’appel d’offres et elle ne manquera pas de faire le geste envers l’acheteur qui lui a confié la mission.

ü L’autre cas de figure est que l’acheteur et l’entreprise soient de connivence pour orienter l’appel d’offres et de faire en sorte à ce qu’un concurrent lié à l’entreprise des prestations intellectuelles en soit le titulaire. Dans ce cas, la fraude va inévitablement déborder sur la simple fait de corruption pour devenir un détournement en bonne et due forme de fonds publics.

 

Jean-Pierre BUEB estime à ce sujet que, dans le cas où «  le décideur est informé des liens existants entre le prestataire de services et une ou plusieurs entreprises candidates et que, ayant cette information, il cherche à en tirer profit pour se faire verser une « commission ».

 

la collusion, qui devient alors particulièrement forte, est très difficile à prouver, sauf sur dénonciation d’un candidat évincé ou à l’occasion du contrôle, par un organisme de contrôle externe, des liens pouvant exister entre l’entreprise auteur du cahier des charges et celle qui, grâce à une offre particulièrement conforme aux attentes du décideur, s’est trouvée lauréate de la consultation et titulaire du contrat ».[13]

 

 

4.3.2. Les spécificités « hors normes »

 

Outre le cas des spécificités qui ne peuvent être satisfaites que par certaines entreprises et que l'on a évoqué plus haut, on trouve parfois, dans les cahiers des charges, des spécifications qui dépassent très largement les normes admises en la matière. Bien entendu, de nombreuses raisons peuvent justifier ces dépassements. La seule question que l'on peut, ou que l'on doit, alors se poser concerne l'exécution du projet: ces spécifications seront-elles réalisées lorsque le projet sera exécuté ? En effet, on rencontre des cas où les spécifications supérieures aux normes habituelles, imposées dans le cahier des charges, ne sont pas réalisées lors de l'exécution, les travaux ou les prestations étant exécutés selon les ratios couramment admis en la matière.

 

Cette manœuvre, impossible sans la complicité du représentant du décideur qui doit certifier le travail fait, donne au titulaire du marché (ou du lot) la possibilité de dégager des sommes parfois importantes qui lui servent, en partie, à « dédommager » les certificateurs malhonnêtes, le reste étant, soit recouvré en totalité par l'entreprise sans que le décideur lui- même en soit informé18, soit partagé avec le décideur si celui-ci a donné son accord à cette manipulation.

 

La possibilité de ne pas respecter certaines spécificités prévues au cahier des charges peut également permettre à l'entreprise, en accord avec le décideur, de remettre une offre qui ne tient pas compte du dépassement des normes demandé et qui est donc moins chère que celles des autres concurrents. Cette proposition lui permet, généralement, d'obtenir le marché et de verser une « commission » au décideur sans toucher à sa marge.

 

Enfin, il ne faut pas oublier le cas où le technicien, employé du décideur, « opère » pour son propre compte, sachant qu'il a la confiance de son employeur et, par conséquent, les moyens d'imposer des spécifications « exorbitantes », de faire en sorte qu'elles soient ou ne soient pas prises en compte par certaines entreprises lorsqu'elles remettent leurs prix, puis de contrôler et de certifier qu'elles sont ou non réalisées. Cette omniprésence du même technicien tout au long du processus lui permet d'organiser, à son profit, sans que le décideur ne se doute de rien, des détournements significatifs pour lesquels il n'aura besoin que de la complicité du responsable local de l'entreprise.

 

4.3.2.1. La technique « pour mémoire »

 

La technique frauduleuse dite « pour mémoire » est assez spécifique aux gros marchés de travaux publics ‘ constructions, routes, ponts etc.…). elle consiste en l’absence sur le bordereau des prix du CPS de la quantité d’un ouvrage supposée imprévisible au moment de l’élaboration du descriptif technique des travaux et qui sera de nature à générer des coûts supplémentaires en cours d’exécution du marché (fouilles en roche, nappes d’eau ? affaissement incontrôlable du terrain, etc..).

 

La réglementation tient compte de ces aléas et prévoit la majoration du montant du marché pour « les prestations supplémentaires …imprévues ne dépassent pas dix pour cent (10 %) du montant du marché initial. En ce qui concerne les travaux, il faut en plus que leur exécution implique un matériel déjà installé ou utilisé sur place par l'entrepreneur. Ces marchés sont établis sous forme d'avenants aux marchés initiaux y afférents [14]»

Le seuil de 10% prévus par le décret peut être porté à plus pour les entreprises publiques et les sociétés nationales qui sont tenues légalement d’élaborer leurs propres règlements des marchés.[15]

 

4.3.2.2 les définitions défaillantes des ouvrages intentionnelles

 

Un autre type de dérive concerne ce que l'on peut appeler les « erreurs » sur les quantités ou les qualités.

 

Lorsqu'on élabore le cahier des charges d'un projet (routier, par exemple), il peut arriver que l'on se trompe sur le volume des enrochements à détruire ou que l'on minimise leur dureté. On peut aussi, malgré des études géologiques poussées, ne pas se rendre compte de l'importance de certaines poches d'argile qu'il faudra purger avant de réaliser la chaussée.

 

Dans toute estimation, il existe pour prendre en compte tous ces « imprévus de chantier » une rubrique qui représente, en général, 5 à 10 % du montant des travaux.

 

Or, il arrive que certains « imprévus » soient, non pas ignorés, mais volontairement dissimulés ou passés sous silence dans les documents remis aux candidats qui veulent soumissionner. Il s'agit là de l'un des moyens les plus efficaces pour détourner des sommes importantes. Il consiste à faire figurer dans les cahiers des charges des informations que l'on sait incomplètes ou erronées tout en donnant l'information exacte à une entreprise « privilégiée »19. Quand le décideur ou le technicien (car celui-ci peut aussi « travailler » pour son propre compte) informent l'une des entreprises, on se trouve dans l'un des cas de figure suivants: .

 

1) L'entreprise avertie se dispense de prendre en compte, dans son estimation, une sujétion particulièrement onéreuse et remporte le marché grâce à une offre inférieure à celles des autres candidats qui lui laisse pourtant une marge bénéficiaire plus élevée20. Ce type de favoritisme est parfois utilisé pour augmenter les chances des entreprises locales qui connaissent bien le terrain aux dépens d'entreprises extérieures qui travaillent exclusivement d'après le cahier des charges.

 

il y a alors collusion entre un employé du décideur (agent public) et une entreprise. Ce cas est à rapprocher de celui décrit au dernier paragraphe.

 

 Ainsi, on pourrait trouver dans les prescriptions techniques du projet des informations telles que, par exemple: .roche friable, quand elle ne l'est que sur une faible profondeur sauf en certains points particuliers du tracé, .rocher compact , quand il s'agit d'un calcaire relativement tendre sauf en quelques rares endroits, .présence de la nappe phréatique à faible profondeur , alors qu'un barrage va être mis en service en provoquant un rabattement de plusieurs mètres, ...ou encore, .terrain pollué et à remplacer sur 3 m de profondeur " alors que l'on sait que la pollution s'étend sur plus de 8m. Ce qui lui permettra de remercier, généreusement, son informateur

 

2) L'entreprise remet une proposition de prix globale intéressante pour remporter le marché et prévoit, dans son bordereau des prix, pour les travaux dont le volume a été sous-évalué, des prix unitaires élevés.

 

Ainsi, lorsque les quantités prévues au cahier des charges auront été atteintes, sans que cela suffise pour régler le problème ou réaliser le projet, il suffira de demander la « poursuite des travaux » jusqu'à ce que le but envisagé soit atteint. Il n'y aura pas de nouvel appel d'offres. Les travaux supplémentaires seront effectués par le titulaire du marché et payés au prix unitaire figurant dans le bordereau des prix initial remis par l'entreprise. La marge bénéficiaire sera reconstituée et même au-delà et permettra des « retours » substantiels.

 

Ce système implique donc une complicité entre celui qui élabore le cahier des charges et l'entreprise « choisie» pour obtenir le futur marché qui autorise toutes les dérives précédemment évoquées.

 

4.4. Les omissions délibérées pour avantager le titulaire du marché,

 

Dans de nombreux contrats, lorsque des litiges surgissent, on s’aperçoit que le décideur n’a aucun moyen de faire respecter les termes du contrat puisque le chapitre contenant les « pénalités » a été volontairement supprimé du document original. Ainsi, si l’entreprise ne respecte pas ses engagements (mais, il n’était pas envisagé qu’elle le fasse !), on ne pourra lui imposer aucune pénalité.

 

Ce procédé qui n’a rien d’original est assez souvent utilisé lorsqu’il existe une certaine collusion entre le décideur et l’entreprise. La formule permet de favoriser une entreprise en la faisant échapper aux obligations qui pèsent sur sa concurrente obligation de délai pour une réalisation, par exemple. Elle peut aussi conduire à verser des subventions ou des avances sans contrepartie.

 

4.5. Les contrats négociés de maintenance obligatoire

 

Le dernier moyen couramment utilisé pour générer, à terme, des rentrées d'argent importantes et régulières consiste à acquérir des équipements ou des matériels qui nécessiteront une maintenance qui ne pourra être assurée que par l'installateur lui-même ou une entreprise ayant une exclusivité. Le contrat 21 La « purge » consiste à vider les grottes de l’argile compressible qu’elles contiennent et à les combler ensuite par un matériau incompressible.

 

Dans les deux cas, les concurrents sont supposés faire des offres équivalentes qui ne se différentient que par les prix : l’offre économiquement la plus avantageuse est donc la moins chère.

 

L’achat pourra être négocié à des conditions particulièrement intéressantes, mais la maintenance de ces équipements ou matériels ne pourra pas l'être, le fournisseur imposant ses propres conditions.

 

Ce phénomène se rencontre tout particulièrement en informatique et en bureautique, domaines dans lesquels l'acquisition, parfois à un prix très préférentiel, d'un matériel est subordonnée à la signature d'un contrat pluriannuel de maintenance comportant les interventions habituelles sur le matériel lui-même et l'achat obligatoire (faute de quoi la garantie n'est plus accordée par le constructeur) d'une gamme de produits d'entretien spécifiques. Ces ventes largement bénéficiaires permettent à l'entreprise de dégager des profits réguliers et importants qu'elle peut reverser, au moins en partie, au décideur, sous quelque forme que ce soit, afin, indiquera-t-elle, de le conserver dans sa clientèle.

 

Dans le même esprit signalons également les achats de matériels performants mais incompatibles avec ceux qui existent déjà chez le décideur. Au bout d'un certain temps, celui-ci sera amené soit à faire procéder à de coûteuses modifications du matériel qu'il possède pour le rendre compatible avec le nouvel équipement, soit, plus radicalement, à procéder au renouvellement complet de son parc. Il va sans dire que, dans l'un et l'autre cas, des « aides à la décision » (sous forme de commissions ou autres avantages) sont prévues afin d'aider le décideur à effectuer le meilleur choix et qu'elles sont maintenues tant que dure le contrat ce qui assure à chacun des partenaires une garantie de revenus sur plusieurs années.

* * *

Dans ce chapitre, nous n'avons évoqué que le cas des prestations réalisées par des organismes indépendants du décideur. Il en va, évidemment, de même si le travail est confié, en régie, à ses propres services car, quelle que soit leur compétence, ceux-ci sont soumis aux instructions de leur directeur et ils doivent les appliquer. Ils peuvent donc, eux aussi, être amenés à « biaiser » les résultats de leurs études en omettant, par exemple, de préciser toutes les conséquences d'un choix technologique (matériels actuellement utilisés rendus obsolètes, nécessité d'un entretien périodique par le réalisateur, réécriture des logiciels informatiques utilisés jusque là, estimations « erronées » de certains postes de dépenses, etc.).

 

Ces omissions volontaires servent, dans la plupart des cas, à justifier la passation de contrats ultérieurs (en utilisant la procédure négociée) qui permettent au décideur de prévoir le versement, à son profit, de « commissions » pendant de longues années.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE 5

 Les dérives dues au mode de consultation

 

« Le choix du type de procédure utilisé pour lancer la consultation peut parfois être le signe d'une volonté de contourner la législation applicable. Les procédures elles-mêmes ne sont pas en cause puisqu'elles permettent de garantir la liberté d'accès et l'égalité des chances des candidats aux marchés publics. Mais, chacune de ces procédures, si elle est utilisée avec une volonté manifeste d'y parvenir, est susceptible de permettre ou de camoufler des détournements de fonds publics ou des phénomènes de corruption, trafic d'influence, concussion, prise illégale d'intérêts et d'atteinte à la liberté et à l'égalité des candidats. Les risques ne sont cependant pas toujours les mêmes selon que l'on lance un appel d'offres ouvert ou restreint, que l'on utilise la procédure négociée, ou que l'on passe par l'intermédiaire d'un groupement.[16] »

 

Certaines procédures permettent, plus facilement que d'autres, des dérives. En outre, le décideur peut parfois réussir à éviter de lancer la consultation.

 

 

5. 1 Achats effectués par l'intermédiaire d'un groupement

 

Par groupement il faut entendre tout organisme dont la mission est d’assumer la fonction d’acheteur public non pas pour satisfaire ses propres besoins, mais ceux d’un groupe d’acheteurs relevant de divers organismes publics. Le Maroc à expérimenté ce genre de procédé qui n’a pas eu grand succès pour diverses raisons, l’organisme était connu sous la dénomination de la DCAP (Direction centrale des approvisionnements)

 

Plus récemment, le ministère des travaux publics avait assumé la même fonction en tant que maître d’ouvrage délégué pour divers départements ministériels, notamment celui de l’éducation nationale pour le compte de qui il se chargeait des constructions scolaires. Actuellement, la CGI, filiale de la CDG semble assumer ce rôle compte tenu de son expérience en tant que promoteur immobilier et de la souplesse de gestion qui la caractérise.

 

En France, l’UGAP est toujours active, elle-même érigée en entreprise publique à caractère industrielle et commerciale (EPIC).Elle a pour mission de passer des marchés publics, de conclure des accords-cadres de travaux, fournitures ou services et d'acquérir des fournitures ou services destinés à tout pouvoir adjudicateur ou à toute entité adjudicatrice soumis au code des marchés publics.

 

Elle  peut également intervenir au bénéfice de toute institution étrangère tenue de passer ses marchés conformément aux dispositions de l'Accord sur les marchés publics en date du 15 avril 1994 conclu dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce et de toute organisation internationale, intergouvernementale ou non, ayant souscrit aux obligations de transparence, de publicité et de concurrence stipulées dans cet accord.

 

Les relations entre les acheteurs publics et le groupement sont plus au moins claires. La procédure réglementaire de l’achat est appliquée par le groupement qui en assume la responsabilité tout en dégageant celle des acheteurs publics dont le rôle dans ce processus se limite à lui passer commande moyennant une commission calculée de la même manière en fonction de la valeur des produits, services ou travaux.

 

 

Cependant, bien que ce mécanisme s’affiche comme étant simple utile, il peut néanmoins être détourné ce qui fait que tous les types de corruption individuelle sont alors possibles.

 

Nous allons exposer ci-après, à titre d’exemple ; deux procédés illustratifs qui ne manquent pas de conduire à un véritable détournement de procédure.

 

Ø Un client (acheteur public) peut exiger du groupement de lancer la procédure sur la base d’un CPS orienté de telle manière qu’il ne sera retenu en définitive d’un seul produit avantageant ainsi soit son fabricant, soit son fournisseur exclusif, en prenant le soin d’appliquer aux concurrents proposant des produits équivalents des commission plus élevées que celle du fournisseur attitré.

Ø Le groupement peut se trouver en face d’un nouveau produit que ses fournisseurs habituels ne peuvent pas proposer sans en maîtriser les spécifications au préalable. Il leur communique officieusement ces spécifications et sursoit au lancement de la procédure jusqu’à ce qu’ils soient prêts à soumissionner dans des conditions confortables. En usant de ce procédé qui s’apparente quasiment au délit d’initié, l’acheteur du groupement aura la certitude d’attribuer le marché à l’un de ses fournisseurs attitrés moyennant commission individuelle illicite.

 

 

5.2 L'appel d'offres ouvert

 

La procédure de l’appel d’offre ouvert sur offre de prix est érigée en règle générale en matière de marchés publics. Cette procédure offre aux acheteurs publics une large marge d’appréciation des offres puisque, contrairement à l’adjudication qui n’est plus pratiquée, elle ne les contraint pas à ne retenir que les offres les moins disantes.

 

La procédure appel d'offres ouvert assure également aux candidats l’égalité d’accès à la commande publique dans une parfaite transparence.

 

Cependant, cette procédure peut être mise en défaut par l'utilisation de différents moyens susceptibles d'influer sur la sélection des entreprises ou sur la sélection des offres, parmi lesquels on retiendra plus spécialement les procédés suivants :

 

 

5.2.1. vices inhérent à la publicité

 

Au Maroc, la réglementation exige la publication de l’avis de l’appel d’offres dont le délai dit de publicité ( non de publication ) est de  vingt et un jours dans deux quotidiens de la presse nationale dont un au moins en langue arabe et ce en plus du site web « marchés publics ».

 

Cette disposition est très limitée dans tous les cas où le choix du journal n’est pas suffisamment conditionné de manière à cibler essentiellement les entreprises susceptibles d’être intéressées par l »appel d’offres aussi bien au niveau local qu’international.

 

Il faut également ajouter à cette insuffisance l’absence totale d’une publication spécialisée dans les marchés publics qui veillera , non seulement à la publication des avis d’appels à la concurrence, mais également à celles des résultats des procédures publiques et des programmes prévisionnels constamment mis à jours et suffisamment commentés.

 

La mauvaise foi est donc non seulement probable à ce niveau de la procédure, mais également facile à mettre en œuvre. Il suffit pour cela de :

 

Ø Opter pour deux quotidiens à tirage très réduits et loin de par leur ligne éditoriale du monde des affaires,

Ø Viser des périodes de grandes vacances puisque le texte est totalement muet quant au nombre de jours pendant lesquels l’avis doit être publié (une seule publication même pendant un jour chômé est suffisante pour la régularité de la procédure, ce qui est aberrant eu égard aux objectifs réels de la démarche)

 

5.2.2. Le choix des critères

 

Bien que les critères de sélection des offres figurant dans le règlement de la consultation doivent être en relation évidente avec l'objet du marché ou les conditions de son exécution, certains acheteurs ajoutent des critères additionnels dont l’évaluation subjective conditionne l’attribution du marché et justifie l’éviction des concurrents indésirables.

 

Parmi ces critères, le décret de 2007 régissant les marchés public prévoit, entre autres :

 

- Les modèles de fabrication des produits, les modalités de la prestation des services, les procédés de construction ;

- Le caractère exceptionnellement favorable des conditions d’exécution dont bénéficie le concurrent ;

 -  L’originalité du projet ou de l’offre.

 

Le caractère assez flou de ce genre de critères peut être utilisé aisément pour détourner la procédure dans le respect apparent des dispositions réglementaires.

 

C’est aussi le cas de « l’aspect architectural » d’un ouvrage ou de son « insertion dans l’environnement » pour lesquels le jugement est surtout question de choix personnel induisant des jugements subjectifs, plutôt que de critères objectifs.

 

5.2.3. Les conditions d'obtention des documents

 

Il arrive que, pour limiter le nombre de concurrents, l’acheteur fasse recours à des procédés occultes pour perturber, ou du moins retarder la remise des documents de l’appel d’offres en réduisant ainsi le délai normal pour le dépôt des offres.

 

Les procédés les plus utilisés à cette fin peuvent être présentés ainsi :

 

ü Obstruction à l’envoi par poste des documents aux concurrents qui ne peuvent pas venir les chercher sur place,

ü Prix exorbitant des documents dont certains peuvent s’avérer sans aucune utilité (plans, schémas synoptiques)

ü Indisponibilité des documents sous prétexte de signature ou de duplication,

 

 

« En outre, dans certains appels d'offres, des pièces importantes du cahier des charges (plans, études géologiques, ...) ne sont pas prêtes au moment du lancement de la consultation. Elles sont transmises plus tard, mais, même lorsque le délai de remise des offres est allongé (car il ne l’est pas toujours), le temps manque souvent pour bien étudier ces documents et présenter une offre techniquement bien étudiée. Seules peuvent donc étudier correctement leur offre et remettre leurs prix dans les délais fixés, des entreprises qui ont eu connaissance, à l'avance, du contenu de ces documents. »[17]

 

Entre-temps, le ou les concurrents attitrés de l’acheteur sont en possession de tous les documents dès leur disponibilité et bien avant le lancement de la procédure.

 

Il est évident que ces fraudes ou malversations (non limitatives) d'ordre purement procédural s'ajoutent aux « dérapages » techniques qui dépendent de la manière dont le cahier des charges a été préparé.

 

 

5.3. L'APPEL D’OFFRES RESTREINT

 

Le décret de 2007 régissant les marchés publics au Maroc prévoit qu’Il ne peut être passé de marchés sur appel d'offres restreint que pour les prestations dont le montant est inférieur ou égal à un million (1.000.000) de dirhams et qui ne peuvent être exécutées que par un nombre limité d'entrepreneurs, fournisseurs ou prestataires de services,  en raison de leur nature, de leur complexité ou de l'importance de l'outillage à utiliser.

 

L'appel d'offres restreint doit s'adresser au moins à trois (3) candidats susceptibles de répondre au mieux aux besoins à satisfaire.

 

Trois éléments, sous le faux prétexte de leur nature contraignante,  caractérisent donc cette procédure en lui conférant un aspect dérogatoire par rapport à la règle générale qu’est l’appel d’offres ouvert :

 

ü Valeur de la prestation ou de la fourniture inférieure à 1.000.000 Dhs,

ü Caractère complexe de la prestation faisant en sorte qu’elle ne peut être réalisée que par un nombre limité de prestataires ou fournisseurs,

ü Le nombre des concurrents à consulter ne doit en aucun cas être inférieur à trois dont la sélection est laissée à la discrétion absolue de l’acheteur

 

Contrairement à la réglementation marocaine, la loi type sur les marchés publics élaborée par la CNUDCI en 1995 limite les conditions de recours à la procédure de l’appel d’offres restreint à deux considérations essentielles, à savoir :

 

« a) Les biens, les travaux ou les services, de par leur nature extrêmement complexe ou spécialisée, ne sont disponibles qu'auprès d'un nombre limité de fournisseurs ou entrepreneurs ; ou

b) Le temps qu'il faudrait passer et les frais qu'il faudrait engager pour examiner et évaluer un grand nombre d'offres seraient disproportionnés par rapport à la valeur des biens, des travaux ou des services requis.[18] » (Article 20)

 

La loi type de la CNUDCI énumère par ailleurs les conditions présidant au choix des concurrents à consulter pour éviter toute tendance à privilégier un groupe de concurrents au détriment des autres :

 

« 1. a) Lorsque l'entité adjudicatrice lance un appel d'offres restreint pour des motifs visés à l'alinéa a) de l'article 20, elle sollicite des offres de tous les fournisseurs ou entrepreneurs auprès desquels les biens, travaux ou services requis peuvent être obtenus ;

 

b) Lorsque l'entité adjudicatrice lance un appel d'offres restreint pour des motifs visés à l'alinéa b) de l'article 20, elle sélectionne les fournisseurs ou entrepreneurs auprès desquels elle sollicitera des offres de manière non discriminatoire et elle retient un  nombre suffisant de fournisseurs ou entrepreneurs pour assurer une concurrence véritable.

 

2. Lorsque l'entité adjudicatrice lance un appel d'offres restreint, elle fait publier un avis d'appel d'offres restreint dans ... (l'État adoptant la Loi type spécifie le journal officiel ou autre publication officielle dans lequel l'avis doit être publié).39

3. Les dispositions du chapitre III de la présente Loi, à l'exception de l'article 24, s'appliquent à la procédure d'appel d'offres restreint, sauf dans la mesure où le présent article déroge auxdites dispositions. »(article 47)

 

5.3.1. L’élaboration de la liste des candidats

 

La phase essentielle de cette procédure est en principe l’élaboration, à partir de critères techniques, de la liste des candidats à consulter.

 

L'absence de publicité au moment de l'appel à candidatures ou l'absence d'appel à candidatures justifient légalement le fait tendant à éviter que trop de candidats se présentent et soient inscrits sur la liste des entreprises à consulter.

 

 Le risque de fraude encouru à ce stade de l'élaboration de cette liste peut être la tentation d’exiger le versement de « pots de vin »pour le décideur qui dispose à cet effet d’un pouvoir discrétionnaire indiscutable.

 

Dans cette liste, le décideur (personne responsable du marché ou commission d'appel d'offres) arrête la liste sans avoir besoin de préciser les critères qu’il utilise pour justifier la sélection des entreprises auxquelles il demandera une proposition de prix.

 

Par ailleurs, cette latitude lui permet de conserver un pouvoir de rétorsion important puisqu'il peut, si elles ne lui donnent pas satisfaction, ne plus les sélectionner ou inviter des candidats nouveaux (accroissement de la concurrence) lors des consultations ultérieures.

 

Autre risque pouvant être généré par la procédure telle qu’elle est conçue consiste en la création délibérée d’une entente entre trois fournisseurs associée à une surfacturation due la surévaluation du coût des prestations.

 

5.3.2. Les ententes

 

Le terrain fertile aux ententes entre concurrent est celui où des appels d’offres portant sur des équipements très spécifiques de par leur nature et conception technologique s’adressent à un nombre très limité de concurrents.

 

On peut estimer dans ce contexte que les programmes prévisionnels publiés par les acheteurs facilitent la tâche aux concurrents, et offrent même à l’acheteur véreux la possibilité de jouer au chef d’orchestre répartissant les commandes entre les concurrents en l’incitant à adopter une démarche de coopération au détriment de celle de l’émulation.

 

C’est ainsi que les entreprises régulièrement sélectionnées adoptent, entre elles, une sorte de « modus vivendi » qui leur permet de donner satisfaction à l’acheteur tant au niveau professionnel qu’individuel sans, pour autant, se lancer dans une concurrence sauvage. Elles peuvent alors se répartir les marchés en fonction de critères qui leur sont propres.

 

Toute entreprise ne jouant pas le jeu est écartée de la commande publique alors que celles qui le jouent tiennent compte, dans leurs prix, des contraintes qui leur sont imposées, les majorent en conséquence et sont en mesure d'attribuer des « compensations », aussi bien à leurs collègues non retenus (sous-traitance ou dédommagements divers) qu'à l’acheteur (commissions). Finalement, c'est le contribuable qui paie tous ces suppléments.

 

Cette entente entre les entreprises peut également prendre diverses formes :

 

ü Association officielle,

ü Association occulte qui portera sur la désignation de celle qui présentera la « meilleure » offre et sur le montant admissible de cette offre,

ü Association occulte qui désignera celui de ses membres qui sera seul en position d'obtenir le contrat alors que les autres obtiendront des contreparties dans cette opération ou, ultérieurement, lors d'autres opérations.

 

Les ententes font souvent appel à la notion de « l’offre la plus avantageuse » tant encouragée par les textes régissant les marchés publics. Le montage d’une telle offre nécessite, pour les concurrents, des informations très précises quant à la nature technique du besoin à satisfaire, le degré de l’urgence qui le caractérise, le coût maximum que l’acheteur peut supporter ainsi que les garanties réelles qu’il sera obligé de réclamer.

 

Une fois l’appel d’offres et les mécanismes de l’entente bien rodés et prêts à fonctionner, le dépouillement des offres par les commissions dont les membres ignorent tout de l’entent, devient purement formel.

 

L’acheteur peut également briser l’entente s’il considère qu’elle ne lui procure pas les avantages ou les profits qu’il a visé et ce leur communiquant une estimation excessive par rapport à l’estimation officielle de l’administration. La commission doit alors déclarer l'appel d'offres infructueux lui offrant du coup la possibilité de s'engager dans une procédure négociée.

 

On remarquera que ces entorses à la législation sur les marchés peuvent n'avoir aucune incidence en matière de corruption alors qu'elles constituent des atteintes très graves à l'égalité des candidats aux marchés publics.

 

5.4. La procédure négociée

 

Tous les marchés négociés étaient, a priori, suspects aux yeux des contrôleurs car la négociation directe entre un décideur et un fournisseur peut donner lieu à toutes sortes de manipulations engendrant fraudes, détournements de fonds publics et corruption.

 

En effet , la procédure négociée de gré à gré est une procédure d'exception dont les conditions de mise en œuvre doivent être entendues de manière restrictive. L'atteinte aux principes de la commande publique est trop importante pour que l'on puisse déroger facilement aux contraintes de la mise en concurrence. La Cour de justice de l'UE considère que cette dérogation « doit faire l'objet d'une interprétation stricte et que c'est à celui qui entend s'en prévaloir qu'incombe la charge de la preuve que les circonstances exceptionnelles justifiant la dérogation existent effectivement ». Il faut rappeler également la sanction prononcée en 2010 par le Conseil d'Etat contre le décret qui autorisait les marchés de gré à gré en dessous d'un seuil de 20 000 euros hors TVA. Cette disposition a été annulée pour méconnaissance des principes généraux de la commande publique. Le juge a considéré que la dérogation était trop générale mais a admis que, dans certaines situations, a fortiori exceptionnelles, il puisse ne pas y avoir d'autre solution que de conclure sans mise en concurrence.

Une procédure conditionnée

 

Le recours à cette procédure d’exception concerne donc des situations rares dans lesquelles le choix du cocontractant est dicté par des motifs techniques, artistiques ou liés à une exclusivité reconnue ou à des considérations d’urgence ou de sécurité nationale. Ces motifs sont alternatifs et limitatifs et ils doivent être extérieurs au pouvoir du maître d’ouvrage, c’est-à-dire s'imposer à lui. Il ne doit pas les prendre en considération pour définir son besoin, faire des choix techniques ou rédiger les conditions d'exécution.

 

Rappelons à ce stade qu'il y a, de manière générale, une véritable exigence d'objectivité dans la préparation des cahiers des charges. De plus, l'acheteur doit démontrer que le besoin ne peut pas être satisfait par le biais d’un appel public à la concurrence.

 

Nous allons donner quelques exemples des chefs d’exception autorisés par diverses réglementations des marchés publics et qui sont souvent invoqués, à tort ou à raison par les acheteurs publics , tout en tenant compte du fait que l’usuelle justification exigée par les textes ( au Maroc du moins) se limite à un simple certificat administratif qui ne fait même pas partie intégrante du contrat ( préambule en principe) et dont l’opportunité est laissé à la discrétion du contrôle préalable.

 

5.4.1. Essais, recherches et expérimentations

 

Abstraction faite de l’obligation pour de fournir les justifications sur le caractère expérimental ou de recherche des travaux, fournitures ou services qu'il commande, ce chef d’exception peut facilement être appliqué à n’importe quel ouvrage d'art ou bâtiment spécialisé sous prétexte que la complexité de la conception et la spécificité de leur usage nécessitent des prestation particulières qui ne peuvent être réalisées que par un prestataire bien déterminé.

 

Mais, si la justification semble théoriquement acceptable pour ce type d'ouvrages, elle ne l'est plus lorsqu'il s'agit de constructions courantes et habituelles (ouvrages d'art types, construction de bâtiments d'habitations suivant un modèle ou d'ateliers industriels aux caractéristiques classiques, ...).

 

5.4.2. Après un appel d'offres infructueux

 

C'est le cas le plus fréquent. Il est aisé à employer puisqu'il suffit de fixer des caractéristiques techniques élevées, orientées ou confuses et une estimation de prix de marché susceptible de justifier le rejet des offres pour que l'appel d'offres soit déclaré infructueux.

 

5.4.3. En cas d'urgence ou d'urgence impérieuse

 

L’urgence est un vrai casse tête comme chef d’exception à invoquer. Le législateur le conditionne par deux considérations liées et difficiles à justifier :

 

  1. L’urgence doit être impérieuse,
  2. Elle doit être née de circonstances imprévisibles

 

5.4.4. Secret défense ou intérêt supérieur de la Nation

 

La Jurisprudence de la Cour Européenne de justice a, dans un certain nombre de cas, contribué à limiter le recours à cette notion, ce qui a permis de réduire sensiblement son importance, tant au plan national qu'au plan communautaire. On ne devrait donc plus voir des achats de couvertures pour l'armée soumis au secret défense et des travaux de peinture dans un consulat pour lesquels l'intérêt supérieur de la Nation a été invoqué.

 

En conclusion, maître d’ouvrage doit être prudent dans sa mise en œuvre de cette procédure d’exception .Les cas de figure qui permettent de l’'utiliser doivent être entendus de manière restrictive. Une utilisation cavalière peut conduire à l'annulation du marché car le juge se montre strict dès qu'il s'agit de déroger au principe de mise en concurrence. Mais les conséquences peuvent être beaucoup plus graves.

Deux arrêts récents de la chambre criminelle de la Cour de cassation française illustrent les risques encourus par les acheteurs publics. Un président d'OPHLM a été reconnu coupable du délit de favoritisme pour avoir conclu un marché de gré à gré avec une société détenant un brevet alors que la nécessité de recourir à ce brevet n'était pas établie (Cass. crim., 14 décembre 2005, n° 05-83205). Plus récemment, une collectivité a considéré que son bulletin municipal ne pouvait être publié que dans la revue dont sa SEM détenait les droits d'exclusivité. Le juge pénal ne s'y est pas trompé : « Le simple fait que la société attributaire du marché soit propriétaire du titre ne dispensait pas la commune d'une mise en concurrence, le support du bulletin municipal ne pouvant être « prédésigné » par la détention de droits exclusifs » (Cass. crim., 25 juin 2008, n° 07-88373). Au final, deux élus ont été condamnés à des peines avec sursis.

Comme on vient de le voir, aucune procédure de consultation ne permet d'éviter les risques de fraudes et de corruption. Il faut donc bien admettre qu'il n'y a pas une procédure spécifique qui favorise les comportements délictueux, mais qu'il existe des individus malhonnêtes utilisant les failles que présentent les différents types de procédures pour parvenir à leurs fins par des manœuvres frauduleuses susceptibles de tomber sous le coup de la loi pénale.

 

 

 

 

CHAPITRE 6

Procédés permettant de ne pas lancer un marché

 

Peut-on dire que le recours à la concurrence est considéré comme une corvée inutile par plusieurs acheteurs publics ? En considérant les mécanismes forgés parfois même à la perfection pour se soustraire impunément de cette obligation, on aura tendance à répondre par l’affirmative.

 

Pour se justifier, certains acheteurs publics se retranchent derrière le fait que les procédures d’appels publics à la concurrence sont très aléatoires et risquées au niveau de la bonne exécution des commandes publiques, ajoutant à cet argument un autre qui repose sur la mauvaise foi de certains fournisseurs plus animés par le blanchiment de l’argent sale que par le souci de contribuer légalement au développement économique et social à travers les commandes publiques créatrices d’emplois.

 

Les procédés de soustraction à cette obligation sont variés et souvent d’apparence légale au point qu’il s’avère difficile de démontrer le contraire :

 

  1. Fractionnement artificiel de là prestation

 

Les textes réglementaires régissant les marchés publics regorgent de dérogations et d’exception permettant aux acheteurs publics d’éviter la situation où ils doivent impérativement faire appel à la concurrence.

 

Il s’agit entre autres de :

 

ü Le contrat de droit commun (sans limitation de montant)

ü L’appel d’offres restreint (moins d’un million de dirhams pour l’Etat, plus pour les entreprises publiques)

ü Le bon de commande (deux cent mille dirhams par nature et par personne habilité pour l’Etat et plus pour les entreprises publiques)

ü Les marchés négociés (sans limitation de montant)

ü Les avenants et les marchés complémentaires ( 10% du montant du marché initial pour les avenants , sans limitation de montant pour les marché complémentaires)

ü Les dépenses par voie de régie (plafonds négociables entre l’Ordonnateur et la TG)

ü L’allotissement des marchés de manière à ce que les montants des lots soient couverts par l’exception.

ü Les marchés à tranches conditionnelles ou pluriannuels

 

A titre d’exemple, on peut considérer que dans le secteur du bâtiment, par exemple, plutôt que de lancer un appel d'offre sur la totalité de l'opération, c'est-à dire l’ensemble du bâtiment, les consultations seront effectuées par corps d’état : plombier, vitrier, peintre, menuiserie. En outre, on échelonne les contrats dans le temps et, au besoin, on garantit que le local est utilisable en l'état, que les différents contrats de travaux ne sont pas liés, qu'ils ne conditionnent pas cette utilisation.

 

 

b. Fractionnement artificiel de la facturation en régie

 

Lorsque le cumul de plusieurs commandes doit, au cours du même exercice budgétaire, dépasser le seuil, ce qui nécessiterait, au moins, la signature d'un marché de régularisation, on demande au fournisseur de présenter ses factures sous d’autres identités et à dates espacées. A chaque « entreprise différente » on confie un volume de factures inférieur au seuil et on peut continuer à travailler dans le cadre de la procédure des dépenses en régie en toute quiétude même si le montant global des dépenses éclatées en petites commande dépasse de loin les seuils autorisés.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE 7

 Les dérives pendant l'exécution du contrat

 

La phase de réalisation du marché est le plus souvent l’objet de montages frauduleux, voire même de prestations matérielles non réalisées ou mal faites, du travail clandestin (ou au noir), des surveillants et des contrôleurs complices de détournements ainsi qu'à un ensemble de pratiques, de tours de mains, profondément intégrés dans la tradition du métier concerné. Tous ces « artifices » permettront au titulaire du marché de générer les flux financiers nécessaires à la réalisation du pacte corrupteur.

 

Il convient de signaler également que la réglementation marocaine est loin d’atteindre la perfection nécessaire pour la mise en œuvre des bonnes pratiques de gouvernance en matière d’exécution des commandes publiques.

 

En effet, seuls les textes relatifs aux modes de passation des marchés ont connu des ajustements successifs depuis le décret de 1965 (le premier en 1976, puis en 1988 et en 2007, alors que celui de 2010 est toujours en gestation auprès du Secrétariat Général du Gouvernement). es cahiers des clauses administratives générales ont moins de chance, le seul fait marquant les concernant remonte à 2000 avec la révision du CCAG travaux depuis la version de 1965 et l’adoption d’un CCAG EMO.

 

Les marchés de fournitures, depuis l’indépendance du Maroc, demeurent aléatoirement soumis aux dispositions du CCAG Travaux auxquels ils peuvent être adaptés et qui sont d’ailleurs reprises au niveau même du CCAG EMO.

 

Ces textes posent comme règle générale le principe l’exécution régulière et transparente, règle simple à respecter même si le titulaire du marché a été favorisé au moment de l'attribution du contrat.

 

Il arrive cependant que cette règle soit transgressée dans les cas où, au moment de la signature du contrat, l’acheteur impose au titulaire du marché le versement de « commissions ».

 

Le titulaire du marché, n’ayant pas été informé préalablement de cette contrainte, pour laquelle il n’avait rien « prévu » pour couvrir, sans préjudice,  ce versement illicite, subit alors un véritable racket puisque, si elle ne paye pas, elle ne reçoit pas la notification du contrat et ne peut donc pas travailler. En outre, si cette notification tarde trop, toute la procédure peut être annulée. Le seul moyen qui peut lui permettre de sortir de cette impasse est de tricher pendant l’exécution de la commande.

 

Enfin, il existe des cas où le cahier des charges a été élaboré, avec ou sans la complicité de l'entreprise, en vue de faciliter les montages qui permettront l’attribution du marché et le détournement des sommes que l’acheteur veut se voir attribuer à titre de compensation ou d'indemnité.

 

Même si le délit de détournement est le même d’un point de vue légal, les technique de la fraude diffèrent suivant la nature et l’objet de chaque commande :

 

7.1. La livraison de fournitures

 

S'agissant de fournitures, les détournements sont faciles à appréhender, sinon à déceler. En effet, ils ne peuvent pas se produire pendant la fabrication des produits car ceux-ci sont, généralement, élaborés en usine suivant les spécificités du fabriquant (produits achetés sur catalogue} ou suivant celles qui sont inscrites au cahier des charges (fabrications spéciales}. Il en existe cependant plusieurs formes.

 

7.1.1. Les remises

 

Il arrive souvent que le vendeur accorde des remises ou des rabais au vu des quantités commandées pour tel ou tel produits ou tout simplement pour écouler un surplus de stock pour assainir sa comptabilité. Ces remises promotionnelles, quantitatives ou autres sont, généralement, intégrées à la facturation. Mais en cas de fraude ces remises sont versées directement à l'acheteur et n’apparaissent pas sur les factures.

 

 Le fournisseur ouvert à cet effet un compte dans ses livres comptables au nom de l’organisme acheteur. Ce compte est alimenté par des avoirs fictifs correspondants aux ristournes qui n'ont pas été intégrées dans la facturation.

 

Parfois l’acheteur utilise ce compte pour acquérir des marchandises pour son propre compte, pour des membres de sa famille ou pour ses amis. Les marchandises concernées ne figureront dans aucun inventaire car elles n'ont pas d'existence légale.

7.1.2. Modifications de la commande

 

Souvent, l’acheteur véreux va se contenter d’indiquer sur le marché ou le bon de commande la marque d’un produit sans préciser ni sa référence, ni son origine de fabrication alors qu’il a été exigeant sur ces deux paramètres lors de la consultation ou l’examen des échantillons. Au moment de la livraison il va réceptionner un produit de moindre qualité, ou d’origine douteuse (contrefaçon, contrebande …) vendu sur le marché moyennant un prix très bas par rapport au prix contractuel. La quantité commandée, parfois excédant le besoin réel, va engendrer une somme importante à détourner.

 

Des équipements plus importants, notamment le matériel informatique et électronique, peuvent être facilement modifiés sous prétexte qu’ils ne sont plus fabriqués puis changés par d’autres moins onéreux ou moins performants.

 

Ces procédés , ainsi que le changement de la dénomination du produit,  sont également utilisés par les ordonnateurs pour détourner la règle de l’imputation budgétaire en puisant dans une rubrique suffisamment dotée de crédits qui risquent d’être tomber en annulation en fin d’exercice s’ils ne sont pas engagés.

 

7.1.3 Les reprises de matériels

 

L’astuce est assez simple puisqu’il s’agit pour l’acheteur de se débarrasser de matériel vieux mais en état de fonctionnement normal et d’en acheter un autre neuf. Le vieux matériel est repris par le fournisseur moyennant un prix modique qui est reversé par l’acheteur sous forme de facturation portant sur le démontage et la déconnexion du matériel.

 

Le fournisseur peut alors céder ce matériel à un acheteur de matériel de seconde main et se faire payer en espèce. Cette somme sera donnée en guise de corruption qui va lui garantir la commande du matériel neuf.

 

7.2. Exécution d'une prestation de services

 

La réalisation d'une prestation de services n’est pas épargnée par la fraude, elle donne cependant lieu à mécanismes plus sophistiqués. La plupart des phénomènes purement internes à la société de services correspondent à des fraudes fiscales (dissimulation de bénéfices) n'ayant pas obligatoirement de lien avec la corruption, même si, dans certains cas, la nécessité d'accroître les commandes génératrices de bénéfices faciles passe  par l'obligation de verser une « indemnité » après obtention du marché.

 

7.2.1. Modification des prestations

 

Dans un certain nombre de cas, un deal, non écrit mais néanmoins validé par une réception non conforme à la réalité, entre l’acheteur et le prestataire peut avoir pour objet, après l'attribution du marché, la baisse de la masse des prestations prévues au cahier des charges au moment du lancement de la procédure pour lui permettre de verser une commission à l’acheteur.

 

Ainsi, notamment en ce qui concerne les marchés portant sur des prestations intellectuelles ; le titulaire du marché peut réduire sensiblement la charge de travail prévue, limiter les exigences, et se libérer de ses obligations contractuelles à bon compte, tout en respectant l'obligation de fournir les livrables qui servent à justifier les paiements.

 

7.2.2. Doubles (ou multiples) paiements

 

Un autre procédé consiste à commander une prestation de portée générale déjà exécutée pour le compte d’un client (exemple des manuels des procédures et de statuts de personnel). Il s'agit, après attribution du marché, juste d’adapter l’habillage des livrables pour les rendre identifiables au moins visuellement à l’organisme de l’acheteur.

 

Ce travail dit de « recyclage » a une rentabilité particulièrement élevée et permet de partager des gains substantiels. En effet, le maitre d’ouvrage achète, sous un autre nom, soit une prestation qu'il a déjà reçue et payée, soit un livrable qui lui a été communiqué à titre gracieux par une autre administration ou une institution non gouvernementale (exemple des rapports d’évaluation sectoriels élaborés par des organismes internationaux qui seront repris par le prestataire et actualisés sans aucun effort au niveau de la démarche, de la méthodologie ou les investigations).

 

 

 

 

7.3. Réalisation de travaux

 

La fraude en matière de réalisation des travaux est assez complexe mais génératrice de détournement très consistants. Elle porte généralement sur les phases les moins apparentes de l’exécution des travaux : mise en place des chantiers, acomptes sur approvisionnements, travaux préparatoires, fondations etc… comme elle porte sur les travaux supplémentaires ou imprévus.

 

Elle est également complexe puisque elle met à contributions une véritable bande de délinquants financiers : l’architecte, le bureau d’étude, le bureau de contrôle, le bureau d’ordonnancement, de planification et de coordination, les conducteurs de chantiers, les sous-traitants et le maître d’ouvrage qui prend le soin de choisir cette équipe de manière à ne pas se trouver en face d’une quelconque résistance.

 

 

7.3.1Les travaux préparatoires

 

Les travaux préparatoires, même s’ils sont onéreux et indispensables à la réalisation de l'ouvrage quelque soit sa nature ou l’ordre de sa grandeur n’attirent pas suffisamment d’attention et sont acceptés comme travaux auxiliaires dont la matérialité est le plus souvent difficile à mettre en évidence.

 

Ils sont généralement obligatoires en fonction de contraintes extérieures ou imposés par des contraintes spécifiques au chantier (transport des déblais, détournement et rétablissement des circulations, prise en compte de l'environnement paysager, etc.)

 

Dans le cas des démolitions ou de la préparation des sols (arrachement des souches d’arbres), les marchés sont traités au forfait ou à prix unitaires fixés souvent arbitrairement et laissés « pour mémoire » sous prétexte que le maître d’ouvrage ne peut en établir le quantitatif exact ou la consistance précise au moment de la rédaction du CPS. Cette pratique altère sérieusement la concurrence puisque ces prix n’apparaissent pas sur le montant de l’acte d’engagement et ce n’est qu’après exécution des travaux qu’il peut s’avérer que le marché avait été attribué sur la base d’une offre moins avantageuse.

 

 

 

Par ailleurs, le bénéfice généré par la cession de certain ouvrage démonté (menuiserie, plomberie, électricité etc...) est systématiquement occulté puisqu’il n’est repris par l’organisme sous forme de recette accidentelle.

 

Ces produits sont considérés comme n’ayant, a priori, aucune valeur marchande bien qu'ils permettent parfois de dégager les premières sommes, en liquide, qui serviront à alimenter le pacte corrupteur.

 

 

7.3.2. Les travaux supplémentaires

 

Suivant les dispositions réglementaires ou légales régissant les marchés publics de chaque pays, les travaux supplémentaires peuvent être commandés par avenant au marché initial ou tout simplement au d’un ordre de service ou par les deux procédés en même temps.

 

Au Maroc, les travaux supplémentaires afférents aux marchés publics sont réglementés par les dispositions des articles 9 et 52 du « CCAG travaux »

 

L’article 9 traite des ordres de services qui doivent être écrit et enregistrés, et auxquels l'entrepreneur doit se conformer strictement, il doit également se conformer, sous sa responsabilité,  aux changements qui lui sont prescrits pendant l’exécution du marché, que le maître d'ouvrage  ordonne par ordre de service. Il ne lui est tenu compte de ces changements qu'autant qu'il justifie de cet ordre de service.

 

Si l'entrepreneur refuse de recevoir notification des ordres de service, il est dressé un procès-verbal de carence par le maître d'ouvrage, ou lorsque il estime que les prescriptions d'un ordre de service dépassent les obligations de son marché, il doit, sous peine de forclusion, en présenter l'observation écrite et motivée au maître d'ouvrage dans un délai de dix (10) jours à compter de la date de notification de cet ordre de service. La réclamation ne suspend pas l'exécution de l'ordre de service à moins qu'il en soit ordonné autrement par le maître d'ouvrage.

 

L’article 52 concerne essentiellement l’augmentation dans la masse des travaux

 

En effet, les dispositions de cet article exigent de l’entrepreneur de mener à son terme la réalisation des ouvrages faisant l'objet du marché, sans ordre de service, tant que l'augmentation de la masse des travaux qui peut résulté de sujétions techniques ou d'insuffisance des quantités prévues dans le marché n'excède pas dix pour cent (10%) de la masse initiale des travaux.

 

Cependant, il convient de noter que lorsque la valeur de la masse des travaux exécutés excède ce seuil, l'entrepreneur est dans l’obligation d’arrêter les travaux s'il n'a pas reçu un ordre de service lui notifiant la décision du maître d'ouvrage de les poursuivre.

 

Cette décision n'est valable que si elle indique le montant limite jusqu'où les travaux pourront être poursuivis, le dépassement éventuel de ce montant limite devant donner lieu à la même procédure et entraîner les mêmes conséquences que celles qui sont définies ci-après pour le dépassement de la masse initiale.

 

A défaut d'ordre de service de poursuivre les travaux, les travaux qui sont exécutés au-delà du seuil précité ne sont pas payés à l'entrepreneur. Les mesures conservatoires à prendre décidées par le maître d'ouvrage sont à la charge de ce dernier, sauf si l'entrepreneur ait pris la précaution d’avoir avisé le maître d’ouvrage préalablement à l’exécution des travaux supplémentaires. 

 

De son côté et dans les quinze (15) jours qui suivent tout ordre de service ayant pour effet d’entraîner une modification de la masse des travaux, le maître d'ouvrage est dans l’obligation de faire part à l'entrepreneur de l'estimation prévisionnelle de cette modification.

 

En France, la réglementation prévoit un autre procédé connu sous la dénomination de marchés complémentaires.

 

« Les marchés complémentaires de fournitures, sont exécutés par le fournisseur initial et sont destinés soit au renouvellement partiel de fournitures ou d’installations d’usage courant, soit à l’extension d’installations existantes, lorsque le changement de fournisseur obligerait le pouvoir adjudicateur à acquérir un matériel de technique différente entraînant une incompatibilité avec le matériel déjà acquis ou des difficultés techniques d’utilisation et d’entretien disproportionnées. La durée de ces marchés complémentaires, périodes de reconduction comprises, ne peut dépasser trois ans. Le montant total du marché, livraisons complémentaires comprises, ne peut être égal ou supérieur aux seuils fixés au II de l’article 26, sauf si le marché a été passé initialement par appel d’offres et a fait l’objet d’un avis d’appel public à la concurrence publié au Journal officiel de l’Union européenne ;

 

Par contre , les marchés complémentaires de services ou de travaux consistent en des prestations qui ne figurent pas dans le marché initialement conclu mais qui sont devenues nécessaires, à la suite d’une circonstance imprévue, à l’exécution du service ou à la réalisation de l’ouvrage tel qu’il est décrit dans le marché initial, à condition que l’attribution soit faite à l’opérateur économique qui a exécuté ce service ou réalisé cet ouvrage :

 

a) Lorsque ces services ou travaux complémentaires ne peuvent être techniquement ou économiquement séparés du marché principal sans inconvénient majeur pour le pouvoir adjudicateur ;

 

b) Lorsque ces services ou travaux, quoiqu’ils soient séparables de l’exécution du marché initial, sont strictement nécessaires à son parfait achèvement.

Le montant cumulé de ces marchés complémentaires ne doit pas dépasser 50 % du montant du marché principal.

 

L’avenant doit être distingué des marchés complémentaires négociés sans publicité préalable et mise en concurrence (art. 35-II [4° et 5°] du code) qui sont des nouveaux marchés dont le montant cumulé ne doit pas dépasser 50 % du montant du marché initial. »[19]

 

En tout état de causes il est convenu que lorsque le volume des travaux supplémentaires dépasse la masse initiale, la conclusion d'un acte contractuel est obligatoire. La justification de ces actes contractuels n'est pas toujours aussi évidente qu'elle le semble à première vue car il arrive que ce procédé soit utilisé pour permettre à l'entreprise de verser des commissions conséquentes à l’acheteur.

 

  • Il peut advenir que l'estimation de la masse des prestations  ait été mal faite ou que des événements imprévisibles interviennent ou viennent à être connus en cours de chantier pour que l'on soit contraint de conclure un accord écrit modifiant le marché initial.

 

  • Il peut advenir que la conclusion de l'accord soit la conséquence d'une estimation volontairement sous-évaluée de certains postes de travaux ou d'une absence volontaire de prise en compte de l'intégration dans le site d'un ouvrage indispensable à la réalisation normale du projet ( accès, parking, espaces verts, anti-foudres, balisages etc..). Dans ce type de travaux, on se trouve, soit face à une nécessité technique imprévisible réelle, soit face à une étude dans laquelle certains éléments ont été volontairement mal calculés ou passés sous silence dans le but d’user d’une possibilité technique devant servir de motifs  pour le versement des commissions à l’acheteur .
  • Dans les deux cas, la poursuite des travaux s'effectue sans appel à la concurrence, au prix unitaire du marché pour l’ouvrage similaire qui figure sur le bordereau des prix unitaires du marché.
  • L’entrepreneur peut majorer substantiellement les prix unitaires des ouvrages sous évalués en proposant un prix très compétitif pour les autres ouvrages pour obtenir le marché tout en étant sûr de pouvoir reconstituer ses bénéfices et générer des profits sans grands risques.

 

Les « extensions » du contrat initial constituent une autre forme, malheureusement fréquente, des travaux supplémentaires. Dans ce cas, l’acheteur, satisfait de la qualité de la prestation fournie par l'entreprise, décide d'étendre sa mission pour d’autres projets non prévus initialement.

 

Cette pratique, habituelle chez certains décideurs, fausse les règles de la concurrence et elle est de plus en plus souvent condamnée par les autorités compétentes, lorsqu’ils arrivent à la détecter ! Beaucoup plus graves sont les travaux supplémentaires sans lien avec le marché proprement dit qui sont exigés par les décideurs et dont la prise en charge par l'entreprise n'est justifiée que par le simple fait qu'elle vient de se voir attribuer un (gros) contrat. Ils peuvent être réalisés au bénéfice de la collectivité (le goudronnage d'une place par exemple) mais peuvent aussi l'être au bénéfice personnel du décideur comme la construction d'une piscine privée, la restauration d'un bâtiment... Dans les deux cas ils impliquent l'existence de faux documents dans la comptabilité de l'entreprise.[20]

 

 

D’autres types de fraudes consistent également en la non réalisation de  travaux  prévus au cahier des charges, ou la modification de travaux  par rapport aux normes fixées par le  cahier des charges.

 

C’est ainsi que des travaux prévus avec des normes précises et parfois élevées sont, soit non réalisés, soit réalisés en se référant à des normes de moindre qualité, ce qui va permettre à l'entreprise de dégager des plus values importantes  reverser à l’acheteur en contre partie de l’attribution du marché. La complicité des services chargés du contrôle des travaux et de la certification du service fait est onéreuse puisque les travaux réalisés ne sont pas conformes de ceux prévus au contrat.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE 8.

La lutte contre les fraudes et la corruption

 

Il est malheureux de constater que les marchés publics peuvent être un champ fertile à la délinquance financière sous toutes ses formes, partout dans le monde jusqu’à tel point qu’aucun pays ne puisse se targuer d’en être exempt.

 

On dirait même que toutes les lois, toutes les réglementations, toutes les chartes de déontologie et de bonnes pratiques de gouvernance élaborées dans ce cadre n’ont eu pour effet que d’être violées et incitatrices à innover en matière fraude.

 

Pourquoi une telle fraude, pourquoi tant de connivences dans un secteur qui est pourtant encadré par une réglementation abondante ? Peut-on les détecter ? Peut-on les sanctionner efficacement ? Les réponses à ces questions sont loin d’être évidentes.

 

8.1 Les fraudes : pourquoi et comment ?

 

Avant de s’intéresser aux raisons qui pourraient justifier l’existence de la fraude et de la corruption dans les marchés publics, on peut, d'ores et déjà, rappeler un postulat qu’il ne faut jamais perdre de vue : la fraude est toujours lucrative.

 

8.1.1. La fraude : pourquoi ?

 

La tentation de frauder n’est jamais gratuite ou spontanée, elle émane le plus souvent d’une mûre réflexion sur le profit que le fraudeur peut en tirer et l’étendue des risques qu’il prend.

 

 

 

 

Les contrôles sont très utiles pour amoindrir l’ampleur de la fraude. En effet tant que le risque de se faire prendre est élevé, les cas de fraude seront moins nombreux, mais jamais inexistants.

 

Des motivations telle la survie d’un individu, d’une entreprise ou d'un groupe est tributaire de la fraude comme unique moyen utilisable, les tentatives auront lieu, quel que soit le risque couru, puisqu'il n'existe plus d'autre alternative.

 

La fraude et la corruption ne se pas uniquement motivés par l’équation probable d’être pris la main dans le sac et sanctionné en conséquence. la nature humaine peut, pour d’autres facteurs intrinsèques ou extrinsèques, présenter des prédispositions à être fraudeur et corrompu.

 

La perte des « valeurs » et le matérialisme qui caractérisent notre époque ont donné la priorité à la réussite individuelle par l'argent.

 

Une statistique américaine est, à ce sujet, particulièrement éloquente puisqu’elle concerne ceux qui devraient être parmi les plus intègres, les auditeurs chargés de l’audit des plus grandes entreprises. Sur 100 personnes, 20 sont toujours honnêtes, 20 systématiquement malhonnêtes et les 60 autres choisiront l’une ou l’autre de ces deux options en fonction de l’existence ou non de contrôles. [21]

 

Sanctionner les 20% qui sont malhonnêtes et prévenir les « dérives » des 60% qui n’ont pas encore choisi leur camp, tel est l’enjeu majeur de la gouvernance.

 

8.1.2. La fraude : comment ?

 

On ne peut pas frauder si on ignore deux types de lois au moins, celle qui va être violée et celle qui sanctionne la fraude.

 

Violer la loi requiert un savoir faire certain et beaucoup de discrétion, aussi bien sur le plan technique et réglementaire que sur le plan psychologique. Pour frauder sans se faire prendre, il faut maîtriser toutes les défaillances et les silences de la réglementation qui aisément être interprétés au profit du fraudeur ou de semer un doute déréglant la présomption de délit. Il faut également impliquer profondément ses complices de manière à ce qu’ils aient comme idée fixe d’être les principaux délinquants exposés aux graves sanctions assorties de circonstances aggravantes pour mieux s’assurer de leur silence et leur collaboration moins exigeante pour les futures fraudes.

 

Les complices peuvent être des collaborateurs, comme ils peuvent être des contrôleurs ou auditeurs qui vont même aider l’acheteur véreux à parfaire techniquement son délit et de le couvrir par leurs visas tant en amont de la fraude qu’en son aval.

 

La réglementation en matière de commande publique au Maroc offre d’énormes possibilité de fraude compte tenu qu’elle très éparses et non codifiée à tel point qu’il est parfois difficile de discerner quelle disposition est abrogée et quelle disposition est toujours en vigueur. Elle est également très changeante au niveau des règles de portée générales au niveau des modes de passation des marchés sans jamais faire l’objet de texte bien élaborés déterminant les procédures d’application de ces règles ni des acteurs identifiables en terme de responsabilités.

 

L’unique et seule instruction d’application des dispositions relatives à la passation des marchés remonte à 1965, celle des dépenses en régie à 1968 et puis plus rien sinon quelques circulaire plus vagues que les décrets.

 

Plusieurs lois sont conditionnés par des textes réglementaires pour leur application sont malheureusement appliquées aléatoirement sans que les textes réglementaires ne voient le jour (cas la loi 77.03 relative à la communication audiovisuelle très mal rédigée et pourtant votée)

 

 

Même en Europe, il est constaté que « les dix nouveaux États membres de l’Union n’ont, au mieux, que depuis quelques mois une législation homogène semblable à celle des autres membres de l’Union. Par contre, l’application de cette législation est encore très profondément hétérogène. Il est donc encore difficile de s’y retrouver. »[22]

 

 

8.1.3. Des systèmes de contrôle illusoire

 

Hormis les accords de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), de la Banque Mondiale, du Fonds Monétaire International, de la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD) ou de la Banque Asiatique , ou ceux relatifs au libre échange avec les USA ou l’Union Européenne dont certaines recommandations ou clauses sont reprises par les réglementations nationales , notamment en ce qui concerne la lutte contre la corruption ( souvent de manière absurde et très comique » et la bonne gouvernance.

 

 La volonté réelle d’un contrôle systématique devant aboutir automatiquement aux mêmes sanctions sans traitement sélectif des fraudeurs ou des actes frauduleux est quasiment illusoire pour ne pas dire absente.

 

Il faut noter par ailleurs que les organes de contrôle mis en place (audits internes, inspections des finances, cour des comptes, commissaires aux comptes, contrôleurs d’Etat,) ne communiquent pas du tout entre eux sous prétexte de secret professionnel et de l’incompatibilité de leurs structures de rattachement.

 

Ils cultivent même des relations de méfiance entre eux puisque certains ont tendance à croire qu’ils sont supérieurs aux autres et disposent du droit d’infirmer ou de confirmer leurs constats :

 

ORGANE DE CONTROLE

ORGANES DE CONTRE CONTROLE

AUDIT INTERNES (IGM)

C.E / IGF / CC

CONTROLEURS D’ETAT

IGF/CC/ TF

INSPECTIONS DES FINANCES (IGF)

CC/TF

COURS DES COMPTES

TF

TRIBUNAUX FINANCIERS

COURS DE CASSATION

 

 En fait, pour que toute gouvernance soit fiable, et toute lutte contre la corruption et la fraude soit fructueuse, les mentalités régissant ces organes de contrôle doivent évoluer vers un niveau de collaboration et complémentarité.

 

8.1.4. Sanctions sélectives et ouvertement dénoncées

 

Outre le fait que de nombreux États, notamment en Afrique, ont adopté des modes de gestion plus ou moins modernes de gestion efficaces en apparence, l’absence de systèmes des sanctions correspondantes ajoutée à la défaillance de certains outils de gestion (systèmes d’information non probants, organigramme taillés aux têtes des pistonnés, etc. ...) rendent tout le système de gestion favorable à la fraude.

 

 Dans les marchés publics, la plus grave sanction consiste souvent en l’annulation du contrat en cours (lorsque la réalisation n’est pas trop avancée) et à l’obligation de procéder à une nouvelle consultation.

 

En termes de corruption, les preuves difficiles à établir ainsi que la crainte de scandales facilement médiatisés militent pour la sanction ci-dessous et n’entraine pas de sanctions pénales sauf lorsqu’il s’agit de campagne politique d’assainissement et de règlement de comptes entre protagonistes politiques.

 

« Cette absence de sanctions à l'encontre des corrupteurs ou des corrompus est à l'origine du discrédit d'une partie des populations vis-à-vis de leurs élites nationales. »[23] et anime toute opposition parlementaire pour des objectifs électoraux tant bien même que certains de ses militants ou dirigeant sont très impliqués dans les scandales dénoncés.

 

« Ce relatif « laxisme » de la Justice vis-à-vis de la délinquance « en col blanc » doit être rapproché de la sévérité qu’elle montre souvent vis-à-vis des petites gens qui, pour le non-remboursement d'une somme relativement faible et à la suite de circonstances exceptionnelles comme le chômage, risquent la prison ou la perte de la totalité de leur petit patrimoine. »[24]

 

 

 

8.1.6. Le « whistleblowing »

 

Il s’agit là d’un système purement anglo-saxon de lutte contre la corruption et la fraude qui a été dépoussiéré suite à la faillite de l’entreprise ENRON, qui  est essentiellement due à une faillite des systèmes classiques de contrôle et à une accumulation de conflits d’intérêts.

 

Dans ce système, les employés assument le devoir de dénoncer toute tentative de corruption ou de fraude qui éveille en eux des doutes, donnant ainsi le signal d’alarme qui mettre les organes de contrôle en alerte.

 

Pourtant la généralisation du système à toutes les entreprises américaines par la loi Sarbannes-Oxley de juillet 2002, est loin d’être « la » solution miracle pour tous les problèmes inhérent aux dérives des managers.

 

8.2 Les préalables d’usage à toute enquête

 

8.2 Etayer les « soupçons » avant de lancer les enquêtes

 

La lutte et la prévention de la corruption dans les marchés publics ne sont pas choses aisées à mettre en œuvre. Pour pouvoir sanctionner, il faut prouver l’existence d’une ou de plusieurs infractions pénales.

 

Mais, la recherche et la découverte des preuves prennent beaucoup de temps, beaucoup trop de temps pour que l’on puisse utiliser, pour vérifier chaque contrat, les méthodes qui permettent de trouver, presque à tous les coups, la preuve de l’infraction éventuelle. En outre, parmi la multitude des contrats ou de marchés passés par des pouvoirs adjudicateurs, seule une petite quantité est passée en toute illégalité.

 

Encore faut-il préciser que l’essentiel de ces irrégularités n’est pas volontaire. C’est la raison pour laquelle les méthodes « lourdes » de détection de la fraude ne sont que rarement mises en œuvre par les organismes de contrôle. Ils se contentent de les appliquer aux marchés qui leur semblent « suspects » ou à ceux sur la passation desquels ils ont reçu « des informations ». L’objectif que l’on doit alors se fixer consiste à mettre en place des batteries d’indicateurs permettant de faire naître ou de renforcer des soupçons sur telle ou telle opération. C’est seulement lorsque plusieurs « clignotants » se seront allumés que l’on se lancera dans des investigations poussées.

 

8.2.1. Les indicateurs

 

 

Plusieurs indicateurs, une fois recoupés et minutieusement analysés peuvent permettre de déceler une anomalie au niveau de l’attribution des marchés publics.

 

Parmi ces indicateurs le plus souvent utilisés par les auditeurs dans leurs investigations on peut citer :

 

 

  • Fréquence  en volume et en valeur des marchés attribués à une entreprise ou un fournisseur donné. cet indicateur peut étayer le soupçon de favoritisme profitable au fournisseur et à l’acheteur en même temps car cette fréquence peut dans la majorité des cas déboucher sur un copinage illicite entre les deux protagonistes.

 

  • Liste des entreprises remettant systématiquement une offre non retenue par la commission de dépouillement des offres pour offres excessives et non-conformité aux spécifications du CPS  et que l’on voit apparaître comme sous-traitant  dans la phase exécutoire du marché attribué à un concurrent dont l’offre est plus avantageuse d’où un soupçon d’entente tendant à donner un aspect légal à l’attribution du marchés sous couvert d’une fausse concurrence ;

 

  • Fréquence des procédures d’appel d’offres ouvert ou restreint déclarées infructueuses découlant systématiquement sur la conclusion de marchés négociés, d’où le soupçon de favoritisme et de détournement de procédure lorsque les motifs justifiant la déclaration de la procédure concurrentielle infructueuse sont délibérément introduits par l’acheteur dans le cahier des charges ou le règlement de consultation ( valeur disproportionnée des cautionnements provisoires ou délais d’exécution très courts et assortis de mesures coercitives draconiennes en cas de retard et d’une définition très retreinte de la force majeure.

 

  • Allongement anormal des délais entre la désignation du titulaire du contrat et la signature de l’ordre de service  pouvant être interprété comme tentative de  corruption sous couvert d’un abus de pouvoir d’apparence légale mais nullement justifié ; ( 90 jours avec rallongement dont le refus qui peut être opposé par le titulaire du marché conduit automatiquement à la résiliation du projet de marché ) Ce délai peut être également  mis à profit par l’entreprise pour trouver des sources d’approvisionnement pour des  postes sur lesquels elle pourra jouer  pour trouver l’argent exigé par l’acheteur après attribution du contrat.

 

  • Existence de liens entre l’acheteur (ou une personne de son service) avec le titulaire du marché (soupçon de prise illégale d’intérêt)…

 

 

 

8.2.2. L’audit interne

 

L’audit des marchés publics est une obligation réglementaire :

En effet, le décret du 5 février 2007 relatif aux marchés publics dispose dans son article 92 (Contrôle et audit internes) que « Les marchés et leurs avenants sont soumis, en dehors des contrôles institués par les textes généraux en matière de dépenses publiques, à des contrôles et audits internes définis par décisions du ministre concerné. Ces contrôles et audits internes peuvent porter sur la préparation, la passation et l'exécution des marchés.

Les contrôles et audits sont obligatoires pour les marchés dont les montants excèdent cinq millions (5.000.000) de dirhams et doivent faire l'objet d'un rapport adressé au ministre concerné.

Toutefois, les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux marchés de l'administration de la défense nationale. »

 

Il ressort de ces dispositions que l’audit n’est en réalité qu’une façade décorative sans aucune incidence sur la bonne gouvernance des achats publics et ce pour les raisons suivante :

 

         L’étendue de l’audit est très restreinte, elle ne concerne que les marchés qui dépassent 5.000.000 dhs, ce qui peut avoir pour effet l’émiettement des projets et leur fractionnement par des recours infondés aux allotissements,

         La fonction d’audit n’est pas suffisamment réglementé pour être opposable aux ordonnateurs du moment que ces derniers, qui doivent être en principe audités, ont la compétence de statuer sur la teneur et la fonction de l’audit par voie de décisions,

         Les rapports d’audits sont exclusivement adressés aux ministres qui sont en mêmes temps ordonnateurs responsables de leur gestion, auditée, aux yeux de la loi, notamment le code des juridictions financières.

 

Il est bien évident qu’une telle conception de l’audit ne peut conduire à aucune sanction en cas de fraude même évidente ? Seul l’audit externe non mandaté par l’ordonnateur d’une part et relevant d’une institution séparée constitutionnellement du Gouvernement peut le faire (tribunaux financiers, cours des comptes).

 

Par ailleurs, aucune disposition de ce texte ne confère à ce type d’audit aucun caractère préventif puisqu’il n’intervient qu’après achèvement de l’exécution du marché.

 

Il est donc loin d’aider à identifier certains facteurs de risques inhérents à l’organisation elle-même susceptibles de mettre en cause l’objectivité indispensable dans l’attribution des contrats publics. Ou de mettre en lumière les points forts et les points faibles de la gestion des achats.

 

Cependant, cet audit interne permet, tout de même, d’élaborer une « cartographie des risques » susceptible

 

         D’isoler es activités à risque (élaboration du cahier des charges, par exemple), les personnes à risques (les techniciens, le décideur, le responsable des services techniques, par exemple)

         D’identifier les mesures qui ont été prises pour échapper aux contrôles (absence de contrôle interne sur tous les contrats inférieurs à certains seuils, par exemple),

         Et celles qui sont en place par habitude (contrôle purement formel du marché par la cellule juridique, le contrôle du respect des procédures étant à la charge du bureau d’étude qui lance le marché)

         Et enfin les mesures qui conduisent, en fait, à donner, à certaines personnes, des pouvoirs excédant leurs compétences (tel technicien qui a conçu le projet est chargé également du contrôle de la procédure d’attribution du contrat et de son exécution, alors que son chef de service devrait surveiller le respect des procédures d’attribution et que le responsable territorial devrait vérifier la bonne exécution des prestations prévues).

 

Le problème de l’indépendance des auditeurs consacré par le texte fait que l’audit interne et la cartographie des risques ne peuvent être que pris en compte pour améliorer le processus existant sans jamais déboucher sur des enquêtes plus poussées en cas de soupçon. En effet, le contrôle interne rend compte au responsable de l’entité adjudicatrice qui n’a (peut-être) aucun intérêt à rendre la passation des marchés plus transparente et les mesures qu’il propose peuvent rester lettre morte si le chef de l’entité n’a pas la ferme volonté des les appliquer.

 

8.3 L’obtention des preuves

 

Suivre les procédures pas à pas en s’attachant à vérifier les liens de ceux qui les suggèrent ou les mettent en place avec ceux qui obtiennent les marchés, et cela, à toutes les étapes de la procédure, telle doit être la méthode de l’enquêteur. Les exemples fournis, ci-après, permettront de donner un aperçu des recherches à effectuer pour obtenir des preuves utilisables devant les juridictions.

 

 

 

8.3.1. La procédure

 

Les procédures réglementaires de lancement des marchés sont généralement mal appréciées par les acheteurs publics qui les considèrent très complexes, lourdes et dénuées de toute valeur ajoutée sans parler du sentiment de dégradation qu’elle doivent faire germer dans leurs subconscient notamment le manque de confiance vis-à-vis de leur intégrité officialisée par le Législateur et adopté comme principe de base par les auditeurs.

 

 En conséquence , on peut dire que parmi les infractions couramment rencontrées en matière de commande publique, la plus habituelle, sinon la plus fréquente, consiste à tout mettre en œuvre pour éviter d’appliquer la réglementation applicable aux marchés publics ou trouver les moyens susceptibles de faciliter son détournement.

 

Les techniques les plus utilisées dans ce cadre sont  le fractionnement des projets pouvant justifier le non recours  à l’appel à la concurrence, ou la définition fausse de la complexité des besoins à satisfaire en vue de mettre en œuvre les procédures restreintes d’appel à la concurrence ou celle des marchés négociés.

 

Dans ces cas, l’étayement des soupçons par l’auditeur sont très simples, il suffit de regrouper tous les marchés et bons de commande portant sur des besoins de même nature et de faire abstraction des bénéficiaires ou des destinations ayant servi comme motif visant la justification du fractionnement, pour mettre en évidence l’infraction de détournement  de procédure et de non application délibérée de la procédure  d’appel public à la concurrence.

 

L’auditeur peut pousser très loin ses investigation en focalisant ses recherches, notamment lorsqu’il s’agit de marchés négociés ou issus d’appels d’offres restreints sur les éventuels liens qui peuvent être entretenus entre les personnes suivantes :

 

  • La personne qui est à l’origine de l’expression du besoin,
  • La personne ayant dressé le marché,
  • La personne ayant approuvé le marché
  • La personne chargée de la gestion administrative et du suivi du marché,
  • La personne désignée pour suivre l’exécution physique du marché,
  • Le titulaire du marché.
  • Les concurrents ayant participé à la procédure restreinte et leur lien avec le titulaire du marché,

 

Dans le cas où les liens qui puissent exister entre ces différentes personnes soit directement, soit de manière interposée puis qu’il peut s’avérer qu’un des concurrents évincés est le véritable profiteur de l’infraction les investigations des enquêteurs peuvent être poursuivies par l’examen des comptes bancaires des intéressés.

 

En conclusion, si l’infraction en tant que telle est facilement décelable, le délit de corruption est très difficile à démontrer et demande des investigations financières plus précises.

 

 

 

8.3.2. La définition des besoins :

 

Le projet de décret marocain relatif aux marchés publics met un accent très particulier sur la phase d’expression et de définition des besoins qu’on peut résumer ainsi :

 

 

a)    Les prestations qui font l'objet des marchés doivent répondre exclusivement à la nature et à l'étendue des besoins à satisfaire :

 

Le texte oblige le maître d’ouvrage  avant tout appel à déterminer aussi exactement que possible les spécifications techniques qui doivent être décrites dans toute la mesure du possible en termes de performances, et la consistance des prestations qui doivent être définies en donnant la priorité aux normes marocaines homologuées ou, à défaut, à des normes internationales.

 

b)    Le maître d’ouvrage n’a plus la possibilité d’utiliser des définitions vagues telle « y compris toutes autres sujétions ». Et ce afin d’éviter toute interprétation subjective et non fondée desdites sujétions dans le but d’avantager un concurrent au détriment des autres.

 

Il en est de même pour ce qui est de faire référence à une marque commerciale,  une référence précise, une appellation, un brevet, une conception particulière, un type ou l’origine des équipements ou des prestations dont l’acquisition est envisagée qui doit être évitée sauf s'il s’avère qu’aucun autre moyen suffisamment précis et intelligible de décrire les caractéristiques des travaux, des fournitures ou des services requis et à condition que l'appellation utilisée soit suivie des termes "ou son équivalent".

 

c)     Le maître d'ouvrage est également tenu d'établir, avant tout appel à la concurrence ou toute négociation, une estimation des coûts des prestations à réaliser sur la base de la définition et de la consistance des prestations objet du marché et des prix pratiqués sur le marché en tenant compte de toutes les considérations et sujétions concernant notamment les conditions et le délai d'exécution. Cette estimation est établie en fonction, le cas échéant, des modalités d'allotissement des prestations retenues par le maître d'ouvrage conformément aux dispositions de l'article 9 ci-dessous.

 

Ladite estimation, établie sur la base de l'estimation des différents prix contenus dans le bordereau des prix, est consignée sur un support écrit et signé par le maître d'ouvrage et doit rester confidentielle jusqu’à la séance d’ouverture des plis.

 

Ces obligations, sont elles suffisantes pour décourager toute tentation de fraude ou de corruption ? Certes non et pour cause :

 

Tout en respectant le formalisme de ces obligations, l’acheteur véreux peut jouer sur leur fond de façon à favoriser des concurrents et fausser la concurrence. Parmi les techniques utilisées dans ce cadre, l’une des méthodes les plus simples va consister à fausser l’étendue des besoins à satisfaire en procédant au lancement de projets inutiles ou plus importants que prévu puisque le texte en question n’oblige pas l’acheteur à produire en documents annexes au dossier de l’appel d’offres des rapports justificatifs qui  permettent de connaître les raisons avancées par l’initiation du projet.

 

Outre la mise en évidence de la fausse étendue des besoins, l’auditeur devra vérifier que les solutions retenues par l’acheteur n’ont pas d’alternatives moins onéreuses qu’elles sont plus avantageuses pour l’entité. C’est le cas par exemple de la mise en réforme d’un équipement qui n’exige que de simples réparation et d’opter pour son remplacement par un nouvel équipement plus coûteux et favorisant des malversations profitables à l’acheteur.

 

Du côté du Fournisseur, l’Auditeur doit élargir ses investigations à sa la politique commerciale pour s’assurer qu’il ne pratique pas une politique d’intéressement des acheteurs (remises, ristournes, cadeaux, voyages…).

 

Un autre procédé de fraude peut également porter sur l’oubli délibéré des prestations indispensables  en vue de créer pour le titulaire du marché des opportunités pour des avenants ultérieurs indispensables qui seront payés au prix fort  moyennant corruption de l’acheteur ou maquillant tout simplement des détournements de fonds publics.

 

La validation des besoins tels que défini par l’initiateur du projet doit également faire l’objet d’investigations de la part de l’Auditeur. , en effet,  Il faut bannir la situation de  décideur unique qui détermine et valide les besoins, sans aucune consultation interne ou externe. Or, le texte est également muet à ce sujet d’où la possibilité très évidente de détournement de fonds et de procédures.

 

L’existence d’un système de validation indépendant du décideur peut, sauf complicité délictuelle, aider à éviter toute tentation de fraude.

 

La mise en place d’un tel mécanisme figure dans le nouveau code des marchés publics français qui reprend les recommandations des directives européennes, tout contrôleur devrait donc vérifier qu’un tel mécanisme a été mis en place et qu’il fonctionne correctement, car son absence est un indicateur de l’augmentation des risques de fraude.

 

8.3.3. La rédaction du cahier des charges

 

Les clauses d’un CPS qui deviendront contractuelles et obligeantes une fois le marché conclu et approuvé offre plusieurs opportunités de fraudes soigneusement pré élaborées et légalement validées.

 

En effet, c’est au moment de leur rédaction que l’acheteur véreux peut facilement et discrètement mettre en place des éléments qui permettront de favoriser une entreprise par rapport aux autres concurrents. Les moyens sont nombreux et difficiles à identifier clairement.

 

il peut jouer sur la définition des spécifications techniques d’une prestation en les orientant soit dans le sens de favoriser le vendeur d’un équipement déterminé sans risque de tomber sur autre entièrement équivalent, soit dans sens de faire de l’appel à la concurrence une procédure infructueuse et passer en toute régularité à la procédure négociée.

 

En cas de doute, l’auditeur devra s’assurer que justifications avancées par l’acheteur  (qui figurent soit dans le rapport de présentation du marché à l’autorité chargé de son approbation, soit dans un certificat administratif justifiant le recours au marché négocié) sont plausibles en faisant appel à un consultant extérieur. Il se rapprochera aussi de l’acheteur lui même afin de savoir si ces définitions ne lui ont pas été imposées, ce qui permettrait de faire porter les soupçons de conflit d’intérêt sur sa hiérarchie.

 

 

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8.3.4. Les mécanismes de la consultation

 

L’auditeur doit accorder une attention particulière au choix des procédures par l’acheteur public car il peut s’avérer être l’un des moyens utilisés pour favoriser une entreprise.

 

En effet, deux cas sont à étudier plus particulièrement à savoir l’appel d’offres ouvert rendu infructueux et l’appel d’offres restreint :

 

L’appel d’offres infructueux est souvent le chemin le plus court, le plus légal et le plus transparent aux des textes réglementaires pour recourir librement à la procédure de marché négocié.

 

Quant à l’appel d’offres restreint, il s’apparente entièrement à la procédure négociée maquillé par une concurrence qui est souvent faussé par le choix limité du concurrent laissé totalement à la discrétion absolue de l’acheteur public.

 

D(autre procédé sont également mis en œuvre pour frauder au niveau de la procédure , il s’agit du recours abusif et difficilement justifié à la procédure d’appel à la concurrence dite urgence assortie de délais de publicité très réduits et disproportionné par rapport à ceux nécessaires normalement pour l’élaboration d’une offre techniquement et financièrement probante et sérieuse. Cette technique est souvent précédée par un délit d’initié qui va permettre à l’entreprise bénéficiaire de favoritisme de préparer son offre bien avant le lancement de la procédure.

 

Un autre procédé consiste également à exiger au niveau des pièces constitutives des dossiers administratif et techniques des pièces ou des garanties financière exorbitantes décourageant les concurrents douteux quant à la sincérité de la procédure. (Valeur très élevée des travaux réalisés et nature spécifique desdits travaux pour les attestations de références, chiffre d’affaire élevé, cautionnement disproportionné par rapport à l’estimation du marché, moyens humains et techniques très onéreux et très spécifiques, etc…)

 

 

 

8.3.5. Le dépouillement des offres et choix du titulaire

 

Lors de la sélection du titulaire du marché, les membres de la commission d’appel d’offres sont susceptibles d’utiliser des procédés illicites, voire illégaux, pour permettre à leur favori d’obtenir le contrat. Ces procédés dont l’objectif est le favoritisme, les mettent en cause personnellement car ce sont eux qui vont commettre des irrégularités. Le fait que, dans de nombreux pays dont la France, les séances d’ouverture des plis et d’attribution des contrats ne sont pas publiques et les membres des commissions peu nombreux, favorise ces « arrangements entre amis ». Substitution de documents, exclusion d’entreprises qualifiées, offres incomplètes retenues, utilisation abusive des critères de sélection, utilisation de critères différents de ceux qui étaient annoncés, divulgation d’informations avant la négociation… tous ces procédés ont été et sont encore utilisés. La réunion étant confidentielle, seul son compte rendu est disponible pour l’enquêteur. Il lui est donc très difficile de prouver l’existence de ces manipulations. Sa seule source fiable est donc le compte client de l’entreprise retenue dans lequel il peut trouver trace de promesses de cadeaux en cas de décision favorable.

 

Dans un tout autre domaine, l’enquêteur pourra suspecter une entente entre les candidats dans les cas où un grand nombre d’entreprise réclame un dossier de consultation et seul un très petit nombre remet une offre. Ce risque d’entente existe aussi chaque fois que, notamment dans un appel d’offres restreint, on se trouve face à un nombre limité de candidats, toujours les mêmes. Dans ces deux cas des investigations dans l’entreprise pourront, éventuellement, permettre de découvrir des preuves de cette collusion.

 

8.3.6. Dérives inhérentes à la phase de réalisation

 

La phase de réalisation des travaux ou des prestations est celle où se produisent la plupart des «dérives ».

 

Elles sont dues, soit à la volonté de l’entreprise de profiter de ce marché pour en tirer le maximum de profit, soit à la nécessité, pour elle de trouver dans une réalisation « allégée » les moyens « d’économiser » les sommes nécessaires pour payer (corruption) le donneur d’ordre ou celui qui lui a fait obtenir le contrat.

Pour les enquêteurs, cette phase de l’opération ne nécessite pas d’investigations particulièrement difficiles : on est sorti de la procédure des marchés publics et l’on se trouve en terrain connu. Ce terrain est d’autant mieux connu que les fraudes, aussi nombreuses et variées soient-elles, nécessitent toujours la complicité d’un tiers. Pendant la phase de réalisation du marché, les fraudes consistent, en effet, à faire certifier comme conformes au cahier des charges, des prestations qui ne le sont pas ou ne le sont que partiellement. Ainsi, dans les marchés à prix global, l’effort portera sur la réduction des prestations alors que dans les marchés à prix unitaires il faudra majorer les quantités. Le rôle du contrôleur est donc fondamental car c’est lui qui certifie la conformité des prestations effectuées. Il met ainsi en jeu sa responsabilité personnelle, ce qui en fait le maillon faible de l’opération. La difficulté à laquelle sont confrontés les enquêteurs est donc, non pas de découvrir l’auteur de la fraude, mais plutôt quelle fraude a été commise.

 

Absence de contrôle des travaux ou des livraisons, absence de contrôle de la qualité, absence d’assurance qualité, contrôleurs intéressés à l’augmentation du montant des travaux, contrôleurs intéressés à la réduction des prestations, absence de contrôle des dépenses… dans tous les cas, le contrôleur engage sa responsabilité en signant des documents partiellement ou totalement faux. La meilleure façon de limiter les risques consiste alors à mettre en place des procédures de contrôle externe, encore faut-il que ce contrôle externe ne soit pas réalisé par un organisme lié à l’entreprise qui réalise les travaux, ce qu’il convient de vérifier systématiquement si l’on est amené à enquêter sur d’éventuelles irrégularités commises lors des contrôles du service fait.

 

8.3.7. Avenants et litiges

 

C’est très souvent lors de la réalisation de la prestation que des avenants au projet initial sont présentés et que des litiges interviennent entre le pouvoir adjudicateur et l’entreprise. Les avenants sont l’un des moyens habituellement utilisé pour augmenter le montant ou le volume des travaux. Ils doivent, en principe, être justifiés par des circonstances exceptionnelles. C’est toujours ce point fondamental qui doit être vérifié, peu importe donc que le montant de l’avenant soit élevé ou non40. La seconde remarque concernant les avenants est qu’il est souvent important de savoir qui du maître d’ouvrage ou de l’entreprise est à l’origine de la demande. En effet, il n’est pas inintéressant de savoir si ce surcoût est dû à une imprévision réelle, à une modification du projet initial ou à l’ajout de nouvelles prestations non prévues au départ.

 

Le cas le plus susceptible de contenir des éléments frauduleux est celui des avenants particuliers que l’on appelle des « ordres de service ». Si, pour un travail donné, la quantité initiale a été mal calculée, l’entreprise est obligée de poursuivre ce travail au delà des quantités prévues pour exécuter l’ouvrage.

 

L’autorisation de poursuivre donnée par le maître d’ouvrage s’appelle un « ordre de service ». Chaque fois que l’on est confronté à ce genre de situation, il convient de s’intéresser, d’une part aux justifications apportées et, d’autre part, au prix de ces prestations supplémentaires. Si les prix (on utilise habituellement ceux qui figurent dans le bordereau des prix remis par l’entreprise) s’écartent sensiblement des prix habituellement pratiqués, il est fort possible que l’on se trouve dans l’un des cas de favoritisme évoqués plus haut : l’entreprise a été informée que les quantités indiquées au cahier des charges avaient été minorées par rapport à la réalité. Elle a majoré son prix unitaire sur ce poste tout en présentant une offre globale moins chère que ses concurrents. Elle a donc pu ainsi obtenir le marché en sachant qu’elle retrouverait sa marge grâce à un avenant obligatoire.

 

Dans ces deux catégories d’avenants et dans les réclamations que l’entreprise adresse au maître d’ouvrage, la recherche de l’intention frauduleuse peut se manifester quelques fois par une inaction du maître d’ouvrage. Si les estimations du volume des travaux ont été mal faites, si des prestations indispensables ont été omises, la faute n’en incombe généralement pas au maître d’ouvrage mais au maître d’œuvre, au bureau d’études, au contrôleur technique… Or, dans la plupart des cas, aucune sanction n’est prise contre ces acteurs. Au contraire, leur rémunération étant proportionnelle au montant des travaux, les fautes qu’ils ont commises leur procurent des revenus supplémentaires. L’une des conclusions que l’on peut en tirer est que, pour le moins, il existe une complicité, sinon une collusion entre eux et le maître d’ouvrage. Toute enquête sur des fraudes se devra d’explorer cette particularité.

 

40 La limite de 5% de la valeur du contrat fixée par la réglementation française apparaît comme totalement arbitraire et inadaptée puisque des avenants d’un pourcentage beaucoup plus élevés peuvent être parfaitement justifiés alors que ceux qui sont inférieurs à 5% ne le sont presque jamais dans la mesure où les prix proposés par les entreprises contiennent presque toujours une rubrique appelée « imprévus et divers » qui est généralement de l’ordre de 5%.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE 9  LA PREVENTION

 

 

  1. I.                   LA DEMARCHE UNION EUROPEENNE

 

 

Les marchés publics ont toujours constitué un terrain favorable à la corruption.[25]

 

1) D’une part, ils offrent pour bon nombre d'entreprises des possibilités d'activité considérables. Ils représentent globalement des taux assez substantiels des PIB de l'Union européenne. Cette importance fait des marchés publics  l’élément vital des entreprises qui n’hésitent pas à déployer tous les moyens, mêmes les plus illégaux pour les gagner.

 

2) la nature des les liens les fonctionnaires aux administrations et entreprises publiques qui diffèrent totalement de ceux des entreprises privées, souvent marqué par des préjugés d’injustice, de faibles motivations et d’ingratitude, font que les fonctionnaires sont plus vulnérable aux tentations de la corruption qu’ils se justifient le plus souvent par le postulat selon lequel il ne faut jamais rater sa chance quant elle se présente et qu’il faut assurer ses vieux jours et l’avenir de ses enfants. Les écarts abominables entre les salaires et les pensions de retraites ne font qu’aggraver la situation.

 

Par ailleurs, il est estimé dans le contexte européen en particulier que « dans une collectivité publique,  le risque de dissociation entre l'intérêt des dirigeants et celui de la collectivité soit plus grand. D'une part, il ne peut y avoir exacte coïncidence des deux puisque les dirigeants ne sont évidemment jamais en situation de propriétaires. D'autre part, le pouvoir de décision est sans doute plus concentré et moins contrôlé que dans l'entreprise, surtout lorsqu'il s'agit de collectivités locales: régions, municipalités. Enfin, les décideurs publics peuvent être considérés comme plus vulnérables aux tentations parce que leur situation financière est modeste (comparée à celle des chefs d'entreprise) et que ce sont souvent des hommes politiques qui ont des besoins d'argent importants parfois pour leur train de vie personnel et les dépenses que nécessitent leur carrière, plus souvent pour contribuer au financement du parti auquel ils appartiennent. »[26]

 

 

Il convient également de préciser  que le Conseil de l'Europe  a consacré au phénomène de la corruption une bonne part de sa "conférence européenne des services spécialisés dans la lutte contre la corruption" qui s'est tenue à Tallinn à la fin d'octobre 1997. Le rôle le plus important dans la lutte contre la corruption a été rattaché en premier aux textes législatifs communautaires  régissant les marchés publics sans pour autant dessaisir les Etats membres des compétences et des instruments de la lutte et de la sanction.

 

 

A. Possibilités et usage du droit communautaire

 

I. La dimension "anticorruption" du droit communautaire des marchés publics

 

La législation communautaire ne comporte pas de dispositions explicites de lutte contre la corruption qui relèvent du droit pénal qui demeurent de la compétence exclusive des États membres. Mais elle peut indirectement contribuer à cette lutte.

 

1. Les dispositions pertinentes

 

a)     Il y a d'abord les dispositions qui fixent des critères d’accès aux marchés  publics concernant surtout l’honorabilité des candidats  . Comme le rappelle la communication précitée de la Commission "Sur une politique anticorruption de l'Union", les différentes directives sectorielles (travaux, fournitures, services) prévoient que les législations nationales peuvent exclure de la participation aux marchés les entreprises: qui ont fait l'objet d'une condamnation pour une infraction à la moralité professionnelle ou qui ont commis une faute professionnelle grave.

 

b) Les obligations imposées aux adjudicateurs peuvent elles aussi contribuer à réduire le terrain favorable aux entreprises de corruption. Les principales en sont:

 

  • Le recours, en règle générale, à l'appel d'offres comme procédure de passation, la procédure négociée (ou marché de gré à gré) étant l'exception;
  • La publication des avis de marchés au Journal officiel des Communautés européennes;
  • l'attribution du marché au prix le plus bas ou à l'offre la plus avantageuse économiquement;
  • la conclusion du marché, la rédaction d'un procès-verbal comportant des informations minimales, la publication au Journal officiel d'un résumé des conditions dans lesquelles le marché a été attribué,
  • la notification à tout candidat écarté des motifs du rejet.

 

c)Enfin, les dispositions relatives aux recours peuvent aussi jouer leur rôle. C'est ainsi que les directives 85/665 du 21 décembre 1989 (régime général) et 92/13 du 25 février 1992 (régime propre aux secteurs de service public) imposent aux États membres de prévoir des procédures de recours efficaces et rapides contre les décisions d'attribution de marchés jugées dommageables par un candidat. Certes ces voies de recours visent d'abord des violations des règles communautaires mais, à ce titre, elles peuvent servir de point de départ à la détection et à la poursuite de phénomènes de corruption.

 

2. Les faiblesses de ces dispositions

 

La législation communautaire est d'abord insuffisante par son champ d'application. Elle ne s'applique qu'aux marchés supérieurs à certains seuils et ceux-ci sont très élevés. Elle exclut les marchés de l'armement qui forment un secteur considérable. Elle ne couvre pas non plus, par définition les contrats ou délégations de service public, c'est-à-dire les actes par lesquels les autorités publiques (État, collectivités locales...) confient à des entreprises (publiques ou privées) le soin d'assurer la délivrance d'un service d'intérêt général (fourniture d'électricité, de gaz, d'eau; services de chemin de fer, transports urbains, services postaux, télécommunications). Ces actes ne sont pas des marchés publics et on considère traditionnellement qu'ils ne doivent pas être soumis aux règles qui, pour les marchés publics, limitent strictement la liberté de l'administration dans le choix de son cocontractant: obligation de faire appel à la concurrence (publicité) et de choisir l'offre financièrement la plus avantageuse. On estime au contraire que s'agissant non de l'acquisition de biens et de services pour le fonctionnement de l'administration (ce qui est l'objet des marchés publics) mais de faire fonctionner des services essentiels pour le public, l'autorité publique doit disposer de la plus grande liberté possible pour choisir ses partenaires.

 

La législation communautaire a suivi cette tradition, avec une exception toutefois: les concessions de travaux publics. Ces concessions sont distinctes des marchés publics de travaux par lesquels les collectivités publiques font construire des bâtiments et autres ouvrages auxquels n'est pas attaché le fonctionnement d'un service public. Les concessions de travaux publics ont pour objet de confier à des entreprises non seulement la réalisation d'un ouvrage public mais aussi son exploitation qui consiste bien souvent à assurer un service public: par exemple une autoroute, un pont ou un tunnel que l'entreprise fera fonctionner au service du public et dont les revenus, perçus sur ce public (péages), lui permettront de se rémunérer. Malgré cette différence de nature, la législation communautaire sur les marchés publics de travaux (directive 71/305 du 26 juillet 1971) fait une place aux concessions de travaux publics. Celles-ci sont soumises à deux obligations de publicité: publication au Journal officiel des Communautés européennes d'un avis manifestant l'intention de conclure une concession; délai de 52 jours au moins entre l'envoi de cet avis et la date limite de présentation des candidatures.

 

C'est évidemment très peu contraignant comparé aux obligations d'appel d'offres et d'attribution au mieux-disant en vigueur pour les marchés publics et cela ne touche qu'un aspect des délégations de service public: les concessions et affermages de services publics, notamment, ne sont pas touchées. Or, l'attribution de ces délégations est un terrain d'élection pour la corruption, on en a eu la démonstration par des affaires spectaculaires dans plusieurs États membres.

 

A ces déficiences de la législation communautaire elle-même, il faut ajouter les carences dans sa transposition par les États membres (seuls trois d'entre eux ont transposé toutes les directives) et dans son application.

 

La Commission est d'ailleurs bien consciente de toutes ces déficiences et, en particulier dans son livre vert du 27 novembre 1996 ("Les marchés publics dans l'Union européenne: pistes de réflexion pour l'avenir"), a envisagé comme principaux remèdes:

 

  • Un abaissement des seuils d'applicabilité,
  • Un effort accru de transposition,
  • La surveillance de l'application.

 

II. L'action anticorruption de la Communauté

 

Comme on l'a rappelé plus haut, faute de compétence pénale, l'Union européenne ne peut assurer elle-même les aspects répressifs de la lutte contre la corruption. Mais elle a pu mettre en place des mécanismes d'intervention indirecte, en particulier dans le secteur des marchés publics.

 

1) En 1988, la Commission a créé en son sein une unité de coordination de la lutte antifraude (UCLAF). Certes, cette unité, qui s'est développée jusqu'à comprendre actuellement 125 personnes, ne peut agir de manière totalement autonome faute notamment de disposer de pouvoirs d'ordre policier ou judiciaire. Les compétences à cet égard demeurent entre les mains des États membres. Mais l'UCLAF peut mener des investigations complémentaires de celles des autorités nationales soit à la demande de celles-ci, soit de sa propre initiative.

 

2) Le livre vert de la Commission sur les marchés publics (27 novembre 1996) relève que les procédures de passation équitables et transparentes et les possibilités de recours juridictionnels prévus par la législation communautaire sur les marchés publics limitent les risques de fraude et de corruption même si ce n'est pas leur objectif premier. Une de ses propositions les plus marquantes est de créer une responsabilité personnelle du fonctionnaire national lorsqu'il déclare que le droit communautaire des marchés publics a été respecté.

 

3) Règlement sur les contrôles et vérifications sur place en matière de fraudes et d'irrégularités

 

Le 11 novembre 1996, le Conseil a adopté un "règlement relatif aux contrôles et vérifications sur place effectués par la Commission pour la protection des intérêts financiers des Communautés européennes contre les fraudes et autres irrégularités". Il s'applique à toutes les dépenses budgétaire se y compris donc les marchés publics financés par le budget de l'Union (ce qui inclut les marchés passés dans le cadre des réseaux transeuropéens et des fonds structurels) mais seulement lorsqu'il s'agit d'irrégularités graves, transnationales ou impliquant des opérations de plusieurs États membres. Sans toucher aux compétences des États, il permet à la Commission d'effectuer da sa propre initiative des contrôles sur place, après avoir préalablement informé les autorités nationales intéressées. Dans ce cadre, les contrôleurs de la Commission ont accès à tous les documents pertinents dans les mêmes conditions que les contrôleurs nationaux et leurs rapports ont la même valeur probante dans les procédures administratives et judiciaires. S'agissant de marchés publics, les contrôles comportent en particulier des entrevues avec les candidats exclus.

 

Ces dispositions offrent ainsi à la Commission des possibilités d'action accrues. Il faut souligner toutefois qu'elles comportent deux limites principales:

 

  • de manière générale, les interventions se bornent à des investigations non contraignantes, en excluant totalement toute action de contrainte policière ou judiciaire qui reste du ressort exclusif des États membres;
  • en matière de marchés publics, seuls sont couverts les marchés ayant un financement communautaire; sont donc exclus les marchés nationaux, même ceux qui atteignent les seuils d'application de la législation communautaire.

 

4) Un protocole à la convention sur la protection des intérêts financiers des Communautés européennes a été adopté par les États membres en juin 1997 pour pallier l'absence dans la plupart des États d'incrimination de la corruption des fonctionnaires de l'Union ou de ceux des autres États membres. Il fait de la corruption active et passive impliquant l'un de ces fonctionnaires un délit dans tous les États membres si elle porte préjudice aux intérêts financiers de l'Union.

 

B. Quelques exemples d'actions nationales suivant le rapport de l’Union Européenne ( texte intégral )

 

« Ils ont été choisis comme les plus significatifs d'une volonté de lutte spécifique contre la corruption dans les marchés publics se traduisant en particulier par la création de mécanismes originaux par rapport aux procédures policières et judiciaires habituelles.

 

I. Le "serious fraud office" britannique

 

Créé par la loi sur la justice pénale de 1987, il représente une innovation très nette dans le système de répression criminelle du Royaume-Uni. Sa compétence se limite aux affaires sortant de l'ordinaire notamment par leur gravité et leur complexité. Dans ce champ de compétence, il se saisit lui-même des affaires et cumule les rôles d'enquête aussi bien que de poursuite, alors que ces deux rôles de l'action répressive sont traditionnellement séparés (entre la police d'une part, le "Crown Prosecution Service" d'autre part). Son action bénéficie de pouvoirs spéciaux, que n'ont pas les instances répressives ordinaires:

 

il peut demander à toute personne disposant d'informations pertinentes de répondre à des questions ou de produire des documents: le refus de répondre à ces demandes ou le fait de donner des réponses fausses ou incomplètes constitue une infraction pénale;

 

il peut décider de déférer à la Crown Court (cour criminelle supérieure) une affaire examinée par la Magistrate's Court (cour inférieure), alors que ce dessaisissement relève en règle générale de la Magistrate's Court elle-même; une fois l'affaire transférée à la Crown Court, celle-ci peut commencer le procès et régler certaines questions (notamment la recevabilité des moyens de preuve) avant que l'affaire ne soit présentée au jury.

II. Les enquêtes "Mains propres" à Milan

 

Cette vaste opération judiciaire dure depuis près de 7 ans (fin 1991) et a comporté de très nombreuses enquêtes se rapportant, parmi d'autres domaines variés, à des affaires de marchés publics. Les principales caractéristiques en ont été:

 

  • la concentration des moyens d'enquête et de poursuite ("pools" de procureurs et substituts);
  • la mise de la police à la disposition directe des enquêteurs;
  • la collaboration d'experts extérieurs à la justice;
  • l'obtention d'aveux en chaîne, parfois grâce à des promesses de réduction de peines (les "repentis").

 

Pour plus de détails, on se reportera au rapport fait par le procureur Borelli pour le Conseil de l'Europe mentionné dans l'annexe bibliographique.

 

III. Les innovations législatives en France

 

Deux lois essentielles, au nom d'ailleurs significatif, ont ces dernières années visé à renforcer les instruments de lutte contre les irrégularités et la corruption dans les marchés publics et les délégations de service public. Ce sont:

 

  • la loi du 3 janvier 1991 "relative à la transparence et à la régularité des procédures de marché et soumettant la passation de certains contrats à des règles de publicité et de concurrence";
  • la loi du 29 janvier 1993 "relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques".

Elles ont apporté dans ces deux domaines des innovations substantielles.

 

1. La création du délit de "favoritisme"

 

La loi de 1991 a introduit dans le code pénal un nouveau délit, "l'octroi d'avantage injustifié" couramment appelé "favoritisme". S'appliquant à une personne détentrice d'une autorité publique, il consiste: à procurer un avantage indu dans l'attribution d'un marché public ou d'une délégation de service public; par un acte irrégulier (contraire aux lois et règlements en vigueur); faussant la liberté d'accès et l'égalité des candidats.

2. La mission interministérielle d'enquête sur les marchés publics

 

Créée par la loi de 1991, elle est chargée de vérifier la régularité et l'impartialité des procédures suivies dans la conclusion des marchés publics. Saisie par diverses autorités administratives, elle procède à des enquêtes destinées à découvrir les comportements contraires à la loi (législation sur les marchés publics, code pénal, droit de la concurrence...) et pour lesquelles elle dispose de larges pouvoirs:

 

  • enquêtes administratives: droit d'accès à tous locaux et documents professionnels;
  • enquêtes judiciaires (pour la recherche du délit de favoritisme): perquisition et saisie de documents.

 

Toutefois, la mission n'est pas habilitée à prononcer des sanctions; elle se borne à établir des rapports aux autorités qui ont demandé l'enquête. Les sanctions administratives relèvent de ces autorités, les poursuites pénales du procureur.

 

Pour des précisions sur son fonctionnement, on se reportera au rapport de M. Samuel du ministère français de la Justice (voir bibliographie).

 

3. L’application de certaines contraintes aux conventions de délégation de service public

 

La loi de 1993 complète le dispositif d'encadrement des marchés publics en soumettant aux principes de publicité et de mise en concurrence prévus par le code des marchés publics certains marchés conclus par les sociétés d'économie mixte. Mais son innovation essentielle a trait aux conventions de délégation de service public. Jusque-là, ces conventions se caractérisaient par l'entière liberté laissée à la collectivité publique en cause (État, établissement public, collectivité locale) aussi bien pour la procédure de passation que pour la durée du contrat. Désormais, cette liberté se trouve réduite sur ces deux points.

 

a) La procédure de passation des contrats

 

La collectivité publique doit désormais faire un minimum de publicité quant à son intention de procéder à une délégation de service public (le décret d'application de la loi a prévu une insertion dans une publication d'annonces légales et dans une publication spécialisée). Aux candidats qui se sont manifestés à la suite de cette publicité et qui, après examen de leur aptitudes (garanties professionnelles et financières, capacité à assurer la gestion de service public), ont été admis à présenter une offre, elle doit envoyer un document définissant les prestations recherchées.

 

Si l'autorité publique en cause est une collectivité locale, elle doit en outre:

 

  • soumettre le principe de la délégation au vote de son assemblée délibérante;
  • confier l'ouverture des offres à une commission constituée en son sein par cette assemblée suivant une méthode qui assure la représentation de la minorité politique;
  • soumettre le choix final du cocontractant au vote de l'assemblée.

Elle ne peut recourir à la négociation directe avec une entreprise que si aucune offre n'a été soumise ou acceptée.

 

b) La durée des contrats

 

Les conventions de délégation de service public doivent désormais être limitées dans leur durée. Elles ne peuvent en outre être prolongées que dans deux cas:

 

  • pour des motifs d'intérêt général, et seulement alors pour un an;
  • lorsque l'autorité a imposé à son cocontractant des travaux nécessaires à la bonne exécution du service mais non prévus au contrat initial.

 

 

 

La recherche des preuves est une entreprise longue et délicate qui nécessite des investigations nombreuses, aussi bien dans les services de l’entité qui lance le marché que dans l’entreprise qui a obtenu le contrat ainsi que chez ses sous-traitants. La recherche d’indices de fraude est donc indispensable et nécessaire, d’autant que les enquêteurs reçoivent rarement des informations exploitables directement.

 

Mais ce travail préliminaire n’est pas seulement du ressort des enquêteurs. Il doit obligatoirement être réalisé par le service de contrôle interne de l’entité pour permettre à ses dirigeants de prendre des mesures qui limiteront les risques.

Les risques proviennent des situations (absence de contrôle par exemple) et des agents (besoins d’argent, parfois, mais aussi désir de « briller », de montrer que l’on a du pouvoir). Ils sont donc nombreux et souvent difficiles à détecter. En outre, les responsables n’ont pas toujours les moyens de se lancer dans des investigations poussées et doivent recourir à des artifices qui permettent seulement de réduire, provisoirement, les risques.

 

La prévention consiste à mettre en place des procédures locales précises chaque fois que les procédures nationales sont inapplicables, à vérifier, grâce à des systèmes de contrôles internes, que ces procédures sont effectivement appliquées et à utiliser des contrôleurs externes indépendants pour réduire encore les risques de dérive. Par ailleurs, la prévention consiste à veiller au respect de chaîne hiérarchique. En effet, ce sont souvent des dysfonctionnements d’ordre hiérarchiques qui amènent ou permettent à des agents non mandatés de prendre ou d’assumer des responsabilités hors de proportion avec leurs compétences réelles. Tout subordonné peut prendre des responsabilités, à condition d’y avoir été autorisé et de rendre compte de ses actes à son supérieur. Sans cette autorisation c’est la responsabilité individuelle qui est mise en cause et non plus celle de l’organisme. C’est la raison pour laquelle, lors d’une enquête, les magistrats demandent toujours l’organigramme de l’entité concernée (publique ou privée) ainsi que les délégations de signature. En l’absence de délégations de signature explicite, c’est le directeur de l’entité qui est personnellement responsable des actes de ses agents.

 

Enfin, la prévention consiste à assurer la protection des agents de l’entité : protection contre les risques physiques mais aussi contre les tentations. Ainsi, il conviendra de s’efforcer de ne pas laisser seul un agent face à un corrupteur potentiel, ni de le laisser pendant trop longtemps dans le même secteur géographique pour éviter que des liens se nouent entre lui et certaines entreprises et que des informations susceptibles de rompre l’égalité des candidats dans un appel d’offres, puissent être données, même de manière involontaire, à l’un des concurrents.

 

C’est l’audit de la structure et la cartographie des risques qui permettent de prendre toutes ces mesures de prévention. Ces deux étapes sont indispensables pour éviter que les entités publiques ou les entreprises privées puissent être rendues coupables d’infractions pénales. Si des mesures ont été prises à la suite de ces études pour éliminer les dysfonctionnements relevés et que les contrôles hiérarchiques ainsi que les procédures sont suivis, l’organisation mise en cause bénéficiera de l’indulgence des juges puisqu’elle aura fait preuve, dans ses actions, d’une « diligence normale ».

 

 

II LA DEMARCHE OCDE

 

L’OCDE œuvre activement dans le domaine de la lutte contre  la corruption dans l’espoir d’asseoir « un monde sans corruption est un objectif crucial pour un grand nombre de gouvernements et d’organisations internationales. »

Il considère que la corruption a est génératrice de bon nombre d’effets dépassant de par leur gravité les actes répréhensibles que commettent tous les dirigeants et les entreprises impliqués dans le phénomène. Ces effets portent d’énormes préjudices à  des populations en quête de justice sociale, de développement durable et de bonne gouvernance.  Il cité à cet effet qu’un pot de vin d’un million d’euros peut rapidement représenter une perte de cent millions d’euros dans un pays pauvre, en anéantissant les plans de développement et en minant la cohérence des décisions d’investissement. Des routes qui restent inachevées, des écoles qui s’effondrent et des systèmes de santé paralysés, tels sont quelques exemples illustrant la gravité de ce phénomène.

Ces dix dernières années, l’OCDE passe pour devenir l’une des sources les plus marquantes en ce qui concerne l’élaboration d’instruments de lutte contre la corruption et d’expertise dans des domaines comme les transactions commerciales internationales, la fiscalité, la gouvernance, les crédits à l’exportation et l’aide au développement.

« « L’un de ses plus grands succès est d’avoir jeté les bases d’une éradication de la corruption dans les transactions commerciales internationales en établissant des législations strictes qui s’appliquent dans 36 des pays les plus développés ».

L’OCDE est néanmoins consciente du fait que ses outils, abstraction faite de leur pertinence, leur efficacité  est tributaire d’ « une véritable volonté politique d’éradiquer la corruption ». les états concernés par la politique de l’OCDE en la matière sont classés en trois catégories dont : le groupe qui a passé à l’action pour éradiquer le fléau de la corruption , le groupe qui se maintient au  stade de la réflexion et des bonnes intentions servies le plus souvent comme slogans politique de bonne gouvernance, enfin le groupe qui estime la continuité de l’état et l’efficacité des mécanismes mis en œuvre pour son développement peuvent parfaitement cohabiter avec le fléau.

L’OCDE lutte contre la corruption Une démarche pluridisciplinaire

La corruption, tout comme la plus part des dysfonctionnements sociétaux ne manque pas d’excuses sont présentées come des tentatives d’analyses des phénomènes :

  • Ø effets pervers de la mondialisation
  • Ø laxisme des pouvoirs publics en matière de contrôle
  • Ø inefficacité des systèmes judiciaires
  • Ø interdépendance entre justice te politique
  • Ø utilisation abusive de la lutte contre la corruption  comme moyen de règlement de compte entre clans politiques et lobbies économiques
  • Ø faibles salaires des décideurs face  à la pression sociale imposée par l’image virtuelle de classe moyenne qu’ils sont sensés constitutive
  • Ø avidité incontrôlable des acteurs déterminants des processus de décisions des politiques publiques
  • Ø omniprésence de conflits d’intérêts avec prédominance des intérêts privés au détriment de l’intérêt public, etc. …

 

 c’est pourquoi l’OCDE se penche pour une  démarche pluridisciplinaire pour lutter contre la corruption. Cette démarche englobe aussi bien les domaines qui vont de la lutte contre la corruption d’agents publics, la politique fiscale,  la gouvernance du secteur public et  l’intégrité du secteur privé  ainsi que l’aide au développement et aux crédits à l’exportation.

L’OCDE s’est érigé en instance essentielle de lutte contre la corruption et  a joué un rôle déterminant dans la définition et la promotion des normes et principes de lutte contre la corruption :

 

  1. Combattre la corruption en s’attaquant à « l’offre »

L’offre de pots de vins constituant l’un des aspects de la corruption active a fait l’objet de la Convention anticorruption de l’OCDE dont les stipulations sont centrées sur :

  • Ø La recommandation révisée du Conseil de 1997 sur la lutte contre la corruption dans les transactions commerciales internationales,
  • Ø les Éléments communs convenus de législation pénale et mesures connexes,
  • Ø la recommandation du Conseil de 1996 sur la déductibilité fiscale des pots-de-vin versés à des agents publics étrangers.
  • Ø La mise en œuvre d’un ensemble complet de mesures juridiques, réglementaires et politiques pour prévenir, détecter, poursuivre et sanctionner la corruption.
  • Ø L’obligation  de confisquer les pots-de-vin et les éventuels profits obtenus par suite du versement de pots-de-vin. Selon la Convention, les Parties doivent aussi collaborer pour assurer son application concrète, par exemple dans le cadre de la collecte et de l’échange d’éléments de preuve ou par le biais de l’extradition.

« Depuis l’entrée en vigueur de la Convention anticorruption de l’OCDE, il y a eu une augmentation sensible du nombre d’enquêtes et de poursuites dans ce domaine. Plus de 50 enquêtes ont été réalisées et plus de 30 condamnations ont été prononcées pour des faits de corruption transnationale dans les différentes Parties à la Convention. Des peines de prison ont été prononcées dans plusieurs pays et des particuliers et des entreprises jugées coupables de corruption ont été sanctionnés par des amendes pouvant atteindre dans certains cas 2 millions EUR. »

Il faut noter par ailleurs que  l’OCDE a pris le soin de ‘assortir la convention d’un ensemble des dispositions  visant le suivi systématique de son application pour s’assurer que ces instruments sont effectivement efficaces.

« Le processus international d’évaluation mutuelle et de pressions par les pairs auquel ce mécanisme a abouti au cours de la dernière décennie a servi aux pouvoirs publics de stimulant et de guide pour prendre des initiatives concrètes en vue de promouvoir l’intégrité dans le secteur des entreprises, prévenir la corruption et engager des enquêtes et des poursuites dans les affaires de corruption transnationale. »

  1. Lutter contre la corruption via les crédits à l’exportation

Les opérations des organismes de crédit à l’exportation sont également aux centres des préoccupations de l’OCDE dont la traduction est sensiblement apparente aux niveaux des clauses de la convention anticorruption.

Ces organismes, agissant au nom ou pour le compte des pouvoirs publics,  soutiennent les transactions commerciales internationales par le biais des formules d’assurance, de crédit ou de garanties de crédit en vue de ventes à l’étranger ; d’où l’importance que leur confère le pouvoir d’infléchir les décisions dans ce domaines positivement ou négativement suivant des critères qu’ils façonnent à leur discrétion avec d’normes risques de corruption bien entendu.

C’est à cet effet que l’OCDE, aux termes de la Convention et de ses instruments connexes, incitent les gouvernements à prendre les mesures adéquates  pour détecter et sanctionner la corruption d’agents publics relevant de ces organismes et de leurs complices (acheteurs ou  exportateurs)  dans les transactions commerciales internationales, notamment  celles financées par des crédits à l’exportation officiels.

Les efforts de l’OCDE dans ce domaine sont à l’origine de «  la Déclaration d’action sur la corruption et les crédits à l’exportation bénéficiant d’un soutien public en décembre 2000 » qui peut être tenue pour premier ensemble de mesures dissuasives des actes de corruption dans les transactions commerciales bénéficiant des soutiens publics , elles se présentent , grosso modo, en tant qu’action visant :

  • Ø d’intensifier leurs efforts par une grande vigilance vis-à-vis des transactions présentant des risques apparents de
  • Les pots de vin ne seront plus traités comme des dépenses commerciales ordinaires ou nécessaires.

Pour assurer une détection efficace de cette infraction, l’OCDE a publié un Manuel de sensibilisation à la corruption à l’intention des contrôleurs des impôts en 2003, qui est désormais disponible en 13 langues. »

 

 

  1.  Améliorer la transparence et clarifier la responsabilité dans le service public :

L’OCDE met l’accent sur la bonne gouvernance du service public afin de prévenir la corruption – s’attaquant ainsi à des aspects cruciaux de « la demande » de corruption.

En effet , les conflits d’intérêts constituent une menace essentielle pour l’intégrité dans le service public qui compromettent sérieusement l’ intégrité dans les services publics en mettant au dessus de l’intérêt général les intérêts privés des agents publics.

Il s’agit pour l’essentiel de mettre au point « une norme de modernisation des structures de gouvernance destinée à détecter et gérer les situations de conflits d’intérêts. » cette mesure a été accompagnée d’ un « mode d’emploi » pratique qui a été mis au point en vue de mettre en œuvre les principes de bonne gouvernance telles que définies par l’OCDE sur le terrain.

« Depuis l’adoption de la Recommandation de 2003, 23 des 30 pays de l’OCDE ont amélioré les normes prévues par leurs lois et leurs codes de conduite et ont renforcé les mesures d’application visant à prévenir les conflits d’intérêts. L’OCDE a récemment examiné les dispositifs de promotion de l’intégrité dans le domaine du lobbying et de l’emploi après l’exercice d’un mandat public. »[27]

Cependant, l’OCDE estime que pour prévenir la corruption, l’élaboration et l’application des normes essentielles d’intégrité et de lutte contre la corruption sont très limitées. En effet, en l’absence de conditions favorables dans l’administration publique, conditions parmi lesquelles la transparence et la responsabilité jouent un rôle essentiel, les efforts de lutte contre la corruption et l’amélioration de la gouvernance risquent de demeurer sans effets palpables.

 

« La simplification des procédures administratives, la réforme de la réglementation, l’administration en ligne, la comptabilité ainsi que le contrôle des finances publiques et de l’emploi public sont des composantes essentielles d’une stratégie à long terme visant à remédier à la corruption en favorisant une culture de l’intégrité et en renforçant la résistance à la corruption, notamment dans les domaines à risque. »[28]

Concernant les marchés publics, l’OCDE estime, et c’est à juste titre d’ailleurs , qu’ils sont les plus exposés aux  risques de dérapages et corruption. Il met actuellement au point un guide pratique pour aider les organismes publics à prévenir et détecter les actes de corruption dans le processus de passation des marchés publics.

Parmi les aspects les plus sensibles de l’achat public, les membres ayant approuvé  la Convention anticorruption de l’OCDE se penchent sur les conditions de participation aux appels d’offres et les sanctions dont sont passibles les actes frauduleux.

L’OCDE a aussi mis au point

  • un Cadre d’évaluation, outil pratique à l’intention des organismes publics pour les guider dans l’évaluation de leur dispositif de promotion de l’intégrité dans le service public.
  • Un code de conduite à l’intention des entreprises internationales qui fait partie d’un ensemble plus vaste d’instruments sur l’investissement international englobant tous les domaines de l’éthique commerciale, notamment la publication d’informations, la transparence et la lutte contre la corruption.
  • une feuille de route claire et pratique pour améliorer la qualité et l’impact positif de l’aide au développement en  alignant  l’aide fournies par les pays donateurs  sur les initiatives des pays réceptionnaires des dons et à promouvoir l’appropriation locale des réformes pour lutter contre la corruption.


[1]    Arnaud ZACHARIE, la bonne gouvernance est elle un préalable aux financements internationaux ou est ce le contraire ? – Centre National de la Coopération au Développement, Belgique.

[2]    J. Stiglitz «  la grande désillusion », Fayard , 2002

[3]    PNUD, Bonne gouvernance et développement humain durable.

[4]    Sémou Diouf, Institut Afroacadémy «  la bonne gouvernance : opinions, analyses et commentaires »

[5]    Indicateurs de gouvernance : où sommes nous, où devrions nous aller ? Document de travail 4730 consacré à la recherche sur les politique – Daniel Kaufman et Aart Kraay, p 4

[6]    Jean Fabre, Meisel & Ould Oudia – conception de la gouvernance, Regards croisés de la Banque Mondiale, de la Commission Européenne et du PNUD – Note d’analyse ( axe thématique I)

[7]    Gouvernance, dossier documentaire 1999 - ÉLABORÉ par la DIRECTION GENERALE DE L'URBANISME, DE L’HABITAT ET DE LA CONSTRUCTION- CENTRE DE DOCUMENTATION DE L'URBANISME

[8]    SMOUTS Marie-Claude, Du bon usage de la gouvernance en relations internationales, in La gouvernance. in Revue internationale des sciences sociales, n° 155, mars 1998, pp. 88 (CDU 37333)

[9]    La “ gouvernance ”. Concept mou, politique ferme, in Gouvernances. in Les Annales de la recherche urbaine,n° 80-81, déc. 1998, pp.

[10]  Rapport OCDE sur les actes frauduleux dans les marchés publics

[11]  Rapport OCDE précité.

[12]  Projet de décret relatif aux marchés publics et leur contrôle de 2010- Site web du Secrétariat Général du Gouvernement - Maroc

[13]  La lutte contre la fraude et la corruption dans les marchés publics , Jean-Pierre BUEB – FORUM MONDIAL DE L’OCDE SUR LA GOUVERNANCE 

[14]  Décret relatif aux marchés publics de 2007 ( marchés négociés)

[15]  Loi 69.00 relative au contrôle financier de l’Etat sur les établissements et les entreprises publiques.

[16]  Rapport OCDE précité

[17]  Rapport de l’OCDE précité

[18]  Loi type de la CNUDCI sur la passation des marchés de  biens, de travaux et de services ONU 1995

[19] Marchés complémentaires, site web marchés publics.fr

[20] Rapport de l’OCDE précité

[21] Rapport OCDE précité

[22] Rapport OCDE précité

[23] Rapport OCDE précité.

[24] idem

[25] PARLEMENT EUROPÉEN /Direction Générale des Études  /DOCUMENT DE TRAVAIL

Mesures de Prévention de la Corruption dans les États Membres de l'UE

Série Affaires Juridiques /ANNEXE : Lutte contre la corruption et marchés publics

 

[26] [26] PARLEMENT EUROPÉEN /Direction Générale des Études  /DOCUMENT DE TRAVAIL

Mesures de Prévention de la Corruption dans les États Membres de l'UE

Série Affaires Juridiques /ANNEXE : Lutte contre la corruption et marchés publics

 

[27] Rapport OCDE précité,

[28] idem

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31 juillet 2012

NOUS ALLONS ÉTEINDRE LE SOLEIL (POÈMES)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Nous allons ETEINDRE le soleil…

 

idées presque structurees

en phrases musicales

 

poesie en d’autres termes !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Assou ouchen

2011-2012

 

 

 

Nous allons éteindre le soleil…

 

 

 

Quel drôle de destin que d’être suspendus,

Ballotés entre deux mondes distendus

En perpétuelle crainte d’être bassement vendus

Tantôt plongé dans l’effort d’une ascension ardue

Tantôt dans la crainte de la descente aux enfers ?

 

Est-ce notre destin de croire nos visions…

De sombrer en plein méandres de nos dérisions.

D’élaguer sans répit   les branches de nos déceptions

Amplifiant davantage leurs épineuses ramifications

Inhibant notre sagesse, soûlant nos délires ?

 

 

Est-ce notre destin de lamper les discours insipides

De les ingurgiter jusqu’à leur lie aux odeurs fétides

Et de croire que nous sommes des messies intrépides

Qui reviendront un jour bousculer cet univers ?

 

Quelle misère que ces rêves amers

Ces promesses dérisoires et éphémères

Ce projet de bonheur élaboré en soupirs

Et ces chagrins gauchement grimés en sourires..

 

Alors ; il ne nous reste que de monter là haut

Au firmament des cieux éteindre ce soleil lugubre

Pour qu’il cesse de propager sa lumière funèbre

Et puis nous éventrerons les alluvions des ténèbres

Par des petites bougies embrasant nos désires.

 

Assou OUCHEN

 

 

 

 

 

 

 

CHOIX

 

 

 

Entre dignité et débauche…

Il n y ’a que l’embarras du choix

Entre la saveur étouffante de la dignité…

Ou la puanteur attirante de l’indignité

Ou les alterner pour amplifier leur intensité

Nous sommes donc dans l’embarras du choix..

Dans quelle case allons tracer nos croix ?

 

Entre romances vraies ou illusoires

Et froideur des sombres trottoirs ?

Comment agrémenter nos amours ?

Sans perpétuer éternellement nos douleurs….

Nous n’avons que l’embarras du choix

Dans quelle case allons tracer nos croix ?

 

Assou OUCHEN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Solitude

 

Solitude… solitude !

 

Que penser de toi ?

Tantôt tu es tellement désirée et fugace

Tellement désirée comme l’air que je respire

Tantôt ennuyeuse telle une déprime qui s’étire.. 

Qui transforme mon envie de vivre en glace….

 

Solitude… solitude !

 

Quand tu me tiens, tu me prends en otage

Plus tenace qu’une femme amoureuse,

Tu peints mes rêves par tes nuances sauvages

Tu me largues en plein méandres ténébreuses

Où déceptions sur déceptions arrivent en déluge,

Inonder ma petite vie vaine, moins rugueuse

 

Solitude… solitude !

 

Et pourtant,

Il m’arrive de faire de toi mon antre secret ….

Mon fanum inviolable que personne ne traverse

Où je me réjouis de prendre tout à l’inverse

Et me faire une vie aux espérances nacrées 

 

Assou OUCHEN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’untel qui court ….

 

 

Il était une fois un « untel »…

Qui ne faisait que courir

Comme l’abeille aveugle qui butine le vide

Qui courre jusqu’à en devenir livide

Sans s’offrir un temps pour sourire

Toujours enclin à souffrir ….

Il était une fois ….

 

Errant d’un mirage vers un mirage..

Sans trajectoire, sans repérages..

Sans répit, toujours en délire

Sans savoir comment, du gouffre, allait-il sortir

Ou comment désagréger ses engrenages..

Il était une fois..

 

Un « untel » avide à en mourir.. 

Vorace en quête de proies…

Pour qui, scrupule n’est qu’adage…

Usant d’armes dignes d’un sauvage...

Défiant jusqu’à l’idée d’un cheval de Troie

Qui pourrait ruiner tous ses désirs….

Il était une fois…

 

Un jour, dans sa course effrénée…

Il fut lâché par ses muscles avachis..

Ses envies l’avaient enfin assassiné

Ses ambitions l’avaient enfin lâché…

Perdant son âme sans être couronné..

 

Et comme toutes ces ordures

Qui nous étouffent et nous entourent

 Il savait comment il allait périr

En charognard entrain de pourrir

Au bout du chemin sans retour

Dans une cellule sombre sans lueurs !

 

Assou OUCHEN

Rabat 2010

 

UNE ETOILE VA MOURIR

 

Ainsi parla-t-il comme un oracle

« une étoile va s’éteindre et mourir ce soir..

Laissant l’univers sombrer dans le noir

Et ca sera   sûrement la débâcle »

 

« Le roi des ténèbres va être couronné

Émerger de son temple de brouillard

Ses fans vont dérouler ses étendards

Qu’on sentira en nous bien boulonnés

Et personne n’aura plus sa faculté de regard

Ce soir, nous seront tristement abandonnés »

 

« Moha en couleurs [1]» présageait ainsi,   en transes

Cabotant dans l’immense océan de ses délires

 Dérivant au gré des voiles de son navire

Des vagues houleuses de sa démence  

 

L’étoile, insouciante, sillonnait les ténèbres

Se moquant de ce monde au teinte funèbre

Depuis sa naissance, elle traversait les cieux

Ignorant qu’elle deviendra l’elfe des dieux

 

« Moha en couleurs » est le seul à voir son ’étoile,

Qui, dans ses épigrammes, nommait « ma Sisyphe céleste »

Acharnée à diffuser sur l’univers sa lumière modeste

Se tuant chaque nuit pour percer l’opacité des toiles !

 

Moha était le seul à voir grandir son usure

Et son éclat faiblir atténuant ses lueurs

Moha savait que son étoile va enfin céder

Priant les dieux des cieux pour bien l’aider

 

Assou OUCHEN

Rabat 30juillet 2012

 

 

 

 

 

VIVE LA MORBIDE  DEPRIME

 

 

Ma déprime à moi est tenace...

Ma déprime à moi s’exprime..

En étalant toute sa puissance

Ma déprime à moi, m’est très intime

Nous jouons à des jeux sublimes !

 

Ma déprime à moi, quand elle me lâche..

Je plonge droit dans mes rêves ratés..

Pour voir s’ils sont toujours mal bâtis

Et que l’étau qui les serre est sans relâche..

Et que pours toujours je suis mal loti

 

Ma déprime à moi, quand elle m’oublie

C’est qu’elle a assez de mes fausses folies

Et de peur elle même de se voir en dépression

Elle me quitte me laissant en pleine rémission

Et quand elle rapplique, c’est avec d’étranges lubies !

 

Ma déprime à moi me sert d’abord le dégoût

De ne voir de ma vie que ses puants égouts

Et de faire de mes déceptions mon seul ragoût

Et puis de me souffler, comme ça, insidieusement

De rejeter toute la vie et de monter au firmament   

 

Assou OUCHEN

Rabat juillet 2012

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’AMOUR IMPOSSIBLE

 

J’ai parcouru mille et un chemins,

J’ai veillé mille et une nuits,

En quête d’un amour incertain,

D’un câlin timide qui me fuit,

 

J’ai sondé ses yeux aux couleurs d’ébène

J’ai traqué ses murmures confus, obsédants

Espérant un signe qui vers son cœur me mène

Y semer mes petits grains d’amour abondants

 

J’ai nourri tant d’espoirs vains et illusoires,

J’ai bâti mes envies sur des fondations virtuelles

Me faisant la proie d’une déception sans savoir

A quel point un amour peut être impossible et cruel !

 

Assou Ouchen

 le 15juillet 2012 – rabat

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Prémonitions

 

 

J’essaye de lire dans ta boule de cristal

Je vois le bien qui lutte contre le mal

Je vois l’amour te conduire vers ses dédales

Je vois tes espoirs qui s’effritent, qui s’affalent….

 

Je lis mon enfant, je découvre, je prédis

Ta vie est un livre presque inédit

Ses pages,   moitié pleines, moitié éludées

Ses phrases bâtardes presque non soudées…..

 

Juste un chapitre aux passages bouffis

Plein de sentiments piètrement déconfits

je vois ton audace braver les défis

Comme arme de survie, elle te suffit

 

Elle te portera loin des pages vides

Des phrases étriquées, des cauchemars sordides

Vers le bonheur qui t’habite et te guide

Sois rassuré mon enfant, la vie n’est jamais vide…

 

OUCHEN ASSOU

LE 12 JUILLET 2012

RABAT

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

AMOUR SUR FACEBOOK

 

 

Devant ton maigre profil, devant ta belle image

Je libère de mon conscient tous mes fantasmes

Je ratisse contours et recoins cachés de ta page

Espérant trouver une issue pour mon marasme

 

Je cultive la certitude de t’avoir connue

D’avoir vécu ensemble un amour réel

On se clique des « j’aime » en continu

On se déclare nos passions en virtuel

 

Jusqu’au jour où les fantasmes deviennent routine

Le jour où on s’ignore, on s’oublie puis on s’efface

Les fantasmes meurent, les rêves éphémères se peaufinent

S’ouvrant sur ce vide où la solitude n’est plus fugace !

 

C’est ainsi madame que j’ai cru t’aimer

Plutôt aimer l’icône que t’ai dessinée

Avec mes désirs stupides et affamés

Avec mes espoirs distordus et calcinés

 

Assou ouchen

Le 16 juillet 2012

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ELFE D’OUTRE CIEL

 

 

C’était un après midi pas comme les autres,

Dans un endroit qui me semblait être autre

J’errai seul, hagard, sans but précis

Étourdi par mes rêves d’éveil, indécis !

 

Au milieu des cèdres agrestes éblouissants

Majestueux, défiant l’usure du temps

Narguant les denses nuages en les perçant

Bravant l’enfer solaire torride et renversant !

 

Et soudain, cette brise me caressa le visage

Diffusant en moi ton doux parfum d’Éden

M’étourdissant, me grisant encore et davantage

Jusqu’à ce que ta présence divine m’illumine

 

Les branches des cèdres entamèrent leur danse..

Aux rythmes des chants de tes anges d’amour…

Les nuages s’éclipsèrent à la même cadence..

Et le soleil mua sa braise en douce chaleur !

 

Et je te vis, splendide comme dans mes songes

Sensuelle, magiquement belle, envoutante,

Je t’ouvris mon cœur en espérant que tu plonge

Au fond de lui, prendre mon âme souffrante !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

NE ME LAISSE JAMAIS SEUL

 

Loin de toi, je grelotte de froid

Ma solitude m’emplit d’effroi

 

Ne me laisse jamais seul, jamais

Je ne vis que par toi mon aimée

 

Loin de toi mes repères sont perdus

Mon chagrin intense devient ardu

 

Inquiet, ma gorge horriblement nouée

T’ai-je perdue ? N’étais-je qu’un jouet ?

 

Ne suis-je plus l’amant qui t’a charmé ;

Pour me laisser seul, vidé et désarmé ?

 

Mais te voilà revenue éclairer mes ténèbres

Et dissiper toutes mes craintes funèbres

 

Ne me livre jamais seul en proie à la solitude,

Ta présence est vitale, loin d’être habitude !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Merde à la vie !

 

 

Le jour où la vie lâchera prise

Je serai libre d’errer à ma guise

J’irai loin, au delà des cieux ténébreux

Des lumières fugaces, des espoirs creux

Vers d’autres univers plus limpides

Là où les anges ne sont pas insipides !

 

Le jour où la mort m’écartera ses bras accueillants

Me comblant de murmures divinement émouvants

Me faisant chanter la gloire de l’éternité

Du temps qui n’existe plus comme vérité

M’arrosant de lumière divine nette, inaltérable

Me grisant de bonheur « bio », intarissable !

 

Le paradis, l’enfer, rien que foutaises délirantes

Raisons d’amour et de crainte de vie obsédantes,

L’enfer, c’est la vie avec ses dures turbulences

Le paradis, c’est la mort avec ses belles évidences

La vie nous accroche par tant de souffrances

La mort attend pour exhausser nos espérances !

 

Assou ouchen

Rabat 24/7/2012

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ERRANCE SURNATURELLE

 

 

 

 

Le jour où la vie lâchera prise

Je pourrais errer à ma guise

J’irai loin, au delà des cieux,

Là où les jeunes, ne font pas de vieux

 

Là où les guirlandes comme des joyaux

Suspendus sans attaches, sans noyaux

Diffusant des lumières chatoyantes

Propageant des musiques envoutantes

 

Là où les joies me seront très accessibles

Là où les envies ne seront plus irrésistibles

Où les formes auront les mêmes valeurs

La même beauté pure aux mille couleurs

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COUP DE FOUDRE

D’UN SOIR D’ETE

 

 

 

 

Hier au soir, de part, et d’autre

Comme on se plait à dire souvent

Passa un regard furtif et bref,

Porteur d’un « désir de couvent »

 

Deux cœurs sentirent l’effet

D’une attirance magnétique

Un seul regard avait suffit

Pour allumer la braise magnifique

 

Cette nuit d’été devint alors sublime

Un nouvel amour vient de voir le jour

Cupidon s’en va, fier des ses victimes

Les cœurs unis par la « flèche-bonheur »

 

Des regards où brille une tendre romance

Jaillit cette lumière grisante de l’amour

Les murmures devinrent des chants intenses

Témoignant qu’Apollon est de retour !

 

Assou OUCHEN

Le 24 juillet 2012

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Miroir

 

Miroir,

 

Ô miroir ! Dis moi, suis-je belle ?
Reflètes-tu ce que mon égo veut voir
Ou juste l’éclat de mon image réelle ?
Dis-moi confident, mon beau miroir !

 

Miroir !

 

Puis-je garder l’éclat de mes vingt ans

Mes amantes et mes amours torrides

Puis-je   ne vivre que ces instants

De joies dont je suis tellement avide ?

 

Miroir !

 

Peux-tu être mon allié fidèle, invincible

Contre le temps qui coule dans mes veines

Visant à réduire ma fraîcheur en signes horribles

En rides sèches, profondes, balourdes et vilaines ?

 

Miroir !

 

Peux-tu m’aider à garder mes chers trésors

Aussi luisants, loin, très loin de toute usure

Défiant le temps, bravant ses effets retors

Jusqu’au départ pour mon ultime demeure ?

 

Assou OUCHEN

 

 

 

 

 

 

 

 

CADEAUX MACABRES 

 


Que faire de tes châteaux

Que tu n’as jamais construits ?
Ne me les offres pas en cadeaux

je n’en serai jamais ravie ni éblouie..
Ils puent la suée

Des misérables que tu as dépouillés 
Et macabrement pollués

Du sang de ceux que tu as endeuillé 
Garde tes châteaux pour toi

Pour ta solitude, je refuse d’être souillé !

 

Que faire de tes sales bijoux incolores                                                                                                                        

Pour lesquels tu n’as versé aucun centime,

Fruits d’un marché de honte, sans honneur

Où ta dignité est dropée dans l’abime

Crois tu que ces parures feront la gloire

D’un pourri, corrompu, horriblement notoire

Garde tes sales joyaux pour toi,

Pour tes yeux, je refuse de devenir victime !

 

J’avais bêtement cru que tu va m’offrir

Un amour, juste un amour immaculé

Que tu n’oseras jamais me faire souffrir

Que je serai ton ange sacré et cajolé

Comblée pour toujours par ton sourire

Propre, intact, dignité pure et enjôlée

Garde ton amour, il me fait vomir

Pour tes putains dont l’honneur s’est envolé

Vous aurez tous au moins

Cette perte comme aloi commun !

 

Assou OUCHEN

Rabat le 26 JUILLET 2012

 

 

 

 

 

MIDELT.. MON BEAU SOUVENIR !

 

 

Midelt, ma chère source, mon nid d’enfance

Sais-tu à quel point tu as marqué mon existence ?

M’avoir aidé à déjouer les dérives de l’adolescence ?

Sais tu que tu nous a fait découvrir la romance

L’amour de filles pudiques et sa platonique souffrance ?

 

Midelt, mon cher nid d’ambitions,

De rêves d’enfant, tu es collée à ma mémoire

Tu es les sources de mes premières notions

Tu es l’arbre dont j’avais tiré mon savoir !

 

Midelt chérie, fou est celui qui pense

Que le temps flanche   puis il passe,

Et qu’avec lui, dans l’oubli, tout s’enfonce

 Ou qu’avec son éclipse tout s’entasse,

 

Midelt, ta terre se souvient de moi,

Du sang de mes genoux de gosse instable

Tes jardins fruitiers, tes peupliers, tes bois

Que de souvenirs de gosse inoubliables

 

Les lunes de tes nuits magiques et argentines

Ont écouté les aveux des mes premiers amours

Ont tracé les sentiers nocturnes qu’elles illuminent

Et je les ai arpentés vers ce présent que je savoure

 

Que de joies, que de tristesses m’a tu donné 

Que de rêves tes collines ont rendu possibles

Que de rendez-vous jamais abandonnés

Que j’ai vécu tantôt joyeux, tantôt pénibles

Midelt, mémoire de mes vingt printemps

Tu resteras la même et merde pour le temps !

 

Assou OUCHEN

Rabat , 27 juillet 2012

 

 

PETITE ROBE NOIRE

 

 

Petite robe noire

Gisant sur le bord du lit

Témoin de tant de gloires

De tant d’ébats en sublimes délit

 

Petite robe, couleur d’ébène

Héroïne de fantasmes lubriques

D’étreintes charnelles emphatiques

D’ âmes et corps qui se démènent

Pour finir à n’être qu’un



[1] Le fou du patelin  ( Midelt 1974)

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